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Dix sites à visiter en Jordanie depuis le confort de votre maison

Le coronavirus restreint les perspectives de voyage, mais de nombreux sites touristiques du royaume ne sont qu’à un clic
Des touristes prennent un selfie devant le Trésor de Pétra, cité antique située au sud d’Amman, avant que la pandémie de coronavirus ne mette un coup d’arrêt au tourisme (Reuters)

En ce moment, vous pourriez être en train de parcourir un défilé sableux entre d’immenses murs de roche rouge. Levez la tête et vous verrez un imposant monument creusé dans le grès, soutenu par six grands piliers aux motifs complexes. Il s’agit bien entendu du Trésor de la cité antique de Pétra – et vous n’avez pas besoin d’être sur place pour en faire l’expérience.

En quelques clics de souris, vous pouvez également observer le coucher du soleil sur la mer Morte, le point le plus bas sur terre, et errer dans les marchés variés et animés du centre d’Amman.

Des Jordaniens couverts de boue profitent d’une journée dans le complexe de Shuneh sur la mer Morte (AFP)
Des Jordaniens couverts de boue profitent d’une journée dans le complexe de Shuneh sur la mer Morte (AFP)

La richesse culturelle, historique et paysagère de la Jordanie a longtemps représenté un attrait. Plusieurs civilisations se sont succédé au cours des siècles et on ressent aujourd’hui encore leurs influences distinctes. La Jordanie joua un rôle important dans le puissant califat omeyyade au début du VIIe siècle et fut historiquement le foyer des Nabatéens, des Égyptiens, des Ottomans, des Romains et des Grecs.

Représentant près d’un cinquième du PIB de la Jordanie en 2018, le secteur du tourisme est un moteur de l’économie du pays. La pandémie mondiale de coronavirus a toutefois interrompu le tourisme international quelques mois avant le pic de la saison touristique. Bien que les aéroports jordaniens aient commencé à rouvrir après six mois de fermeture, les restrictions et les conditions de quarantaine pour tous les arrivants restent strictes ; d’ailleurs, un couvre-feu nocturne est encore en vigueur à travers le pays.

Depuis l’allègement du confinement début juin, le secteur touristique a été contraint de trouver des solutions pour s’adapter, en proposant des visites virtuelles

Le confinement en Jordanie a été décrit comme l’un des plus strictes au monde. La circulation entre les gouvernorats a été initialement extrêmement restreinte, une loi adoptée en mars prévoyait des peines de prison allant jusqu’à un an pour le non-respect des ordonnances imposant les restrictions.

Si le royaume se vantait de sa réponse rapide et de l’endiguement efficace du virus, il était également devenu une destination quasiment inaccessible.

Depuis l’allègement du confinement début juin, le secteur touristique a été contraint de trouver des solutions pour s’adapter, certains sites touristiques comme la cité antique de Pétra ont rouvert avec prudence pour une poignée de visiteurs. Et tandis que de nombreux sites du pays promeuvent des outils virtuels déjà existants, d’autres profitent de cette interruption de l’activité pour développer leur usage de la technologie.

The Jordan Museum propose ainsi depuis la mi-mai une visite virtuelle, développée avec l’office de tourisme de Jordanie pendant le confinement, en réaction directe à la pandémie. La visite virtuelle de Pétra, commentée par la reine Rania de Jordanie, est disponible depuis 2015 et a été développée par Google Street View en même temps que 30 autres sites historiques de Jordanie. Plusieurs sites sont disponibles en visite immersive avec vue à 360 degrés sur VRJordan et sur le site internet de l’office de tourisme de Jordanie.

Un marché traditionnel du centre d’Amman avant l’un des confinements les plus stricts au monde (AFP)
Un marché traditionnel du centre d’Amman avant l’un des confinements les plus stricts au monde (AFP)

Through Local Eyes, une petite agence de voyage alternative basée en Jordanie, qui se distingue des autres en se focalisant sur les discussions culturelles et les rencontres avec des membres de la société qui ne sont pas traditionnellement impliqués dans le tourisme, œuvre à rendre ces visites accessibles via la plateforme de visioconférence Zoom depuis le début de la pandémie. Son fondateur, Anas Amarneh, emmène ses hôtes pour des visites live simplement à l’aide de son téléphone et d’un ou deux assistants pour plus de lumière et un soutien logistique.

