« C’est de l’islamophobie » : un club de football français sanctionné pour « séparatisme » et « communautarisme »
Le Sète Olympique Football Club, petit club amateur de 54 adhérents évoluant en championnat départemental 2, a été frappé d’une sanction rare : accusé de « pratiques communautaires », il vient de se voir retirer son agrément par le préfet de l’Hérault, dans le sud de la France.
Dans un arrêté signé le 14 février dernier et publié ce 18 avril, François-Xavier Lauch incrimine, à l’appui d’un contrôle mené le 16 juin 2023 par le Service départemental à la Jeunesse, à l’Engagement et aux Sports (SDJES), un « choix délibéré de ne pas développer la pratique féminine du football » et l’« absence de neutralité liée à l’utilisation d’un signe emblématique de la religion musulmane comme logo du club, apposé sur le maillot des joueurs ».
Ce logo, abandonné depuis juin 2023, présentait un croissant de lune et une étoile verts sur fond noir. Il a depuis été remplacé par un autre, où le croissant de lune a disparu au profit de plusieurs étoiles, symbole courant dans le monde sportif pour signifier la victoire.
Comme pour donner du poids à ses accusations, le préfet de l’Hérault a par ailleurs précisé au Figaro que le SDJES « [était] tombé sur des tapis de prière » pendant son contrôle.
Faute d’agrément, le Sète Olympique FC pourrait être désaffilié de la Fédération française de football (FFF). En outre, le club ne pourra plus toucher de subventions publiques. L’association sportive ne recevait déjà aucun financement de l’État, seulement une subvention municipale d’un montant de 500 euros pour l’année 2024, qui a été suspendue par le maire de Sète François Commeinhes à la suite de l’arrêté préfectoral.
Le club, qui réfute toutes les allégations, a déposé un recours contre l’arrêté préfectoral et annoncé, par la voix de son avocat maître Sefen Guez Guez, porter plainte contre le préfet lui-même pour « dénonciations calomnieuses et diffamation ». Car selon lui, il s’agit d’une décision « grave » et « disproportionnée » qui vise spécifiquement la communauté musulmane.
Si l’avocat reconnaît que le précédent logo affichait des symboles « communautaires » de la religion musulmane, ce qu’il explique au micro de RMC par l’origine des adhérents de ce « club populaire », en majorité issus de l’immigration maghrébine, il souligne que c’est le cas de bien d’autres associations sportives, notamment des clubs aux adhérents d’origine portugaise qui affichent une croix catholique ou des clubs de confession juive, comme le Maccabi Lyon, le Maccabi Sarcelles ou le Maccabi Paris, dont les emblèmes présentent une étoile de David.
« Ça ne pose pas de difficulté parce que c’est ça la France, c’est ça la diversité », déclare Me Guez Guez.
L’avocat rappelle surtout que le Sète Olympique Football Club a fait le choix de changer son logo à la suite du contrôle du SDJES en juin dernier « dans une démarche d’inclusion », que celui-ci n’existe donc plus et que dans tous les cas, « la présence d’un croissant et d’une étoile n’est pas contraire à la neutralité » .
L’avocat défend également le club contre l’accusation de refus de développer une section féminine. Outre que cela « n’est pas une obligation », rappelle-t-il au Figaro, il assure que le club n’a en réalité pas reçu de demandes en ce sens et que si tel était le cas et qu’il y avait les capacités et fonds nécessaires pour ce faire, les dirigeants n’« y [seraient] pas opposés ».
« On est face à une décision uniquement politique », martèle Me Guez Guez. L’avocat au barreau de Nice rappelle que plusieurs arrêtés préfectoraux similaires visant ces derniers mois la communauté musulmane ont tous été suspendus par la juridiction administrative, citant des interdictions de manifestations en soutien à Gaza, la fermeture du collège privé musulman Avicène, celle de la librairie Iqra ou encore l’interdiction de la venue de la militante franco-palestinienne Rima Hassan à Sciences Po Menton.
« La lutte contre le séparatisme ne se fera pas contre les musulmans, elle se fera avec les musulmans », conclut l’avocat au micro de RFM.
Contacté par Middle East Eye, Christian Di Méglio, le président du club, a démenti toute accusation de communautarisme, montrant, photo à l’appui, que le club incluait de nombreux joueurs « d’origine française » : « Vous pouvez voir des Blanc, des Blacks et des Magrébins, et oui c'est ça la France », a-t-il commenté.
La justice se prononcera le 16 mai prochain devant le tribunal administratif de Montpellier sur la suspension de l’arrêté préfectoral demandée par le club.
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