France : le rappeur Médine porte plainte pour diffamation contre une députée LREM
Le rappeur français Médine a porté plainte pour diffamation, mardi 23 février à Paris, contre la députée de La République en marche (LREM) Aurore Bergé, qui l’avait qualifié de « rappeur islamiste », selon plusieurs médias.
Le 18 février, la députée des Yvelines, lors d’une interview à la chaîne d’information LCI, avait accusé le rappeur d’avoir « lancé un appel au meurtre » et d’avoir chanté « qu’il fallait tuer des laïcards », citant sa chanson « Don’t Laïk ».
Dans son titre « Don’t Laïk », sorti en 2015, le rappeur disait : « Crucifions les laïcards comme à Golgotha / Le polygame vaut bien mieux que l’ami Strauss-Kahn. »
« ‘’Don’t Laïk’’ est précisément une caricature tendue aux fondamentalismes. Une caricature qui singe à la fois ceux qui font de la laïcité un outil d’exclusion, et à la fois ceux qui la subissent et l’expriment à travers une réaction d’hyper identification de circonstance. M’attribuer l’apologie des concepts derrière ces termes comme ‘’islamo-racaille’’ est malhonnête et dangereux. Reprocheriez-vous à Brassens dans sa ‘’Mauvaise réputation’’ d’être apologiste de ce qu’il s’attribue lui-même à travers la bouche des autres ? », se défendait l’artiste havrais.
« Exorciser la laïcité »
Ce morceau, ainsi que son interprète et auteur, n’en sont pas à leur première polémique. En juin 2018, la programmation d’un concert de Médine au Bataclan – salle parisienne cible d’un attentat qui avait fait 90 victimes au soir du 13 novembre 2015 – avait provoqué la colère de plusieurs figures politiques de droite et d’extrême droite.
« Aucun Français ne peut accepter que ce type aille déverser ses saloperies sur le lieu même du carnage du Bataclan », avait tweeté à l’époque la présidente du Rassemblement national, Marine Le Pen.
Dans une interview à Médiapart, Médine explique que la députée Aurore Bergé lui « colle une idéologie qui n’est, bien sûr, pas la [s]ienne ».
« Aurore Bergé prétend que j’appelle ‘’à tuer les laïcards’’ dans le morceau ‘’Don’t Laïk’’. Déjà, elle se trompe de citation. La citation précise est : ‘’Crucifions les laïcards comme à Golgotha.’’ C’est une phrase à ne pas sortir de son contexte. Si on le fait, elle change de sens. Le morceau est une succession d’absurdités, d’oxymores. Cela correspond à un type d’écriture qui exacerbe les choses. La finalité étant d’exorciser la laïcité et lui redonner ses lettres de noblesse. Quand on veut exorciser quelque chose, c’est pour le déposséder de ses démons », poursuit Médine.
Pour lui, la députée a choisi de l’attaquer parce qu’il « cristallise pas mal de choses dans ce qu’[il] représente et ce qu’[il] incarne ».
« Le fait notamment d’être musulman, avec une barbe et issu de l’immigration. Cela fait de moi une sorte d’épouvantail que certains politiques, en manque de buzz et ayant besoin de visibilité, utilisent régulièrement pour relancer le débat sur la présence musulmane en France. C’est aussi lié à l’histoire du pays et surtout son actualité. Nous sommes en plein débat sur ‘‘l’islamogauchisme’’, sur le séparatisme », dit-il.
« Les médias et les politiques parlent sans cesse de la communauté musulmane. Il y a le voile tous les trimestres, le burkini tous les étés. Et quand on a envie de taper chez les musulmans présents dans le milieu culturel, je suis un peu en tête de liste. J’ai l’impression de faire partie de la panoplie », ajoute le rappeur.
Ce jeudi, Aurore Bergé a déclaré ne pas regretter ses propos et assuré qu’elle ne présenterait pas d’excuse.
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