Cela peut en fait apporter quelque chose de plus que le tourisme traditionnel, dans la mesure où les visiteurs virtuels peuvent désormais accéder à des sites généralement interdits aux étrangers ou aux groupes importants.

« La technologie rend les choses bien plus accessibles », explique Amarneh. « Si je n’ai que mon téléphone portable, je peux me déplacer facilement. »

Alors que voyager sans bouger de chez soi est devenu un phénomène en plein essor, Middle East Eye a visité virtuellement dix sites spectaculaires, ou moins connus, du royaume hachémite.

1. La cité antique de Pétra

Ville du désert de plus de 2 000 ans, Pétra est un site inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO célèbre pour ses immenses bâtiments taillés dans le grès rouge. Figurant parmi les sept merveilles du monde, le site fait 264 kilomètres carrés, soit plus du double de la superficie de Paris. La cité fut construite autour du premier siècle avant Jésus-Christ, devint la capitale du royaume nabatéen et une plaque tournante des échanges avant d’être absorbée dans l’Empire romain en 106 après Jésus-Christ.

La visite virtuelle de Pétra, commentée par la reine Rania de Jordanie, est disponible depuis 2015 (Melissa Pawson)
La visite virtuelle de Pétra, commentée par la reine Rania de Jordanie, est disponible depuis 2015 (Melissa Pawson)

La visite virtuelle par l’office de tourisme de Jordanie et conçue par Google Maps vous emmène en balade à travers la ville ; une carte montre chaque lieu clé où les visiteurs peuvent s’arrêter et explorer les tombes, les failles, les rues antiques, le théâtre, le monastère et le Trésor (« Khazneh »).

Vous pouvez utiliser la souris pour naviguer entre les différents sites et faire pivoter la vue, ou cliquer sur des centres d’intérêt pour en savoir plus sur son histoire. Les commentaires de la reine Rania de Jordanie commencent dès que vous lancez la visite ou cliquez sur un nouveau lieu.

Si le Trésor est l’endroit le plus emblématique de Pétra, les visiteurs (virtuels ou réels) ne peuvent pénétrer à l’intérieur. À la place, vous pouvez poursuivre jusqu’au tombeau à l’Urne pour avoir un gros plan du grès rouge marbré qui accueillait autrefois les chambres funéraires avant de servir plus tard d’église byzantine.

Malgré les images en haute résolution d’une grande partie de la cité antique, il faut reconnaître que cette visite virtuelle est bien fade comparée à une déambulation sur ses sentiers. En outre, manipuler les différentes vues avec une souris peut s’avérer peu commode, encore plus avec le pavé tactile d’un ordinateur portable. Bien sûr, il est impossible de reculer et d’admirer la vue de loin, de respirer l’air du désert ou d’entendre l’écho de votre voix dans les corridors de roche.

Cela dit, même sur un écran à plusieurs milliers de kilomètres de là, il est difficile de ne pas être subjugué par la majesté, l’ancienneté et la beauté de cette cité antique.

2. Wadi Rum

L’une des destinations touristiques les plus populaires de Jordanie, le désert de Wadi Rum est célèbre pour son sable rouge et ses paysages mystiques. Ce site du patrimoine mondial de l’UNESCO se caractérise également par ses énormes jbal (« montagnes » en arabe) de granit et de grès, dont beaucoup sont sillonnées de canyons et de grottes. Sans surprise, Wadi Rum apparaît dans plusieurs films, notamment l’épopée de 1962 Lawrence d’Arabie et le blockbuster de 2015 Seul sur Mars.

Wadi Rum est l’un des lieux touristiques les plus populaires du pays et un site inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO (Melissa Pawson)
Wadi Rum est l’un des lieux touristiques les plus populaires du pays et un site inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO (Melissa Pawson)

Wadi Rum est le plus grand wadi (« vallée ») de Jordanie, d’une superficie de 720 kilomètres carrés. Il abrite une partie de la population bédouine du pays. Plusieurs camps touristiques dans le désert offrent la possibilité aux visiteurs de goûter à un plat bédouin cuit sous le sable, le zarb, de faire des balades en jeep ou à dos de chameau ou même de l’escalade.

