EN IMAGES : Une réfugiée palestino-syrienne ouvre le premier hôtel pour chiens et chats en Irak
Le parcours dans lequel Amal Amro s’est engagée pour secourir et soigner les animaux a commencé lorsqu’elle vivait dans le district rural de Jaramana, à Damas. Cette réfugiée palestino-syrienne voyait souvent des animaux être tués et torturés en plein jour, ce qui l’a poussée à agir contre ces actes de cruauté.
« Je voyais souvent de jeunes enfants frapper des petits chiens ou leur couper les oreilles. Je les grondais et j’essayais de les en empêcher, puis je tentais de soigner l’animal », raconte-t-elle à Middle East Eye.
Elle explique que c’est à l’âge de 25 ans, alors qu’elle voyait encore des chiens être maltraités et torturés dans les rues, qu’elle s’est décidée à agir.
Amal Amro a cependant dû quitter la Syrie en 2015 en raison de la dégradation des conditions de vie engendrée par la guerre dans le pays. Après avoir rallié la région du Kurdistan irakien, où elle s’est désormais installée, elle a décidé de continuer de secourir et de soigner les animaux.
« Je suis très triste quand je vois des animaux être maltraités », confie-t-elle. « Ce sont des âmes innocentes et inconscientes, ils sont faibles et incapables de se protéger du mal, en particulier les chiens et les chats. »
« Les chiens et les chats s’approchent toujours des humains et se sentent en sécurité près d’eux, alors quand je vois des gens leur faire du mal, je ne me sens pas bien », ajoute-t-elle. (Photos : Ismael Adnan)
Au départ, Amal Amro a étudié l’anglais à l’université de Damas et s’est essayée à la télévision, au cinéma et au théâtre, mais sa carrière a été coupée dans son élan par la guerre en Syrie.
Après avoir occupé des emplois de bureau et revu ses perspectives d’avenir avec l’apparition de la pandémie de coronavirus en 2020, elle a décidé de donner une autre orientation à sa vie.
Aujourd’hui, elle a ouvert le premier hôtel et salon pour chiens et chats à Erbil, capitale de la région du Kurdistan irakien. L’hôtel propose divers services aux animaux, dont beaucoup ont vécu des expériences traumatisantes.
L’hôtel permet également aux gens d’adopter certains animaux, en fonction de leur état de santé. Dans ce cas, un accord d’adoption est signé, les nouveaux propriétaires versent des frais d’adoption et l’établissement leur prodigue des conseils pour veiller à ce que l’animal reçoive des soins adéquats.
« À l’avenir, nous espérons nous développer, créer une organisation à but non lucratif et ouvrir un refuge afin de permettre davantage d’adoptions », explique Amal Amro.
Ouvert depuis janvier et financé par les fonds qu’Amal Amro récolte pour les services qu’elle propose, l’hôtel accueille plus de 25 chiens et chats.
« J’ai commencé ce projet toute seule et avec un tout petit budget, mais grâce à Dieu, j’ai réussi. Au bout d’un moment, mon mari a commencé à m’aider et nous avons commencé à faire un travail que personne ne fait ici, mais qui est plus que nécessaire », explique Amal Amro à MEE.
Bien qu’elle n’ait jamais reçu de formation vétérinaire officielle, elle affirme que son amour et sa passion pour les animaux l’ont poussée à prêter une attention particulière aux vétérinaires qui s’occupaient d’animaux secourus.
« J’étais toujours à la recherche de la moindre information et je m’assurais de son exactitude. Après avoir observé pendant une longue période, j’étais capable d’utiliser des aiguilles sur les animaux et de traiter des cas de gale ainsi que d’autres maladies courantes chez les chiens », raconte-t-elle.
De nombreux animaux bénéficient de services de soins, qu’il s’agisse de toilettage ou d’une prise en charge psychologique.
Selon Sulaiman Tamer, fondateur de l’Organisation du Kurdistan pour la protection des droits des animaux (KOARP), les animaux sont confrontés à des situations « désespérées » dans la région.
« Les conditions que connaissent des animaux sont mauvaises partout en Irak, pas seulement dans la région du Kurdistan, mais partout. Le gouvernement doit adopter une position sérieuse à ce sujet », affirme-t-il à MEE.
Sulaiman Tamer explique que les animaux de la région sont confrontés à des circonstances difficiles liées à plusieurs facteurs.
