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Le Koweït expulse une présentatrice télé libanaise en raison de contenus « immoraux » publiés sur les réseaux sociaux

La décision d’expulser Sazdel El Kak a déclenché en ligne un débat plus large sur la signification des « bonnes mœurs »
Sazdel dit ne pas avoir été informée des règles spécifiques qu’elle avait enfreintes (capture d’écran/Instagram)
Sazdel dit ne pas avoir été informée des règles spécifiques qu’elle avait enfreintes (capture d’écran/Instagram)

Le ministère koweïtien de l’Intérieur a expulsé Sazdel El Kak, une présentatrice et personnalité publique libanaise, pour « atteinte aux bonnes mœurs » en raison de contenus publiés sur les réseaux sociaux. 

Âgée de 42 ans et plus connue sous le nom de Sazdel, elle compte plus de 300 000 abonnés sur Instagram, où elle publie régulièrement des contenus mode et beauté. Sazdell vit au Koweït depuis dix ans et est propriétaire d’une clinique esthétique.

Traduction : « Une présentatrice de télévision libanaise – apparemment surnommée “la Kim Kardashian arabe” – a été expulsée du Koweït… »

Sazdel a déclaré à des médias locaux qu’elle s’était engagée à ne pas porter de vêtements moulants et à ne pas prendre de photos sur Snapchat, et qu’elle avait reçu jeudi dernier un appel du ministère de l’Intérieur qui l’avait convoquée pour approfondir la question.

Sazdel a ensuite été placée en garde à vue. Elle n’a pas été autorisée à rencontrer un représentant de l’ambassade du Liban et on lui a réservé par la suite un billet sur un vol de retour vers le Liban, a-t-elle raconté.

« La solution, c’est de clarifier les lois »

Son expulsion a suscité un débat plus large en ligne au sujet des expulsions fondées sur des atteintes aux bonnes mœurs.

Sur les réseaux sociaux, certains internautes ont condamné l’expulsion de Sazdel, dénonçant une restriction de la liberté d’expression, tandis que d’autres ont défendu la décision en déclarant que celle-ci était légale et protégeait les vertus et les valeurs de la société koweïtienne. 

https://twitter.com/_realthoughts12/status/1317429174982922242?ref_src=twsrc%5Etfw%7Ctwcamp%5Etweetembed%7Ctwterm%5E131742917498

Traduction : « Même si je ne soutiens pas ses contenus, nous devons comprendre ce qu’on appelle la liberté d’expression [tant qu’elle ne nuit à personne]. Nous ne pouvons pas obliger tout le monde à s’habiller comme nous le voulons… Ce n’est pas bien de pousser les gens à faire ce qui nous plaît tant qu’ils ne font de mal à personne… »

Traduction : « Elle met son corps en scène depuis plus de cinq ans et personne ne lui a jamais rien dit, malheureusement. Aujourd’hui, nous remercions le ministère de l’Intérieur d’avoir pris des mesures contre elle et d’autres personnes. Ces agissements sont étrangers à notre société conservatrice. » 

Traduction : « Au revoir, nous prions pour vous. Nous sommes une société conservatrice et vous devez respecter cela. Maintenant, allez à Beyrouth et faites ce que vous voulez, autant que vous le voulez. »

Le problème est que la législation en matière de décence publique au Koweït n’est pas claire, relève Sazdel dans un post sur les réseaux sociaux.

« Lorsqu’on entend parler de lois relatives à la décence publique, mon interprétation sera complètement différente de celle d’une autre culture. »

« La solution, c’est de clarifier les lois et d’indiquer précisément la nature de ces atteintes à la décence publique. Ainsi, personne ne s’attirera des ennuis ni n’enfreindra les lois. Si je vis dans un pays, bien sûr que je respecterai ses lois. »

Dans la vidéo, Sazdel a également précisé qu’elle n’avait pas été informée des règles spécifiques qu’elle avait enfreintes.

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Dans une autre vidéo publiée lundi, la présentatrice affirme avoir été bouleversée par la tournure des événements, soulignant que cela donnait une image négative à sa carrière au Koweït, au cours de laquelle elle a présenté des programmes pendant six ans, couvert des festivals et géré sa clinique esthétique.

« Tout ça parce que j’ai peut-être enfreint une nouvelle loi ou une loi pas assez claire. »

Sazdel a déclaré au journal Al-Rai que comme elle est mariée à un Koweïtien, son expulsion pourrait être annulée.

« Ce qui m’est arrivé et l’expulsion décidée par le ministère de l’Intérieur s’évaporeront dès lors que je présenterai mon contrat de mariage avec un Koweïtien », indique-elle dans des propos relayés par le journal.

« Ils n’ont pas le droit de m’expulser »

« Actuellement, il est en voyage à l’étranger. Quand il reviendra, je montrerai [le contrat] et je retournerai au Koweït parce que mon mari est Koweïtien et qu’ils n’ont pas le droit de m’expulser. »

Dans un post sur Instagram, Sazdel a déclaré qu’elle ne souhaitait plus vivre au Koweït après ce qui lui est arrivé mais qu’elle s’y rendrait pour garder un œil sur ses affaires. Elle a ajouté que son mari examinerait les aspects juridiques de son expulsion.

« Pour la première fois, je parle en public de mon mariage avec un ressortissant koweïtien… Il va entreprendre des démarches juridiques lorsqu’il rentrera de l’étranger dans une semaine. »

L’expulsion de Sazdel intervient alors que les femmes font l’objet d’une répression croissante au Moyen-Orient en raison de leurs contenus publiés sur les réseaux sociaux.

Plus tôt cette année, cinq influenceuses égyptiennes ont été accusées d’« atteinte aux bonnes mœurs » suite à des vidéos postées sur TikTok.

Amr Magdi, chercheur spécialiste du Moyen-Orient pour Human Rights Watch, a dénoncé le contrôle des contenus partagés par les femmes, décrivant « une campagne très inquiétante et abusive d’arrestations et de persécution visant principalement des femmes et des jeunes filles en raison des vêtements qu’elles portent et de leur comportement ».

Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.

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