Le visiteur virtuel a malheureusement moins de choix. Si la visite virtuelle de Wadi Rum par VRJordan donne un aperçu de ses paysages spectaculaires, il s’agit davantage de photos à 360 degrés que d’une véritable visite en ligne. Les visiteurs ne peuvent que faire pivoter la vue et aucun guide audio n’est disponible.

Parmi les images accessibles figure le canyon de Khazali, avec ses anciens pétroglyphes, des dessins gravés dans la pierre qui représentent des humains et des antilopes et comportent des inscriptions thamoudéennes, nabatéennes et islamiques. Cependant, il est difficile de localiser les gravures sur le site virtuel. Les visiteurs peuvent aussi voir l’une des énormes dunes de sable du désert et contempler le panorama jusqu’aux jbal éloignés par-delà le sable brûlant.

Ce n’est certainement pas la même chose que de descendre en courant cette même dune de sable, regarder le soleil se lever sur ce paysage martien ou se retrouver face-à-face avec des gravures vieilles de 2 000 ans – mais cela donne au visiteur un aperçu de ce qu’il rate.

3. La mer Morte

Point le plus bas sur Terre à environ 400 mètres sous le niveau de la mer, ce lac salé est bordé par la Jordanie, Israël et la Cisjordanie occupée et alimenté principalement par le Jourdain au nord. Célèbre pour ses eaux denses et riches en minéraux, la mer Morte est presque dix fois plus salée que l’eau de mer ordinaire.

La mer Morte est célèbre pour la salinité élevée de ses eaux (Melissa Pawson) 
La mer Morte est célèbre pour la salinité élevée de ses eaux (Melissa Pawson) 

Sur place, les visiteurs peuvent accéder à la mer Morte depuis de nombreux sites de Jordanie – que ce soit depuis un complexe luxueux, l’abordable plage d’Amman, ou simplement en se garant près de l’autoroute reliant Amman à la mer Morte et en effectuant une randonnée aventureuse hors des sentiers battus.

La visite virtuelle conçue par Matterport offre seulement l’option du Panorama Dead Sea Complex au coucher du soleil. Le complexe comprend un restaurant, une échoppe de souvenirs et un musée dirigé par la Société royale pour la conservation de la nature.

La navigation n’est pas aisée et il n’y a pas d’information audio ou textuelle, mais si vous arrivez à manœuvrer à travers le Dead Sea Museum et à ajuster parfaitement l’angle de vue, vous pouvez lire la majorité des panneaux d’informations muraux qui retracent l’histoire, l’archéologie, l’écologie et la géologie de la mer Morte en anglais et en arabe.

Vous pouvez également découvrir comment les manuscrits de la mer Morte auraient été découverts par un berger à la recherche de sa chèvre en 1947 dans ce qui est aujourd’hui la Cisjordanie occupée, et entrevoir l’impact environnemental de la baisse du niveau de l’eau, principalement provoquée par la demande grandissante en eau et en irrigation.

Bien que le sentiment incomparable de légèreté qu’il y a à nager dans l’une des eaux les plus salés au monde puisse vous manquer, les vues du lac et de ses environs au coucher du soleil sont admirables même virtuellement.

4. Château de Shawbak (Krak de Montréal)

Construit en 1115 par le roi Baudouin Ier de Jérusalem, le château de Shawbak présente un décor de solitude, perché au sommet d’une colline dans un paysage accidenté mais fertile du sud de la Jordanie. Avec le château d’al-Karak construit à la même période, le château de Shawbak avait une importance stratégique au début du XIIe siècle en raison de son emplacement sur le principal point de passage entre l’Égypte et la Syrie, une route empruntée par les commerçants ainsi que par les pèlerins en route vers la Mecque.

Les commerçants et pèlerins qui passaient à proximité du château – autrefois baptisé Krak de Montréal ou mons regalis (« mont royal ») – étaient taxés pour l’utilisation de la route ; les caravanes étaient régulièrement attaquées pour leurs riches cargaisons.

