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Alors que les violences s’étendent, de jeunes Palestiniens sont prêts à en découdre

Tandis que la jeunesse évoque un fossé qui se creuse avec les dirigeants palestiniens, d’autres Palestiniens affirment que la lutte armée n’intéresse pas la plupart d’entre eux
Un jeune Palestinien jette des pierres lors d’affrontements avec la police israélienne dans le quartier palestinien de Shuafat à Jérusalem-Est (MEE/Faiz Abu Rmeleh)

BETHLÉEM, Cisjordanie occupée – Mardi, pendant que les prières de l’imam retentissaient dans les haut-parleurs de la mosquée à l’enterrement d’Abdel Rahman Obeidallah (l’adolescent palestinien du camp de réfugiés d’Aïda, à Bethléem, abattu par les forces israéliennes la veille), une foule d’habitants du coin et d’autres villes palestiniennes, en majorité de jeunes hommes, arboraient un visage grave, mais désiraient ardemment procéder à la manifestation contre Israël après les obsèques.

Ces onze derniers jours, l’escalade de la violence a entraîné la mort de quatre Israéliens et quatre Palestiniens. Quand on a demandé à un groupe de jeunes manifestants si une « troisième intifada » (soulèvement) débutait, Yousef, un habitant de Bethléem âgé de 14 ans (qui a demandé à taire son nom de famille vue la situation), a déclaré que celle-ci « avait déjà commencé, il y a quelque temps ».

Ses amis sont intervenus pour indiquer qu’un appel à l’action grandissant s’est cristallisé en juillet dernier, lorsque des personnes soupçonnées d’être des colons israéliens ont lancé des bombes incendiaires sur deux maisons dans le village cisjordanien de Douma, brûlant vif Ali Dawabsheh, un bébé de 18 mois. Une semaine plus tard, le père du garçon, Saad, qui était gravement brûlé, est mort. Début août, sa mère, Reham, qui avait été maintenue en vie pendant plusieurs semaines, est également décédée.

Un jeune homme, brandissant un drapeau et couvrant son visage avec un keffieh à damier noir et blanc, a expliqué : « Nous ne sommes que des enfants, mais [cette Intifada] c’est ce que nous connaissons et la façon dont nous avons été élevés... C’est quelque chose que nous devons faire compte tenu de la récente augmentation du nombre d’enfants martyrs. »

Le groupe d’adolescents a reconnu que s’ils respectent les dirigeants palestiniens et espèrent qu’ils vont enfin réussir à unifier les différentes parties, en général, ils se souciaient davantage des « menaces immédiates de l’occupation » que des discours politiques.

Des jeunes prêts à se battre

Les affrontements à travers la Cisjordanie et Jérusalem-Est mardi ont éclaté après que l’armée israélienne a rasé des maisons appartenant aux familles de deux Palestiniens : l’un accusé d’avoir tué cinq Israéliens dans une synagogue de Jérusalem l’an dernier, l’autre d’avoir écrasé un Israélien avec un bulldozer en août. Les deux Palestiniens ont été tués par balle lors des attaques.

Associated Press a rapporté que les troupes israéliennes avaient également interdit l’accès à une pièce de la maison d’un autre Palestinien qui avait tenté de tuer un célèbre militant juif orthodoxe, Yehuda Glick, l’année dernière.

Les autorités israéliennes ont recours depuis des années à cette pratique, consistant à condamner un espace en vue d’une possible démolition ultérieure, pour tenter de dissuader les Palestiniens de commettre des attaques.

Ces démolitions sont le dernier exemple en date de ce que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a annoncé mardi matin comme une réponse de plus en plus agressive à « tout émeutier, instigateur ou terroriste où qu’il soit », ajoutant qu’il allait assouplir les contraintes pesant sur les forces de sécurité israéliennes.

Les manifestations qui ont suivi les démolitions à Ramallah, Hébron, Bethléem et Jérusalem-Est ont fait 90 blessés, selon le Croissant-Rouge palestinien.

Et tandis que, sur les réseaux sociaux, des centaines de jeunes ont continué à appeler les autres jeunes à brûler des pneus et à jeter des pierres sur les soldats israéliens en Cisjordanie et dans les rues israéliennes, le président palestinien Mahmoud Abbas a demandé mardi aux Palestiniens de faire en sorte d’éviter une escalade militaire ou sécuritaire.

