L’Iran interdit un magazine féminin traitant de la cohabitation des couples
Un magazine féminin iranien a été interdit après avoir publié à sa une un article sur la pratique de couples vivant ensemble sans être mariés.
Zanan-e Emrooz [Femmes d’aujourd’hui], un mensuel dédié aux femmes, avait publié un article sur le phénomène du « mariage blanc », le terme utilisé en Iran pour décrire la cohabitation de couples non mariés.
On pouvait lire sur la couverture du numéro, à la droite de la photo d’un homme et d’une femme marchant côte à côte dans la rue, la mention : « Le mariage blanc : affliction ou traitement ? »
Le Conseil iranien de la supervision des médias a annoncé lundi que Zanan-e Emrooz serait déféré devant les tribunaux du pays pour avoir « violé les valeurs nationales et islamiques » en ayant fait la promotion de cette pratique, a rapporté l’agence de presse iranienne Mehr.
Il n’existe pas de statistiques officielles concernant le nombre de couples qui décident de vivre ensemble en dehors du mariage en Iran. Cependant, les chefs politiques et religieux iraniens se sont directement impliqués dans la question au cours de ces dernières années.
Mahmoud Golzari, le vice-ministre chargé de la jeunesse et des sports, a admis par le passé que si le « mariage blanc » existait bel et bien en Iran, aucune statistique sur sa prévalence n’était disponible et il n’était pas suffisamment pratiqué pour constituer une source d’inquiétude.
Toutefois, des responsables politiques proches de l’ayatollah Ali Khamenei, le chef spirituel responsable de la plupart des politiques et des lois du pays, se sont montrés plus tranchants à ce sujet.
Mohammed Mohammedi Golpayegani, qui dirige le cabinet de Khamenei, a condamné la pratique lors d’un discours enflammé prononcé en novembre 2014.
« C’est une honte que des femmes et des hommes vivent ensemble en dehors du mariage », avait-il déclaré, insistant sur le fait que les religieux musulmans devraient traiter « sévèrement » ceux qui s’adonnent à cette pratique.
L’homosexualité est également illégale en Iran, et les personnes coupables à plusieurs reprises de violer cet interdit sont passibles d’emprisonnement et même de la peine capitale.
Une rédactrice en chef « déviante »
Zanan-e Emrooz avait déjà fait les gros titres par le passé. L’année dernière, sa fondatrice, Shahla Sherkat, avait été convoquée devant le tribunal de la presse iranien pour avoir publié dans son premier numéro des photos de femmes jugées offensives par les autorités.
La précédente publication de Sherkat, simplement intitulée Zanan [Femmes], avait été fermée en 2008 par le gouvernement de l’ancien Président Mahmoud Ahmadinejad, accusée de « dépeindre la situation des femmes de façon négative ».
Le mensuel avait été actif pendant seize ans – un an après sa fermeture, Shahla Sherkat l’avait décrit comme « sa fille de seize ans ».
Il s’agissait de « la publication féministe la plus durable et la plus populaire de l’Iran post-révolutionnaire », selon Nina Ansary, une historienne iranienne spécialiste des mouvements féministes.
En 2014, la décision d’autoriser Sherkat à lancer un nouveau magazine pour femmes, Zanan-e Emrooz, avait donné à certains l’espoir que le nouveau gouvernement du Président Hassan Rohani, inauguré l’année précédente, pourrait tenir sa promesses de respecter les droits des femmes et l’égalité des sexes.
Mais la publication a dès le départ dû faire face aux critiques des puristes.
Lors de son lancement, la télévision iranienne contrôlée par l’Etat avait demandé s’il était judicieux d’autoriser Shahla Sherkat à publier un nouveau magazine, du fait de ses « antécédents et de ses opinions déviantes ».
« Sept ans après la fermeture du magazine Zanan, dirigé par une femme aux opinions féministes et occidentales, la publication d’un magazine dirigé par la même femme mais avec un titre différent a été autorisée », indiquait le reportage télévisé.
Selon Nina Ansary, le premier numéro de Zanan-e Emrooz, dont la couverture représentait un groupe de femmes vétérinaires avec le sous-titre « Nous sommes heureuses de notre décision », était bien moins osé que ce que l’on pouvait trouver chez son prédécesseur, Zanan.
Les articles représentaient « un premier acte fort, mais prudent », d’après Ansary.
Le premier numéro a tout de même envoyé Shahla Sherkat devant les tribunaux. Le second présentait en couverture un article intitulé « L’émergence des nouveaux pères », illustré avec la photo d’un homme portant un bébé et tentant d’enlever un gant en caoutchouc rose avec ses dents.
Traduction de l'anglais (original).
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