Le château de Shawbak est perché sur une colline, autrefois connue sous le nom de « montagne royale » ou Montréal (Melissa Pawson)
Le château de Shawbak est perché sur une colline, autrefois connue sous le nom de « montagne royale » ou Montréal (Melissa Pawson)

Le château tomba aux mains du sultan ayyoubide Salah al-Din (Saladin) en 1189, après deux années de siège qui avaient commencé avec la prise de Jérusalem. Pendant le siège, les défenseurs du château auraient été contraints de vendre leurs épouses et leurs enfants contre de la nourriture, et certains seraient devenus aveugles en raison du manque de sel.

Montez les marches de pierre et retrouvez-vous au milieu des ruines le temps d’une visite virtuelle. Passez sous les vieilles arches et entrez dans les chambres à moitié préservées avant d’ajuster la vue pour observer le paysage vallonné et clairsemé qui entoure le site.

Cette visite virtuelle, également disponible sur le site du ministère jordanien du Tourisme, offre une navigation fluide et assez exhaustive de l’ensemble du site et on peut facilement la piloter sur ordinateur, qu’il soit portable ou de bureau. Cependant, les visiteurs virtuels peuvent être gênés par le manque d’informations fournies : aucun guide audio ou textuel n’est disponible pour aider les visiteurs.

Si une visite en personne du site peut également poser une colle en raison du manque général de panneaux d’information, la possibilité d’engager un guide local permet de remédier au problème. Les visiteurs lointains doivent quant à eux mener leurs propres recherches s’ils souhaitent en apprendre davantage sur l’histoire riche de Shawbak et de ses divers occupants.

5. Jordan Museum

Situé dans le centre d’Amman, le Jordan Museum est le musée national du royaume. Le plus grand du pays, c’est un centre culturel, historique et éducatif couvrant 1,5 million d’années d’histoire régionale. Les expositions englobent trois grands domaines : « Histoire vivante », « Jordanie moderne » et une galerie archéologique et historique.

Le Jordan Museum a lancé sa visite virtuelle pendant le confinement (AFP)
Le Jordan Museum a lancé sa visite virtuelle pendant le confinement (AFP)

Parmi les plus de 2 000 artefacts, les principales attractions sont les restes d’un nouveau-né dans une jarre funéraire datant de l’âge du cuivre, les plus anciennes statues humaines connues et un morceau des manuscrits de la mer Morte. Le musée organise également des expositions à propos de problématiques modernes telles que le défi actuel posé par les pénuries d’eau en Jordanie et les efforts entrepris pour en venir à bout.

La visite virtuelle a été lancée le 11 mai, alors que le pays était confiné. C’est le résultat d’un effort collaboratif du musée, du ministère du Tourisme et des Antiquités et de l’autorité pour la revitalisation du tourisme en Jordanie.

En sélectionnant les options « Highlights » et « Tags » dans le coin de l’écran, vous pouvez passer d’une salle à l’autre, ou explorer comme vous le souhaitez en déambulant dans chaque salle à l’aide d’une souris ou du pavé tactile.

Recherchez « infant burial in a jar » (enfant enterré dans une jarre) ou « oldest large-scale statue in the world » (plus vieille statue à grande échelle du monde) ou encore « dead sea scrolls » (manuscrits de la mer Morte) dans le champ de recherche de l’onglet « Tags » pour voir ces trois artefacts célèbres sans avoir à parcourir la moitié du musée avant.

Il n’y a pas de guide audio pour cette visite virtuelle et il peut être difficile de trouver l’œuvre que vous souhaitez sans une liste prédéfinie claire, mais les informations sont disponibles dans des boîtes de texte indiquées par des petits cercles orange au-dessus de chaque artefact ou objet exposé.

6. Darat al-Funun

Maison du patrimoine construite en 1988, Darat al-Funun (« maison des arts ») soutient les artistes jordaniens et internationaux depuis son origine. Située dans l’ancien quartier d’al-Weibdeh, la maison est gérée par la fondation Khalid Shoman et comprend six bâtiments historiques. Elle contient des œuvres d’art contemporaine et un site archéologique restauré se situe dans le jardin ; c’est un lieu populaire pour les projections de films, les lectures de poésie, les événements culturels et les concerts.

