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Quatre nouvelles révélations sur le financement de la campagne de Sarkozy par Kadhafi

L’émission « Cash Investigation », diffusée mardi soir sur France 2, a révélé de nouvelles informations sur le financement par le guide libyen de la campagne pour la présidentielle de 2007

L'ancien dirigeant libyen Mouammar Kadhafi arrive à l’Élysée à Paris pour une rencontre avec le président français Nicolas Sarkozy en 2007 (AFP)
Par MEE

Bachir Saleh, la « boîte noire » de Kadhafi confirme les versements

Selon le site Médiapart - qui a révélé le scandale du financement de la campagne électorale de Nicolas Sarkozy par le colonel Mouammar Kadhafi - le témoignage de l’ancien directeur de cabinet du guide libyen, devant les caméras de l’émission « Cash Investigation », représente « une pièce centrale de la défense de Nicolas Sarkozy qui vient de basculer dans son dossier d’accusation ».

Médiapart explique que « l’ancien directeur de cabinet de Mouammar Kadhafi, Bachir Saleh, l’homme qui a démenti avec constance les financements libyens depuis 2012, les a confirmés ». Pour rappel, l’ancien président français Nicolas Sarkozy a été mis en examen, le 21 mars dernier pour « corruption passive », « financement illégal de campagne électorale » et « recel de fonds publics libyens » à l'issue d'une garde à vue. 

Dans un premier temps durant l’entretien, Bachir Saleh affirme n'avoir « aucune information » sur d'éventuels versements d'argent. Mais quelques minutes plus tard, alors qu'il ne se sait pas filmé, il évoque des versements d'argent. « Vous venez de me dire que ça a eu lieu ? », lui demande le journaliste.

« Oui, c’est vrai. Moi je crois qu'ils donnent de l'argent, mais ce n'est pas mon canal. Le canal qui donne de l'argent, c'est le ministère des Finances. Kadhafi a un budget spécial pour les personnes qu'il souhaite soutenir », répond l’ex-bras droit du leader libyen tout en précisant la somme : 350 millions d'euros.

« Kadhafi a donné son feu vert pour 27 millions d’euros », selon Taher Dahech

Les enquêteurs de « Cash Investigation » diffusent un autre scoop : ils mettent la main sur Taher Dahech, dignitaire du pouvoir kadhafiste, ex-responsable des « comités révolutionnaires internationaux » libyens, et auteur d’un ouvrage important de témoignages, Sarkozy-Kadhafi, histoire secrète d’une trahison. Aujourd’hui exilé en Tunisie, il confirme, pour la première fois devant les caméras, que le guide « avait donné son feu vert pour le versement de 57 millions d’euros » à des « intermédiaires français ».

« Au départ, il y a eu une demande d'argent pour la campagne. Le principe était acquis. C'était une sorte de cadeau. Et quand on s'est rapprochés des élections, des intermédiaires français sont venus à Tripoli pour préparer l'acheminement et le versement de l'argent avant le scrutin », témoigne-t-il, assurant avoir participé à cette remise d’argent.

Il précise que dans un premier temps, « les intermédiaires français seraient repartis de Libye avec une partie seulement de cette somme, dix millions d'euros, en coupures de 500 euros ».

Moftah Missouri : « Kadhafi dit à Sarkozy : ‘’Nous allons vous aider’’ »

Autre confirmation de l’aide financière libyenne à la campagne présidentielle de Sarkozy par l’interprète officiel durant quinze ans de Kadhafi, Moftah Missouri. Ce dernier raconte à la journaliste Elise Lucet les détails de la première rencontre entre Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur et le colonel libyen, à Tripoli le 6 octobre 2005.

« Sarkozy dit au guide de la révolution : ‘’Je vais me présenter à l'élection présidentielle’’. Le colonel Kadhafi lui dit : ‘’Nous allons vous aider’’ ». Comment ? Moftah Missouri explique alors à la journaliste de « Cash Investigation » que « la Libye n'est pas un pays développé. Elle ne peut aider que par le truchement du pétrole, du gaz ou de l'argent en espèces (…) Au bureau du guide, il y a quelque chose qu'on appelle ‘’l'aide politique’’. Et ‘’l'aide politique’’, c'est de l'argent. On a aidé Sarkozy et c'est la pure vérité. »

Les sarko-boys et l’attrait du cash 

Soupçonné dans l’affaire du financement libyen, l’ancien directeur de cabinet de l’ex-président Sarkozy (et ex-ministre de l’Intérieur), Claude Guéant, déjà condamné en 2015 pour « détournement de fonds », n’a retiré de son compte bancaire que 800 euros en… neuf ans, de 2003 à 2012.

L’ex-haut cadre vivait-il avec seulement 24 centimes par jour comme ironisent les journalistes de « Cash Investigation » ? Ces derniers révèlent pourtant que l’ami de Sarkozy a effectué de nombreux achats en espèces : en juin 2007, il paye 944 euros en liquide pour de l'argenterie. En 2000, 7 900 euros sont déboursés pour de la literie. Et trois mois plus tard, il fait refaire sa cuisine avec vingt billets de 500 euros, soit 10 000 euros au total. Le tout en cash.

L’histoire de cette masse d’argent liquide se poursuit avec la saisie, gare du Nord à Paris en 2013, de 350 000 euros et 40 000 dollars dans les bagages d’un ancien ambassadeur, proche de Sarkozy, Boris Boillon. Ces sommes en coupures neuves et numérotées, selon un expert cité par « Cash Investigation », « ne peuvent venir que d'une grande banque commerciale, ou plus probablement d'une banque centrale ».

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