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Les enfants syriens subissent des niveaux « toxiques » de stress susceptibles de les marquer à vie

Beaucoup d’enfants en Syrie sont sujets à un « stress toxique » après une exposition quasi-quotidienne à la peur et à la violence, selon un nouveau rapport de Save the Children
Zainab (11 ans), originaire de Deir ez-Zor, dans la tente de sa famille au camp d’al-Hol, dans la province de Hassaké en Syrie (Save the Children).

Une génération d’enfants en Syrie risque d’avoir des problèmes de santé mentale à long-terme après avoir subi près de six années de guerre, selon les conclusions d’un nouveau rapport de Save the Children.

La majorité des enfants interrogés montrent des signes de détresse émotionnelle grave, indique le rapport, intitulé « Invisible Wounds: The impact of six years of war on the mental health of Syria’s children » (Blessures invisibles : l’impact de six ans de guerre sur la santé mentale des enfants syriens).

Le rapport précise que beaucoup d’enfants en Syrie souffrent d’un « stress toxique » dont les effets peuvent être irréversibles sans un soutien adéquat.

La moitié des enfants interrogés ont déclaré avoir ressenti régulièrement ou constamment du chagrin ou une extrême tristesse

Save the Children a parlé à 450 enfants, adolescents, parents et travailleurs sociaux dans sept gouvernorats en Syrie pour établir ce rapport.

Le stress toxique est défini, selon Alexandra Chen, spécialiste de la protection de l’enfance et de la santé mentale à l’université de Harvard, comme « la forme la plus dangereuse de réponse de stress qui peut se produire quand les enfants se retrouvent confrontés à une adversité forte, fréquente ou prolongée sans un soutien approprié des adultes ».

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Nuri* fut évacué d’Alep avec son oncle et sa mère (Save the Children)

La moitié des enfants interrogés ont déclaré avoir ressenti régulièrement ou constamment du chagrin ou une extrême tristesse, et 78 % éprouvent ces sentiments au moins une partie du temps, indique le rapport.

Les principales sources de peur étaient l’attentat à la bombe et le bombardement, ainsi qu’un sentiment général de manque de sécurité, selon le rapport. Les personnes interrogées estiment que deux enfants sur trois en Syrie ont perdu un être cher, ont subi des blessures ou ont vu leur maison bombardée.

Depuis que le soulèvement contre le gouvernement du président syrien Bachar al-Assad, qui a commencé en mars 2011, a dégénéré, près d’un demi-million de personnes ont été tuées et la moitié de la population a été contrainte de quitter leurs foyers, dont environ 5 millions ont quitté le pays.

Beaucoup d’enfants font des cauchemars et souffrent de troubles du sommeil, ont peur de ne pas se réveiller, toujours selon le rapport, et souffrent d’énurésie.

Firas* est assis avec son fils Saeed* (3 ans) devant son étal en bord de route devant une station-service abandonnée où il vit avec sa famille (Save the Children)

« Mon fils se réveille effrayé au milieu de la nuit, il se réveille en hurlant. C’est ainsi que les enfants ont été touchés », a déclaré Firas, le père de Saeed.

« Un enfant a été massacré devant lui, alors il a commencé à rêver que quelqu’un venait le tuer. Quand un enfant est témoin d’une décapitation, comment pourrait-il ne pas avoir peur ? »

Le rapport stipule qu’une exposition si fréquente à des événements traumatiques provoquera probablement une augmentation à long-terme des troubles de santé mentale comme la dépression, l’anxiété de séparation, l’anxiété généralisée et le syndrome de stress post-traumatique, lorsque la guerre sera finie.

Tamara, travailleuse humanitaire à Idleb, qui a été témoin d’un intense bombardement aérien russe récemment, malgré un cessez-le-feu national, a déclaré que « les enfants ont perdu leur enfance ».

« Nous voyons beaucoup d’enfants souffrant d’incontinence et d’anxiété suite à un choc, en particulier les sons des explosions et des bombes », a-t-elle ajouté.

« La psychologie des enfants a changé – à présent, les enfants anticipent constamment une attaque » – une travailleuse humanitaire

« Beaucoup d’enfants ont des difficultés à parler et bégayent et certains souffrent d’amnésie partielle… Nous voyons des enfants de six à quinze ans qui souffrent d’amnésie partielle… La psychologie des enfants a changé – à présent, les enfants anticipent constamment une attaque. »

Selon le rapport, les enfants qui sont exposés à une violence aussi extrême peuvent finalement devenir désensibilisés et devenir des adultes incapables de ressentir de l’empathie envers les autres.

L’empreinte des traumatismes

Le « stress toxique » a des effets physiques sur les enfants, indique le rapport, et des recherches récentes ont montré que le corps humain peut conserver l’empreinte des traumatismes.

« J’ai mal au cœur parce qu’il bat trop fort parce que j’ai peur », a déclaré Nour, qui a entre cinq et sept ans et vient d’Alep, dont le gouvernement a pris le contrôle fin 2016 après une violente et sanglante bataille pour la ville.

Mohammed, qui s’est exprimé dans une session de groupe de 15-17 ans dans la Ghouta orientale tenue par les rebelles a confié : « Je me sens déprimé, comme si j’étais dans un autre monde. Quand je me réveille, je me rends compte que je suis toujours là et que je ne peux plus bouger mon corps. »

Ibrahim* (7 ans), originaire de Deir ez-Zor, avec l’animateur de Save the Children dans un espace accueillant les enfants et offrant des activités dans le camp d’al-Hol (Save the Children)

Mais, malgré ces conclusions, le rapport estime que l’espoir est permis.

« Malgré tout ce qu’ils traversent, de nombreux enfants rêvent encore d’un avenir meilleur, de devenir des médecins et des enseignants qui peuvent contribuer à la construction d’une Syrie paisible et prospère », écrivent ses auteurs.

Avec un soutien psychosocial suffisant, notamment l’art-thérapie, les techniques de respiration et les cours de chant, ainsi qu’un accès à l’éducation, les enfants peuvent s’ouvrir et commencer à se sentir plus en sécurité vis-à-vis d’eux-mêmes et de leur avenir.

Il est impératif, a conclu Save the Children, que la communauté internationale et l’ONU reconnaissent « le grave préjudice qui est fait aux enfants syriens et exigent la fin de la violence ».

* Les noms dans le rapport ont été modifiés afin de protéger les enfants.

Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.

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