A Camel in the Room de Raed Ibrahim est l’une des œuvres visibles virtuellement à Darat al-Funun (capture d’écran)
A Camel in the Room de Raed Ibrahim est l’une des œuvres visibles virtuellement à Darat al-Funun (capture d’écran)

Depuis la fermeture des portes le 16 mars en raison du confinement, Darat al-Funun est accessible aux visiteurs à travers une exposition en ligne baptisée The Internet of Things: Another World is Possible et une visite virtuelle à 360 degrés.

La visite, déjà en place avant la pandémie, permet un accès en ligne à plusieurs bâtiments historiques de Darat al-Funun sur deux niveaux, qui accueillent les expositions contemporaines ainsi qu’un musée et une bibliothèque dans des espaces spacieux regorgeant de lumière naturelle. Le bâtiment principal accueille deux expositions, l’une de l’artiste turco-ukrainienne Nadia Kaabi-Linke, et l’autre de l’artiste jordanien Raed Ibrahim : « chacune reflète la précarité des constructions sociales, économiques et politiques changeantes en ce début de décennie ».

A Camel in the Room de Raed Ibrahim, partiellement accueillie dans le bâtiment principal, est composée de deux cigarettes Marlboro surdimensionnées recouvertes d’une grande structure noire en forme de fumée dans le cadre d’une installation en quatre parties commentant l’impact du 11 septembre 2001.

L’une des œuvres de Nadia Kaabi-Linke, Das Kapital-Epilogue, dont le titre fait référence à Das Kapital de Karl Marx, est composée d’un gros tas de pierres soutenant de façon précaire une barrière en métal noire, un commentaire sur le capitalisme de libre marché et les régimes moralement corrompus.

Une partie de cette visite virtuelle est très innovante : l’exposition vidéo de Kaabi-Linke « NO » (présentant une congrégation de religieux répondant à une bouche désincarnée leur demandant s’ils se sont vu refuser un visa pour le Royaume-Uni) se joue automatiquement sur YouTube lorsque les visiteurs passent la souris sur le mur de projection dans la version virtuelle.

Cependant, les informations sur les expositions ne sont disponibles que via les plaques apposées dans les galeries – parfois le texte est trop petit pour être lu et il n’y a pas de description audio vers laquelle se tourner.

7. Le diwan du duc

Construite en 1924, cette maison du patrimoine fut le premier bureau de poste d’Amman ; elle devint brièvement ministère des Finances puis hôtel, avant d’être finalement sauvée de la démolition lorsqu’elle fut louée en 2001 par Mahmoud Bisharat, le « Duc de Mukheibeh ».

Bisharat a depuis transformé cette maison en espace public dédié aux œuvres d’art, artefacts culturels et performances musicales. C’est un espace au cœur du centre d’Amman pour les penseurs, les intellectuels, les artistes et les touristes ; il regorge de collections qui, comme le bâtiment lui-même, offrent un aperçu de la richesse patrimoniale du pays.

Le diwan du duc a été préservé de la démolition et accueille désormais événements et visiteurs (Creative Commons/makeandtoss)
Le diwan du duc a été préservé de la démolition et accueille désormais événements et visiteurs (Creative Commons/makeandtoss)

En 2015, le lieu a accueilli un concert depuis le balcon pour les passants du centre-ville, produit par Tajalla, une société artistique et culturelle alors novice. Selon les médias locaux, cette performance devait connecter les habitants de la ville à l’héritage des anciens bâtiments d’Amman et a pris les passants par surprise.

Lors de la visite virtuelle de cette maison du patrimoine, les visiteurs se retrouvent d’abord dans le hall, conduisant à la principale pièce du diwan, où les gens se réunissaient pour discuter de leurs affaires. Après avoir navigué dans la pièce principale avec la souris, les visiteurs peuvent explorer une collection de photos historiques d’Amman prises aux XIXe et XXe siècles ainsi que la grande collection de livres de la maison exposée dans l’une des pièces adjacentes.

