Détérioration des relations entre Washington et Ankara suite au coup d’État manqué en Turquie
Le ministre turc du Travail Süleyman Soylu a accusé les États-Unis samedi d’être derrière la tentative de putsch qui a eu lieu dans son pays dans la nuit de vendredi à samedi.
« Les États-Unis sont derrière la tentative de coup d’État. Des revues qui sont publiées là-bas [aux États-Unis] mènent des activités depuis plusieurs mois. Depuis plusieurs mois, nous envoyons des requêtes aux États-Unis concernant Fethullah Gülen. Les États-Unis doivent l’extrader », a-t-il déclaré en référence au rival turc du président Erdoğan installé aux États-Unis.
Le religieux turc Fethullah Gülen est régulièrement accusé d’être derrière de prétendus complots contre le président tuc.
Selon la BBC, le secrétaire d’État américain John Kerry aurait dit à son homologue turc par téléphone : « les insinuations ou déclarations publiques sur un quelconque rôle des États-Unis dans la tentative manquée de coup d’État sont totalement fausses et nuisibles à nos relations bilatérales ».
Le président américain Barack Obama a appelé toutes les parties en Turquie à « agir dans le cadre de l’État de droit ».
Dans le bourbier sans cesse changeant de la politique turque et du Moyen-Orient en général, la Russie et la Turquie – quasiment prêtes à en découdre il y a seulement quelques mois –continuent de renforcer leurs relations.
Un officiel turc a confirmé à MEE que le président Erdoğan et son homologue russe Vladimir Poutine s’étaient entretenus par téléphone. Poutine a exprimé son soutien à Erdoğan et au gouvernement élu en Turquie, et les deux chefs d’État ont décidé de se rencontrer pendant la première semaine d’août.
Lutte acharnée pour Gülen
La lenteur de la réaction d’Obama – qui n’a publié un communiqué de soutien au gouvernement turc seulement une fois qu’il était devenu clair que le putsch était sur le point d’échouer – n’a pas aidé à endiguer la détérioration des relations entre Washington et Ankara.
Le désir de la Turquie de voir Gülen extradé des États-Unis est un autre sujet de litige entre les deux pays.
Samedi, Erdoğan a exhorté les États-Unis à extrader Gülen, qu’il a accusé d’avoir orchestré le coup d’État manqué, afin qu’il soit jugé en Turquie.
« Les États-Unis – vous devez extrader cette personne [Gülen] », a-t-il déclaré à des milliers de partisans rassemblés à Istanbul.
Gülen a nié toute implication dans la tentative de putsch.
Le religieux turc, qui se trouve en exil auto-imposé aux États-Unis depuis plus de dix ans, conserve des appuis en Turquie, lesquels auraient rassemblé environ 17 millions de dollars entre 2004 et 2015, selon Voice of America (VOA).
Ses partisans affirment être victimes d’une répression injuste et ont accusé Erdoğan d’adopter des mesures de plus en plus autoritaires.
Le gouvernement turc accuse le mouvement Gülen d’avoir infiltré la police, la justice et le système politique, et d’avoir créé un État à l’intérieur de l’État.
Erdoğan indique qu’il a prévenu à plusieurs reprises le président Obama que Gülen menaçait la sécurité de la Turquie et devait être extradé.
« Je dis que si nous sommes des partenaires stratégiques, alors vous devriez satisfaire à notre requête », a déclaré Erdoğan.
Le secrétaire d’État John Kerry a indiqué samedi que les États-Unis aideraient la Turquie à enquêter sur le coup d’État manqué et a invité le gouvernement turc à partager toute preuve dont il disposerait à l’encontre de Gülen.
« Nous nous attendons tout à fait à ce que des questions soient posées sur M. Gülen », a déclaré Kerry au Luxembourg.
Fethullah Gülen a dès le départ condamné le soulèvement militaire « dans les termes les plus forts ».
« Ayant personnellement souffert sous de multiples coups d’État au cours des cinq dernières décennies, il est particulièrement insultant d’être accusé d’avoir des liens avec une telle tentative », a-t-il affirmé à des journalistes lors d’une rare interview samedi.
Le prédicateur controversé a également suggéré qu’Erdoğan lui-même pourrait avoir organisé un faux coup d’État afin de renforcer ses pouvoirs.
« Je ne crois pas que le monde croie les accusations faites par le président Erdoğan », a affirmé Gülen. « Il est possible que ce soit un coup monté pour permettre davantage d’accusations [contre Gülen et ses partisans]. »
Traduit de l’anglais (original).
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