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Carrefour est « complice et acteur de la colonisation israélienne », selon un rapport associatif

L’accord signé par le géant français de la distribution et des enseignes israéliennes, implantées dans les colonies, a été condamné par des ONG
Les enseignes Carrefour pourront s’installer en Israël avant la fin de l’année 2022 (AFP/Pascal Guyot)
Les enseignes Carrefour pourront s’installer en Israël avant la fin de l’année 2022 (AFP/Pascal Guyot)
Par MEE

Le groupe français Carrefour, l’un des leaders mondiaux de la distribution alimentaire, est accusé par plusieurs ONG de devenir « complice et acteur de la colonisation israélienne ».

Le mercredi 16 novembre, l’Association France Palestine Solidarité (AFPS), Al-Haq, la Confédération générale du travail (CGT), la Fédération commerces et services de la CGT, la Ligue des droits de l’homme, la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine et l’Union syndicale Solidaires ont publié un rapport intitulé « Les liaisons dangereuses du groupe Carrefour avec la colonisation israélienne ».

Le 6 mars 2022, le géant Carrefour a finalisé la signature d’un accord de franchise en Israël avec la société israélienne Electra Consumer Products et sa filiale Yenot Bitan.

Les enseignes Carrefour pourront ainsi s’installer en Israël avant la fin de l’année 2022 et tous les magasins Yenot Bitan, « plus de 150 à ce jour », pourront avoir accès aux produits de marque Carrefour avant l’été.

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De plus, les deux marques d’Electra Consumer Products, Yenot Bitan et Mega, seront abandonnées au profit de la marque Carrefour d’ici la fin de l’année 2022, et, d’ici trois ans, plus de 150 succursales Yenot Bitan/Mega commercialiseront la marque Carrefour, parallèlement à l’ouverture de nouveaux supermarchés.

Or, souligne le rapport des ONG, « au moins trois des magasins de l’enseigne Yenot Bitan sont implantés dans les colonies israéliennes en territoire palestinien occupé, toutes illégales au regard du droit international, ce qui entraînera, dans ces colonies, la présence de boutiques contractuellement reliées à Carrefour, et proposant des produits Carrefour ».

« L’implication directe de Carrefour dans la colonisation sera alors affirmée de manière très claire, très directe et particulièrement indécente », estiment les associations.

Electra Ltd épinglée par l’ONU

Selon le même rapport, « Carrefour se compromet avec des sociétés israéliennes, elles-mêmes très impliquées dans la colonisation : Electra Consumer Products est impliquée dans le cadre de certaines de ses activités et la société mère d’Electra Consumer Products, la holding internationale Elco Ltd, est, par l’intermédiaire de ses filiales, dont Electra, qui partage sa marque avec Electra Consumer Products, un des plus importants acteurs de la colonisation israélienne ».

Les ONG rappellent que l’accord passé par Carrefour et ses partenaires israéliens est « contraire aux obligations des entreprises en matière de droits humains et de respect du droit international humanitaire qui découlent des Conventions de Genève de 1949, et qui sont précisées par les Principes directeurs de l’ONU et par les Principes directeurs de l’OCDE ».

Sans parler du fait que « cet accord est en contradiction avec la philosophie affichée par Carrefour en matière d’éthique et de droits humains, tout en mettant en évidence l’insuffisance du plan de vigilance élaboré par Carrefour ».

Electra Ltd participe à la colonisation par la construction et l’entretien d’infrastructures coloniales : routes, bâtiments publics, universités, transports, logements...

Electra Ltd figure sur la liste des 112 entreprises participant à la colonisation, établie par l’ONU en 2020.

Electra Consumer Products est détenue par la holding israélienne Elco Ltd, dont la filiale Electra Ltd participe à la colonisation par la construction et l’entretien d’infrastructures coloniales : routes, bâtiments publics, universités, transports, logements, distribution de l’eau, télécommunications, services et fournitures de matériel à l’armée et à l’administration israéliennes dans leurs activités de colonisation.

« La colonisation est un crime de guerre, qui se déroule devant nos yeux. Elle est particulièrement promue par les partis israéliens majoritaires à l’issue des dernières élections. Les entreprises, notamment Carrefour, l’État [français] et l’Union européenne doivent prendre toutes leurs responsabilités face à cette situation inacceptable », rappellent les ONG.

Le groupe français, a réagi dans un email envoyé au quotidien Ouest-France : « Carrefour n’exerce aucune activité directement en Israël et n’a aucune participation capitalistique dans Yenot Bitan. Le groupe respecte les exigences juridiques qui s’imposent à un franchiseur. » 

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Pour leur part, les ONG signataires du rapport demandent au groupe Carrefour « de se conformer aux principes internationaux rappelés dans ce rapport en cessant toute activité en lien avec la colonisation israélienne, ce qui implique de mettre fin dans les plus brefs délais à son partenariat avec l’entreprise Electra Consumer Products et sa filiale Yenot Bitan ».

Elles demandent également à l’État français « d’agir pour que le groupe Carrefour et les autres entreprises françaises prennent la pleine mesure de leurs obligations et mettent fin à toute relation d’affaires pouvant avoir un lien avec la colonisation israélienne ».

Les ONG enjoignent également à l’État français d’« attirer fortement l’attention du groupe Carrefour sur les risques juridiques et réputationnels qu’il prendrait en poursuivant ce partenariat ».

Une rencontre entre la direction de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) de Carrefour, l’AFPS et le collectif qui a signé le rapport, dont la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine, est prévue ce jeudi 17 novembre dans la matinée, selon Ouest-France.

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