Les photos exposées comprennent l’image d’un amphithéâtre romain prise au milieu du XVIIIe siècle, lorsque la population d’Amman ne dépassait pas le millier d’habitants et que la ville était surtout composée de terres agricoles entourant le site archéologique désormais au cœur du centre-ville animé.

Le diwan du duc contient également des œuvres d’art et des objets d’intérêt culturel, tels qu’un portrait de Bisharat lui-même, réalisé par la peintre turque Farhelnissa Zeid, l’une des premières femmes à avoir fait l’école d’art d’Istanbul.

8. Mosquée du roi Hussein

Construite en 2005 à l’ouest d’Amman, la mosquée du roi Hussein ben Talal est la plus grande mosquée de Jordanie. Elle a été baptisée du nom du défunt roi Hussein, qui dirigea le pays de 1952 à 1999, et dont l’héritage comprend l’amélioration du niveau de vie général dans le royaume ainsi que le traité de paix de 1994 avec Israël.

La mosquée du roi Hussein a été construite en 2005 dans le parc public al-Hussein dans l’ouest d’Amman (Melissa Pawson)
La mosquée du roi Hussein a été construite en 2005 dans le parc public al-Hussein dans l’ouest d’Amman (Melissa Pawson)

La mosquée, qui peut accueillir jusqu’à 6 000 fidèles, est construite dans le style omeyyade et comprend un mihrab (niche de prière) et un minaret. Elle peut s’enorgueillir de ses grands jardins arborés dotés d’arches en pierre, de ses sols pavés aux motifs géométriques et de ses inscriptions arabes.

Si les e-visiteurs peuvent accéder au jardin et à la principale zone de prière dans la mosquée, se déplaçant plus librement qu’ils ne le pourraient s’ils la visitaient en personne, certaines zones sont toujours interdites.

La zone dédiée aux ablutions et la section de prière réservée aux femmes ne sont pas accessibles au visiteur virtuel, quiconque tente d’entrer dans ces pièces se retrouve coincé à la porte ou se retrouve dehors de l’autre côté de la mosquée.

9. Le centre-ville d’Amman

Le centre-ville d’Amman est un lieu débordant d’activités, où les vendeurs de rue vantent leur marchandise, les gens se bousculent à travers les souks animés et les échoppes de pâtisseries locales vous tentent avec des desserts glacés au sucre. On peut trouver tout ce qu’on désire acheter dans le centre-ville de la capitale jordanienne, des robes traditionnelles brodées aux mixeurs d’occasion, en passant par les pigeons vivants.

Un vendeur de jus de fruits traditionnel attend les clients dans le quartier de l’amphithéâtre romain dans le centre d’Amman (Reuters)
Un vendeur de jus de fruits traditionnel attend les clients dans le quartier de l’amphithéâtre romain dans le centre d’Amman (Reuters)

Through Local Eyes offre une visite virtuelle du centre d’Amman conduite par son fondateur ammanien, Anas Amarneh, qui fait découvrir sa ville aux internautes grâce à son téléphone portable et l’application de visioconférence Zoom.

Il commence avec certaines des œuvres de street art notoires d’Amman, qui couvrent de nombreux murs et façades à travers la capitale, racontant l’histoire d’œuvres choisies. S’arrêtant devant les fresques murales sur les marches de l’ancien quartier d’al-Weibdeh, menant au centre-ville, Amarneh utilise son téléphone portable et parfois un assistant pour la lumière afin que ses hôtes puissent bien voir ce qu’il regarde.

L’une des fresques murales dépeint la légende de la poésie palestinienne Mahmoud Darwish. À propos de cette fresque murale, le fondateur de Through Local Eyes déclare : « Je pense que c’est l’une des histoires les plus importantes car l’histoire de Darwish est très controversée et il y a de nombreux débats […] Je raconte son histoire de Palestinien, d’homme politique très important, d’écrivain et activiste parfois en guerre avec Israël et parfois en guerre avec son propre peuple, jugé par celui-ci à cause de sa relation avec une juive. »

Puis Amarneh emmène ses hôtes dans l’un des principaux espaces militants et centres culturels de la capitale, Jadal. Association à but non lucratif pour la connaissance et la culture, Jadal organise régulièrement des événements et des cours académiques, artistiques et culturels – qui ont, pour la plupart, également migré en ligne pendant le confinement –, allant de la pensée critique aux groupes de discussion, en passant par le yoga et la dabkeh.