« Cela s’explique par un manque de sensibilisation de la société, la culture des gens vis-à-vis des droits des animaux, ainsi que par la surpêche, le manque de pluie, la sécheresse, les abattages d’arbres et les feux dans les pâturages », souligne-t-il.
« Toutes ces raisons engendrent un manque de cultures pour le pâturage, de nourriture et de zones sûres pour les animaux. »
L’une des principales préoccupations d’Amal Amro concerne par ailleurs le fait que de nombreux habitants dans la région ne sachent pas comment prendre soin des animaux.
« Dans cet hôtel, nous proposons deux services qui ne sont disponibles nulle part ailleurs », explique-t-elle.
« Nous avons un service de garde quotidienne, c’est-à-dire que le client peut amener son chien ou son chat pendant ses heures de travail, à la manière d’une crèche pour un enfant, et nous avons récemment ajouté un service qui permet aux gens d’obtenir des documents pour que leur animal de compagnie puisse voyager à l’étranger. »
Amal Amro attribue une grande partie de la réussite de son entreprise au travail d’équipe accompli avec son mari.
« Nous ne recevons aucun soutien financier de la part d’organisations […] Le soutien de mon mari m’a permis d’avoir encore plus de succès, et aujourd’hui, j’envisage de construire une piscine dans le jardin pour les chiens », affirme-t-elle.
Au cours d’une journée typique, Amal Amro et son mari passent la plupart de leur temps avec les chiens et les chats, jouent avec eux et s’assurent qu’ils sont bien soignés et en bonne santé physique. Les animaux sont gardés dans un hôtel à deux étages, qui était à l’origine une villa qu’Amal Amro a reconvertie lorsqu’elle a lancé le projet.
L’idée de veiller sur les animaux lui est venue après s’être occupée d’un chien en particulier, qu’elle a appelé Blacky.
« Blacky était un chien très féroce, il avait neuf mois et il allait être envoyé dans une ferme ou tué », explique-t-elle. « Je me suis portée volontaire pour l’adopter et le dresser. Aujourd’hui, il a 11 ans et il n’est plus féroce. »
Si Amal Amro consacre la majeure partie de son temps à son hôtel et aux animaux dont elle s’occupe, elle veille désormais à sensibiliser la population aux défis auxquels ils sont confrontés et aux bonnes manières à adopter pour s’occuper d’eux.
L’un de ses projets est une chaîne YouTube qu’elle a lancée dans le but de toucher un public plus large.
« Je voulais rassembler en un seul endroit toute mon expérience, mes connaissances ainsi que les conseils que je voulais donner aux gens, puis les publier. Je partage également mes expériences de sauvetage d’animaux », détaille-t-elle.
L’hôtel est une grande source de satisfaction pour Amal Amro et son mari, qui ont le sentiment que leur travail a un impact. Ils en tirent aussi un petit revenu.
Lorsqu’elle se promène dans son quartier, elle observe que l’attitude des gens à l’égard des animaux évolue.
En dépit de ses efforts, Amal Amro soutient qu’il reste encore beaucoup de travail en matière de droits des animaux dans la région.
Sulaiman Tamer est du même avis. Il souligne que si des efforts sont déjà déployés pour remédier à la situation, certaines promesses n’ont pas encore été tenues.
« Nous avons soumis plus d’une fois au Parlement de la région du Kurdistan irakien un projet portant sur la protection des droits des animaux, avec une soixantaine d’articles, mais jusqu’à présent, il n’y a eu aucune avancée sur cette question », déplore-t-il.
« Malheureusement, dans la région du Kurdistan et en Irak en général, il n’existe aucune loi régissant les droits des animaux, à l’exception de la loi sur l’abattage des chiens errants », a-t-il ajouté.
Amal Amro et son mari ne se laissent pas décourager et réfléchissent déjà à l’idée de développer encore le projet d’hôtel, afin d’offrir des possibilités d’emploi à la population locale et de dispenser des cours de dressage à d’autres personnes qui souhaiteraient s’engager dans une activité similaire.
Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.
Middle East Eye propose une couverture et une analyse indépendantes et incomparables du Moyen-Orient, de l’Afrique du Nord et d’autres régions du monde. Pour en savoir plus sur la reprise de ce contenu et les frais qui s’appliquent, veuillez remplir ce formulaire [en anglais]. Pour en savoir plus sur MEE, cliquez ici [en anglais].