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Un navire nord-coréen saisi avec des armes… pour l’Égypte

Selon une enquête des Nations unies, des hommes d’affaires égyptiens ont commandé des centaines de roquettes nord-coréennes pour l’armée de leur pays tout en gardant leur accord secret
Photo publiée par l’agence de presse officielle de Corée du Nord montrant le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un (AFP)
Par MEE staff

En août dernier, le « Jie Shun », un énorme navire marchand battant pavillon cambodgien, est pourtant parti de Corée du Nord, avec un équipage nord-coréen et un cargo inconnu enveloppé de lourdes bâches, a rapporté dimanche le Washington Post.

Quand le navire est entré dans les eaux égyptiennes, des agents des douanes informés par les États-Unis ont saisi en nombre le navire et découvert une cache de plus de 30 000 lance-grenades propulsés, rapporte le quotidien.

Plus tard, un rapport des Nations unies a souligné qu’il s’agissait de « la plus grosse prise de munitions dans l’histoire des sanctions contre la République populaire démocratique de Corée ».

Selon le Washington Post, les acheteurs, finalement démasqués, étaient les Égyptiens. Une enquête des Nations unies a révélé un arrangement par lequel des dirigeants d’entreprise égyptiens ont commandé pour des millions de dollars des roquettes coréennes pour l’armée, tout en gardant l’accord secret.

Traduction : « Ce sont des fous. Les Égyptiens achètent des armes à la Corée du Nord »

L’incident, dont de nombreux détails n’ont jamais été rendus publics, a provoqué en privé de la part des Américains, des réclamations en série sur les efforts des Égyptiens pour obtenir du matériel militaire interdit de Pyongyang, relève le quotidien.  

Un porte-parole de l’ambassade égyptienne à Washington a souligné au journal la « transparence » de l’Égypte et la coopération avec les représentants des Nations unies pour découvrir et détruire cette contrebande. « L’Égypte continuera à se conformer à toutes les résolutions du Conseil de sécurité et sera toujours en règle avec ces mêmes résolutions qui restreignent les achats militaires à la Corée du Nord. »

Mais les officiels américains ont confirmé que la livraison des roquettes n’avait été déjouée qu’au moment où les services de renseignement américains ont repéré le navire et alerté les autorités égyptiennes via des canaux diplomatiques, principalement pour les obliger à prendre des mesures.

L’Égypte, selon un important bénéficiaire de l’aide américaine, maintient toujours des liens diplomatiques, depuis les années 1970, avec Pyongyang.

Des systèmes d’armement soviétiques

L’armée égyptienne aujourd’hui possède des dizaines de systèmes d’armement conçus à l’origine par les Soviétiques. Parmi eux, figurent au moins six types d’armes antichar, dont des RPG-7, lance-grenades des années 1960 utilisant la même ogive PG-7 que celles découvertes sur le Jie Shun, note le Washington Post.

« Par le passé, l’Égypte a été un client régulier de la Corée du Nord », rappelle au journal Andrea Berger, un spécialiste de la Corée du Nord et un chercheur associé au Middlebury Institute of International Studies à Monterey, en Californie. « Aujourd’hui, je les qualifierais de ‘’client’’ solide ».

Alors que les officiels américains ont refusé de critiquer publiquement l’Égypte, l’incident du Jie Shun participe à la turbulence diplomatique qui définit les relations entre Le Caire et les administrations Obama et Trump, estime le Washington Post.

Des officiels américains ont confirmé que les roquettes ont été une des raisons qui ont amené l’administration Trump à décider en juillet de geler ou de reporter une aide militaire de 290 millions de dollars (246 millions d’euros) à l’Égypte.

Après la visite du président égyptien Abdel Fatah al-Sissi à Washington, ce mois-ci, une déclaration de la Maison Blanche a clairement laissé entendre qu’un avertissement avait été envoyé en privé. « Le président Trump a mis l’accent sur la nécessité pour tous les pays d’appliquer complètement les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies au sujet de la Corée du Nord », ce qui inclut la nécessité « d’arrêter de fournir des prestations économiques ou militaires à la Corée du Nord. »

Selon le Washington Post, rien ne confirme que la Corée du Nord a reçu ses 23 millions de dollars (19,5 millions d’euros) pour la cargaison.

Traduit de l'anglais (original).

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