Les visiteurs sont ensuite emmenés via la rue principale animée du centre-ville jusqu’à la mosquée al-Husseini (également disponible en visite virtuelle à 360 degrés sur vrJordan), site de style ottoman érigé sur le lieu d’une ancienne mosquée construite par le deuxième calife de l’islam, Omar Ibn al-Khattab, aux environs de 604 après Jésus-Christ.

« Lors de la visite en personne, j’ai besoin de l’autorisation de l’administration de la mosquée pour que les femmes pénètrent dans le secteur des hommes, ce qui est la partie la plus intéressante », explique Amarneh. « La partie réservée aux femmes n’a pas une architecture intéressante et cela prend tellement de temps – les femmes doivent s’habiller d’une certaine façon, un garde pourrait vouloir garder un œil sur nous pour vérifier comment se comportent les gens. Mais lorsque je fais la visite en ligne, je dis juste “salam alaykoum” et j’entre. »

Les histoires vivaces d’Anas Amarneh dépeignent la vie des gens ordinaires – et toutefois extraordinaires – qui font de la ville d’Amman ce qu’elle est aujourd’hui.

10. Jerash

La ville septentrionale de Jerash est célèbre pour ses ruines gréco-romaines bien préservées. Autrefois baptisée Gerasa, la cité se développa au IIe siècle avant Jésus-Christ. La région elle-même renferme des preuves de peuplement remontant à 7 500 avant Jésus-Christ.

Through Local Eyes propose des visites des ruines antiques de Jerash ainsi que du camp de réfugiés voisin (Melissa Pawson)
Through Local Eyes propose des visites des ruines antiques de Jerash ainsi que du camp de réfugiés voisin (Melissa Pawson)

Jerash accueille également environ 30 000 réfugiés palestiniens enregistrés vivant dans 750 kilomètres carrés connus sous le nom de « camp de Gaza ». Établi en 1968 pour les Palestiniens qui fuyaient la bande de Gaza après la guerre des Six-Jours, celui-ci fut construit initialement pour seulement 1 500 tentes.

Avec Through Local Eyes, les visiteurs peuvent non seulement explorer ces ruines fascinantes et célèbres, mais également avoir un aperçu de la vie dans le camp, en rendant visite à l’un de ses habitants, Mohammad Siam. Le camp se situe à environ 5 kilomètres du site archéologique, et Amarneh utilise les 10 minutes de trajet en voiture pour expliquer aux visiteurs sur internet ce qu’ils verront ensuite.

Utilisant un trépied pour positionner sa caméra afin d’obtenir une vue stable, Amarneh présente ses hôtes à la famille et sert d’interprète pour toute question. La visite se termine par une démonstration de cuisine traditionnelle par la mère de Mohammad Siam, bien que les internautes n’aient pas l’occasion de goûter…

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En plus de découvrir la culture et les traditions des habitants, les visiteurs voient les initiatives créatives qui ont lieu dans le camp, notamment la culture hydroponique et aquaponique ainsi que des ateliers de couture ou des labo informatique.

Anas Amarneh guide ensuite ses hôtes dans une petite balade à travers le voisinage dense, leur montrant ce qu’il voit à travers l’objectif de son téléphone portable avant de s’arrêter devant un bâtiment qui accueille plusieurs de ces projets, notamment un atelier de tailleur produisant des uniformes pour les écoliers et fournissant ainsi des revenus à six femmes.

Amarneh indique que lors d’une visite réelle, il serait normalement obligé de se plier à de nombreuses règles et normes. Certains habitants sont également mal à l’aise avec la présence de visiteurs étrangers.

« D’habitude, j’ai besoin de l’autorisation du commissariat situé dans le camp car chaque étranger qui vient doit être autorisé, mais je n’ai pas à faire tout ça avec une visite virtuelle, et on peut vraiment approfondir la visite », explique-t-il. « Il y a du positif comme du négatif – cela peut être compliqué mais j’ai plus de liberté. »

Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.

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