EN IMAGES : Les pièces de monnaie utilisées par les musulmans en Arabie au VIIe siècle
Elles ont survécu plus d’un millénaire depuis leur création. Cinq pièces du Ier siècle de l’islam montrent comment la nouvelle civilisation a adapté les monnaies des empires existants, puis a frappé ses propres pièces islamiques uniques. Aujourd’hui, elles ont plus de valeur que jamais : lors d’une vente de pièces importantes réalisée le 22 octobre 2020 par la maison de vente aux enchères londonienne Morton & Eden, le total a dépassé le million et demi d’euros. (Crédit photo : Morton & Eden)
Avant d’utiliser les pièces de monnaie, l’économie arabe était basée sur le troc ; les habitants s’échangeaient de la nourriture, du bétail, mais aussi des épices et des parfums rares tels que l’encens et la myrrhe obtenus au cours de leurs voyages. Après la mort du prophète de l’islam, Mohammed, en 632 après J.-C., l’empire islamique a continué à s’étendre sous le califat omeyyade. Dans l’Arabie du VIIe siècle, les pièces de monnaie des empires byzantin et sassanide vaincus – qui englobaient la Syrie, la Jordanie, le Liban et l’Égypte d’aujourd’hui – ont été les premières utilisées par les musulmans. L’un des premiers exemples de pièce d’or est un solidus (monnaie romaine) à la « croix modifiée » datant des années 600 – très peu de pièces de ce type ont survécu. (Crédit : Morton et Eden)
« Lorsqu’il s’agissait de frapper de nouvelles pièces d’or, les prototypes byzantins existants étaient utilisés, mais tout symbolisme chrétien manifeste, tel qu’une croix, était simplement supprimé », explique Stephen Lloyd, spécialiste des pièces de monnaie chez Morton & Eden. « Lors des premières années des grandes conquêtes musulmanes, il n’y avait pas de tradition monétaire, donc les dirigeants ont simplement adapté ou se sont inspirés de la monnaie alors utilisée à leurs propres fins. » À l’image de cette pièce d’argent arabo-sassanide surnommée le « Calife debout » : une face représente un homme debout tenant une épée, que l’on pense être le calife omeyyade Abd al-Malik. La pièce de monnaie populaire a ensuite été frappée en or et en cuivre en Syrie, où la ville de Damas faisait office de capitale du califat. (Crédit : Morton et Eden)
L’autre face du « Calife debout » représente le buste couronné du roi sassanide Khosrow II (591-628 après J.-C.). La pièce est similaire aux drachmes d’argent qui étaient en circulation à l’époque. À ce stade de l’histoire, les conquêtes musulmanes s’étaient étendues à la fois à l’est et à l’ouest, unissant les anciens empires byzantin et sassanide, ainsi que leur monnaie, sous une même autorité impériale. (Crédit : Morton et Eden)
La drachme Mihrab et Anaza tire son nom de sa conception unique. Y figure l’une des premières représentations d’un mihrab (arc), une structure incurvée que l’on retrouve souvent dans l’architecture islamique. Au centre se trouve l’anaza (lance), en l’honneur de celle qui aurait été portée par le prophète Mohammed. Les chercheurs ont également suggéré que la pièce avait pu être utilisée comme monnaie militaire, puisqu’une armure y est représentée. (Crédit photo : Morton & Eden)
« Après trois décennies de formes variées de pièces hybrides, en l’an 77 de l’Hégire [696 après J.-C.], le premier dinar en or omeyyade a été frappé, annonçant la naissance d’une nouvelle monnaie purement islamique », développe Lloyd. Ces pièces ont marqué un changement au niveau de la conception, car n’y figurait aucune image contrairement aux pièces précédentes – juste des citations claires et simples du Coran. À l’inverse de la doctrine chrétienne de la Trinité, ces pièces sont gravées de mots qui soulignent l’unicité de Dieu, comme « Il n’y a d’autre Dieu que Dieu », en lettres arabes.
« L’introduction par Abd al-Malik ibn Marwan d’une monnaie islamique en or unique, unifiée et distincte a été considérée à juste titre comme un jalon dans l’histoire des débuts de l’islam. Le dinar en or est beau dans sa remarquable simplicité et il est clairement et sans compromis islamique », commente Lloyd. (Crédit photo : Morton & Eden)
Les nouveaux dinars portant une inscription coranique sont devenus la monnaie commune sous le règne des Omeyyades. Ce style de pièce de monnaie n’a été modifié qu’après la chute du califat en 749 après J.-C., bien que de nombreuses inscriptions introduites par le calife Abd al-Malik aient également été repérées sur les pièces de monnaie ultérieures émises sous le califat abbasside près de six siècles plus tard. Des pièces de monnaie du début de la période islamique peuvent encore être trouvées à travers le monde, y compris celles photographiées ci-dessus, qui appartenaient à des collectionneurs privés étrangers et ont été restituées au Conseil suprême des antiquités d’Égypte en 2010. (Crédit : AFP)
Les pièces des premières périodes islamiques qui survivent de nos jours sont très recherchées par les collectionneurs arabes comme internationaux. L’une d’elles a récemment été achetée par un collectionneur privé européen au prix de 3,7 millions de livres sterling (plus de 4 millions d’euros) lors d’une vente aux enchères en octobre 2019. « Ce remarquable dinar, qui a battu tous les records, représentait la première pièce d’or islamique à nommer un lieu en Arabie saoudite, et en fait le dinar le plus ancien de la région du Golfe dans son ensemble », indique Lloyd. « Il y a de fortes raisons de croire que l’or utilisé dans sa fabrication provenait d’une mine située entre les villes saintes de La Mecque et Médine : une mine appartenant non seulement à plusieurs califes mais qui avait été donnée à un autre précédent propriétaire par le prophète Mohammed en personne. »
Des collections de pièces de monnaie islamiques sont exposées au Louvre et à l’Institut du monde arabe à Paris, au British Museum de Londres, à l’Ashmolean Museum d’Oxford et au Coin Museum de Dubaï, entre autres. (Crédit : Morton et Eden)
Traduit de l’anglais (original publié en avril 2020) et mis à jour.
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