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L’Égypte ajoute des personnes décédées à sa liste grandissante de « terroristes »

D’anciens présidents, des footballeurs et au moins cinq personnes décédées figurent sur la liste officielle des « terroristes » qui soutiennent les Frères musulmans
Sissi (centre) s’apprête à prendre la parole lors de la 71e session de l’Assemblée générale des Nations unies au siège des Nations unies à New York (AFP)
Par MEE

Au moins cinq personnes décédées se trouvent parmi les 1 500 noms ajoutés à la liste de plus en plus longue de « terroristes » établie par le gouvernement égyptien. Elle inclut déjà d’anciens présidents et des joueurs de foot internationaux.

Cette démarche, rapportée mardi par Human Rights Watch (HRW) a été décrite par l’organisation comme une « utilisation à l’aveugle des lois antiterroristes vagues ».

La décision du 12 janvier du tribunal pénal du Caire a permis d’ajouter 1 538 personnes à la liste sur la base de demandes des procureurs, qui ont accusé toutes les personnes concernées d’avoir aidé les Frères musulmans, organisation interdite, selon HRW.

Les fils de l’ancien président Mohamed Morsi, l’icône du football égyptien Mohamed Abu Treika – et au moins cinq personnes décédées – ont été concernés par la décision, selon HRW.

La cour a accepté l’allégation du gouvernement selon laquelle les accusés avaient fourni une assistance financière aux Frères musulmans et les avaient aidés à mettre en place des entraînements militaires et à planifier des attaques sur les forces de sécurité.

HRW a déclaré dans un communiqué mardi que le fait que les tribunaux « utilisaient ces lois pour imposer des sanctions sur des personnes sans leur laisser une chance de se défendre violait leurs droits à des procès en bonne et due forme ».

Ces critiques émises par des groupes de défense des droits de l’homme interviennent un jour après que le président des États-Unis Donald Trump a déclaré à son homologue égyptien Abdel Fattah al-Sissi lors d’un appel téléphonique qu’il soutenait l’État arabe, essentiel dans sa « guerre contre la terreur ».

Les avocats de certaines personnes concernées ont déclaré à Human Rights Watch que les autorités n’avaient pas informé leurs clients d’audiences connexes et qu’ils avaient pris connaissance de cette décision par le biais des médias qui l’ont rapportée le 17 janvier.

Joe Stork, directeur adjoint du programme Moyen-Orient de Human Rights Watch, a déclaré : « Inscrire des centaines de personnes sur une liste de terroristes présumés, avec des conséquences sérieuses sur leur liberté et leurs moyens de subsistance, et sans même leur dire, est un pied de nez à la procédure équitable. »

Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi attend une réunion avec Hillary Clinton, la candidate démocrate, au Palace Hotel le 19 septembre 2016 à New York (AFP)

Selon les groupes de défense des droits de l’homme, le fait d’être désigné en tant que « terroriste » entraîne une interdiction de voyager, le gel des avoirs, la perte de droits politiques et l’annulation du passeport.

Les désignations de terroriste étaient basées sur la loi n°8 de 2015 visant à organiser les listes d’entités terroristes et de terroristes, délivrée par décret du président Abdel Fattah al-Sissi en février 2015 en l’absence de parlement.

La loi autorise le procureur général à demander à des cours pénales désignées du Caire de nommer des individus ou des groupes sur cette liste pour des périodes de trois ans renouvelables. La cour dispose de sept jours pour réfléchir à la demande avant de décider.

« Cette loi viole plusieurs protections légales établies dans la Constitution égyptienne, ainsi que d’anciennes décisions de la Cour suprême constitutionnelle égyptienne et la loi internationale des droits de l’homme », pouvait-on lire dans la déclaration.

« Le parlement égyptien devrait abroger la loi sur les entités terroristes ou la modifier en grande partie pour qu’elle soit adéquate aux standards internationaux. Les procureurs devraient demander que les listes terroristes faites jusqu’à présent soient abrogées. »

« Le terrorisme est un réel problème en Égypte, mais les autorités utilisent des outils dont la légalité est contestable pour faire face au problème », a déclaré Stork. « Une telle approche méprise les faits, catalogue à l’aveugle les opposants comme des terroristes, et ne fait aucun effort pour différencier les coupables des innocents. »

Donald Trump, alors candidat républicain aux élections présidentielles des États-Unis, regarde le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi en train de parler lors d’une réunion au Plaza Hotel de New York le 19 Septembre 2016 (AFP)

Sissi s’est entretenu avec Donald Trump au sujet du combat contre le terrorisme et l’extrémisme lors d’un appel téléphonique, et Trump a applaudi les efforts de l’Égypte sur ces fronts, a déclaré le bureau du président égyptien lundi.

Trump a déclaré à Sissi qu’il comprenait les difficultés auxquelles l’Égypte fait face dans sa « guerre contre la terreur » et a confirmé l’engagement de son administration à soutenir le pays, selon le porte-parole de Sissi, Alaa Youssef.

« Le président des États-Unis a également déclaré lors de cet appel qu’il se réjouissait à l’avance de la visite attendue du président à Washington, qui est en train d’être préparée par voie diplomatique », selon la déclaration du porte-parole.

Le porte-parole de la Maison Blanche Sean Spicer a déclaré lors d’une conférence de presse que Trump et Sissi « discutaient de moyens de renforcer la relation bilatérale et de soutenir le combat de l’Égypte contre les terroristes ».

« Le président Trump a souligné que les États-Unis restent fermement engagés dans les relations bilatérales, ce qui a aidé les deux pays à surmonter des épreuves dans la région pendant des décennies », a ajouté Spicer.

Le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi était le premier dirigeant du monde arabe à féliciter Donald Trump après sa victoire lors des élections. Il avait déclaré qu’il espérait que le président élu « injecterait une nouvelle vie » dans les relations entre l’Égypte et les États-Unis.

Traduit de l’anglais (original).

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