La présidence Trump assiégée par des milliers de manifestants dans tous les États-Unis
Le nouveau président élu, Donald Trump, s’est enfermé avec ses conseillers à l’intérieur de sa résidence de Manhattan samedi pour décider des premières mesures à prendre pendant que des milliers de manifestants contestataires assiégeaient la Trump Tower et défilaient dans d’autres villes américaines, comme c’est le cas depuis quatre jours.
Des rassemblements ont été programmés toute la journée à New York, Los Angeles, Chicago, Portland, San Francisco et Oakland, entre autres villes américaines. Les organisateurs ont annoncé qu’ils espéraient entretenir ainsi l’élan d’indignation suscité depuis quatre jours par la victoire inattendue du magnat de l’immobilier à l’élection présidentielle mardi.
Des milliers de manifestants ont défilé paisiblement sur la Cinquième Avenue de New York, le long de ses vitrines clinquantes, pour ensuite déferler dans les rues autour de la Trump Tower, le gratte-ciel où réside le président élu.
« Je vous promets que TOUS les Américains vont vivre de grands moments. Nous allons nous unir et gagner des batailles, connaître le goût du succès et remporter la victoire ! » a tweeté Trump, tandis que plus de 3 500 personnes manifestaient à l’extérieur, aux cris de « Trump N’est PAS mon président » et « New York vous déteste ».
Les activistes appréhendent ces quatre prochaines années où Trump occupera la Maison Blanche, d’autant plus que son parti contrôle les deux Chambres du Congrès ; certains se préparent donc à participer à ce qui s’annonce être, espèrent-ils, les manifestations les plus longues jamais vues dans le pays depuis le mouvement Occupy Wall Street.
Qu’apportera une administration Trump ? C’est un mystère total. Or, voilà que monte – parmi les activistes libertaires et tous ceux qui déclarent ne pas soutenir sa présidence – une résistance nationale comme jamais dans l’histoire moderne américaine, écrit le New York Times. Des milliers de personnes sont descendus dans la rue en signe de désapprobation préventive contre un homme dont l’administration, craignent-ils, sera marquée par un sectarisme des plus détestables. Les étudiants ont refusé de se rendre en cours, des manifestants ont bloqué des autoroutes et certains se sont affrontés avec la police.
« Nous sommes horrifiés d’appartenir à un pays qui vient d’élire un misogyne raciste et incroyablement incompétent pour remplir cette fonction, et dont le programme électoral se résume à la haine de l’autre », a déclaré Mary Florin-McBride, Newyorkaise de 62 ans, employée de banque retraitée, en brandissant une pancarte où elle avait écrit, « Le fascisme n’a rien à faire en Amérique ».
Traduction : « Plus une minute à perdre à New York. Des décisions seront bientôt prises pour déterminer qui sera en charge de la bonne marche de notre gouvernement ! »
La Trump Tower est l’épicentre de furieuses manifestations pendant que l’équipe du président élu étoffe la liste des membres du futur gouvernement et travaille à la sélection des personnes bientôt désignées pour occuper les centaines d’autres postes gouvernementaux les plus importants.
Parmi ceux qui se sont rendus à la Tour samedi, on a vu Nigel Farage, dont le Parti pour l’Indépendance de la Grande-Bretagne a soutenu le vote en faveur du Brexit qui a stupéfié les Britanniques, tout comme la victoire de Trump a sidéré nombre d’Américains. Farage a déclaré n’être là qu’à l’occasion d’un voyage touristique.
Le cinéaste documentariste spécialiste de la provocation, Michael Moore, a lui aussi tenté de pénétrer dans la Trump Tower, mais a vite été intercepté par les agents des services secrets.
Marion Marechal-Le Pen, l’une des étoiles montantes du Front national français et nièce de sa dirigeante, Marine Le Pen, a annoncé samedi qu’elle avait contacté l’équipe de Trump et suggéré de travailler en synergie avec elle.
Environ 10 000 manifestants se sont rassemblés à Los Angeles, sous les palmiers du parc MacArthur, exhibant des pancartes exigeant, entre autres, « Il faut rompre avec Trump » et « Minorités : Importance Majeure », avant de défiler en direction du centre-ville.