« Nous avons fait savoir à nos agences [de sécurité], nos factions et nos jeunes que nous ne voulons pas d’escalade », a déclaré Abbas lors d’une réunion avec le comité exécutif de l’OLP, mardi, dans un premier communiqué sur la situation depuis le début des tensions.

« Malheureusement, il existe ce fossé entre les politiciens et les jeunes », a confié Ghassan Khattib, un ancien ministre du cabinet de l’Autorité palestinienne, à Middle East Eye. Ce dernier a expliqué qu’Abbas et l’élite politique palestinienne n’ont pas réussi à faire face aux appels à l’affrontement avec Israël.

Cependant, contrairement aux autres analystes palestiniens, Khattib estime que les groupes de jeunes hommes qui se disent prêts à se battre sont une minorité, une affirmation qui selon lui est étayée par des précédents sondages dans lesquels les Palestiniens déclaraient que les anciennes intifada étaient largement perçues comme négatives.

« La lutte armée n’intéresse pas la plupart des gens, de sorte que certains sont réticents face à cette vague de protestations car ils craignent que cette minorité et certains des groupes armés organisés puissent profiter de cet état d’esprit et mener une lutte armée. »

En revanche, une étude publiée le mois dernier par le Centre palestinien de recherche et d'études politiques (PCPSR) a révélé que 42 % des Palestiniens pensent que seule une lutte armée conduirait à la création d’un État palestinien et que les deux tiers veulent la démission d’Abbas. En outre, une majorité de 57 % a dit qu’ils soutiendraient une nouvelle intifada en l’absence de négociations de paix.

Les restrictions concernant al-Aqsa suscitent des peurs

Attentif à ne pas critiquer Abbas ou les dirigeants palestiniens, Isa, un habitant de Bethléem âgé de 24 ans, a déclaré que lui et les gens de son âge sont prêts pour la prochaine intifada et qu’ils doivent « libérer la Palestine » face à l’augmentation des « dangers » israéliens.

« Le premier danger menace al-Aqsa, ils veulent la prendre », a déclaré Isa. « Nous la défendrons, nous répondrons aux juifs, et il est possible, en fait chacun d’entre nous l’espère, que nous tomberons en martyrs lors de cette manifestation ou de toute autre. »

Ses déclarations reflètent une tendance croissante parmi les Palestiniens, selon un autre sondage du PCPSR. Plus tôt cette année, l’enquête a révélé que pour 86 % de la population palestinienne, l’esplanade des mosquées à Jérusalem – que les juifs appellent mont du Temple – était « en grand danger ». 77 % ont dit croire qu’Israël tenait à la détruire.

Le gouvernement israélien a officiellement annoncé qu’il n’a pas l’intention de changer le statu quo concernant le site considéré saint à la fois par les juifs et par les musulmans dans la vieille ville de Jérusalem.

Toutefois, le site est depuis longtemps un point d’origine de violences entre Israéliens et Palestiniens, en particulier ceux de moins de 40 ans dont l’accès est régulièrement restreint. Ces dernières semaines, plusieurs politiciens de droite et des groupes israéliens pro-colons ont appelé le gouvernement israélien à interdire l’accès au site aux musulmans et à autoriser un accès accru aux juifs.

« Pour la nouvelle génération, la paix est impensable », a déclaré Isa, qui a dit se souvenir avec émotion de la seconde Intifada. « Autrefois, la paix avec Israël était possible mais, vu le nombre d’enfants qui sont aujourd’hui devenus martyrs, nous comprenons que c’est impossible. »

« Nous voulons la Palestine au point de mourir pour elle, comme l’ont fait ceux de la seconde Intifada », a déclaré Diaa, 20 ans, propriétaire d’un magasin de fruits et légumes à Hébron. « Bien que le djihad organisé puisse susciter des craintes, nous, les jeunes, sommes seuls ici, parce que nous comprenons que la Palestine est la base des guerres du monde entier, et nous nous battrons donc pour elle. »
 

Traduction de l’anglais (original).

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