EN IMAGES : La culture du sel, une tradition menacée au Liban
La période de début juin à septembre est la saison d’extraction du sel dans la ville d’Anfeh, dans le Nord du Liban. La culture du sel est une activité présente dans la région depuis des millénaires. Les techniques utilisées aujourd’hui par les exploitations de sel le long du littoral libanais sont transmises de génération en génération. Mais la privatisation de grandes étendues du littoral libanais menace l’avenir de cette tradition séculaire (Photos : Hasan Shaaban)
Anfeh est depuis longtemps la capitale libanaise du sel. L’industrie qui s’est développée autour de son extraction a entraîné une période de prospérité pour la ville, ce qui a permis son développement en tant que pôle touristique. Cette industrie a été particulièrement florissante dans les années 1990, période pendant laquelle le Liban produisait environ 45 000 tonnes de sel par an et n’avait pas besoin d’en importer.
La méthode d’extraction consiste à aspirer l’eau de mer dans un bassin peu profond construit artificiellement à l’aide de moulins à vent et à laisser l’eau s’évaporer. Il reste alors des cristaux de sel blancs qui sont ensuite rassemblés dans de grands sacs pour être vendus.
Middle East Eye visite une exploitation salicole appartenant à George Malik et à sa famille. Il raconte que son grand-père a commencé à travailler dans l’industrie du sel en 1920, puis a transmis son exploitation à son fils, le père de George. « Je continue aujourd’hui de préserver l’héritage de la profession », affirme Imad Malik, le fils de George. « J’ai passé mon enfance ici dans les marais salants, dans la mer et sur la plage. »
Un employé de l’exploitation de George Malik prend la pose. Alors que de nombreux habitants vivent de l’industrie du sel, le littoral de la ville est menacé par les promoteurs immobiliers. En vertu de la législation libanaise, la région côtière est un bien public. Mais en raison d’amendements et de lacunes, de vastes étendues de terre pourraient être mises à la disposition des promoteurs immobiliers pour la construction de quartiers de divertissement, d’hôtels et de propriétés résidentielles. L’avenir de l’industrie du sel est donc incertain.
Un kilogramme de sel produit à Anfeh peut se vendre entre 2 et 4 dollars, mais les producteurs sont confrontés à la concurrence des importations étrangères. Pendant la guerre civile libanaise de 1975 à 1990, de nombreux producteurs de sel ont fui la région ou le pays, ce qui a entraîné une baisse de la production et poussé le gouvernement à augmenter les droits à l’importation pour compenser les écarts.
Certains producteurs de sel estiment que le gouvernement libanais tente délibérément de les chasser de l’industrie en refusant de leur accorder des autorisations pour réparer leurs équipements. Ils affirment qu’en leur rendant la vie plus difficile et plus chère, les autorités tentent de les forcer à quitter l’industrie et à laisser la place aux promoteurs.
La population qualifie le sel produit à Anfeh d’« or blanc ». Sa réputation remonte à l’Antiquité : une tablette cunéiforme datant d’environ 1400 avant notre ère vante ainsi la qualité du produit local.
Sur cette photo, George Malik et son épouse Jinan mettent du sel dans des sacs pour le stocker. Les projets de développement à Anfeh sont critiqués par des figures politiques de premier plan, notamment Walid Joumblatt, qui a dénoncé une menace « prétentieuse » pour l’environnement local. Accusant les personnes à l’origine de ces projets de n’accorder aucune valeur au patrimoine et aux traditions de la région, le vétéran politique a fustigé les ministres pour avoir autorisé leur poursuite.
Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.
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