Certains des manifestants agitaient des drapeaux – américain, mexicain et arc-en-ciel. Alex Seedman, 25 ans, habitant de Los Angeles, tenait une pancarte, « Ne Mettez pas l'Amour Hors la Loi ! » ; il a traité Trump de fasciste.
« J’ai peur qu’il abroge le mariage pour tous », a confié Seedman. « Je suis gay et beaucoup de mes amis, des noirs et des latino-américains, craignent pour leur vie ».
Environ 100 000 personnes avaient annoncé sur Facebook leur intention de participer aux événements dans ces trois villes. Les organisateurs ont bien précisé que la violence et le vandalisme ne seraient pas tolérés.
Quelques heures avant le début des rassemblements de samedi, un manifestant a été blessé par balle à Portland alors qu’il participait à un défilé à Morrison Bridge. Son pronostic vital n’est pas engagé mais la police n’a toujours pas mis la main sur l’auteur présumé.
Depuis la victoire de Trump, les manifestants dans plusieurs villes ont dénoncé les promesses de campagne du républicain visant à restreindre l’immigration et ficher les musulmans, tout en rappelant les abus sexuels dont l’ancienne star de téléréalité est accusée d’avoir perpétrés sur plusieurs femmes.
Traduction : « Manifestation anti-Trump à Los Angeles aujourd’hui. »
Ces manifestations n’ont, pour l’instant, pas dégénéré en violence – sauf à Portland, où les manifestants ont démoli les vitrines de plusieurs magasins, taggué les murs de graffiti et endommagé des voitures lors d’affrontements avec la police – qui a dispersé les foules à coup de gaz lacrymogènes et balles de caoutchouc.
Des dizaines de manifestants ont été arrêtés et une poignée de policiers blessés.
Depuis le jour de l’élection, des démonstrations ont été improvisées, organisées à la va-vite par de jeunes Américains de différents milieux et aux objectifs très variés.
Au début, Trump s’est élevé contre ces manifestations, les accusant d’être « incitées » par les médias, mais il a adopté une autre stratégie vendredi, félicitant les manifestants de démontrer « un intérêt si passionné envers notre grand pays ».
« Nous allons nous unir et serons fiers de notre réussite ! » a twitté Trump.
En dépit d’un ton plus modéré, il reste encore au vainqueur des élections de rassurer les Américains qui redoutent de le voir présider à une vague de répression xénophobe, et qui le font de plus en plus savoir.
Le Southern Poverty Law Center (SPLC), qui surveille les groupes de propagande haineuse, a relevé, sur les trois jours postérieurs à l’élection, plus de 200 cas de harcèlement et d’intimidation liés à l’élection.
Une pétition du SPLC a recueilli plus de 47 000 signatures ; elle exhorte Trump à se distancer sans ambiguïté des « fauteurs de haine » qui fêtent sa victoire – qu’ils soient nationalistes blancs ou extrémistes antimusulmans et anti-homosexuels.
Traduction : « L’Angleterre, l’Irlande, l’Australie et l’Allemagne participent aussi aux manifestations anti-Trump. »
Beaucoup d’électeurs ont été consternés par la victoire de Trump, d’autant plus qu’aucun sondage n’avait prédit un tel résultat.
Environ 60,3 millions d’électeurs ont voté Trump, moins nombreux par conséquent que les 60,8 millions à avoir voté en faveur de la candidate démocrate, Hillary Clinton. Cependant, la forte représentation favorable à Trump dans les États indécis (ceux du Midwest, le Michigan notamment, dont les résultats sont décisifs), lui a obtenu la victoire au sein du Collège électoral, institution chargée de l’ultime sélection du président.
La base de soutien la plus large du président élu se trouve dans le Midwest, au cœur de la Rust Belt (« ceinture de la rouille » – régions désindustrialisées), dans des États où les électeurs votent traditionnellement démocrate mais qui ont choisi Trump parce qu’il a promis de mettre fin à la corruption à Washington DC et de faire revenir les emplois aux États-Unis en renégociant les accords de commerce international.
Traduit de l’anglais (original) par Dominique Macabies.
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