Les musulmans britanniques reconnus comme les meilleurs donateurs des associations caritatives
La Charity Commission (Commission britannique chargée des organismes caritatifs), autrefois critiquée pour son « attention disproportionnée » envers les organismes de bienfaisance musulmans et crainte par les organisations caritatives islamiques dans le passé, a fait l’éloge des associations musulmanes dans un message sur son blog rédigé par son directeur de la sensibilisation Nick Donaldson. Selon Muslim Charities Forum, le blog indique que « les musulmans britanniques ont donné environ 100 millions de livres sterling à des causes caritatives durant le mois de Ramadan cette année. Pour contextualiser, cela équivaut à environ 38 livres sterling par seconde. »
Le Ramadan renforce l’esprit du don parmi les musulmans et cette année, la Charity Commission a dès le départ informé les donateurs de veiller à ce que leurs dons aillent à des associations légitimes. Elle a produit une vidéo et donné dix conseils importants pour encourager les gens à donner en toute sécurité.
Cette reconnaissance du régulateur des associations caritatives britanniques contribuera à apaiser le ressentiment et même les craintes dans le secteur de la charité musulmane
Il est maintenant acquis que les musulmans britanniques sont les plus généreux donateurs des associations caritatives. Il y a deux ans, le Premier ministre David Cameron, qui s’est souvent attiré des critiques pour ses occasionnels commentaires abrasifs sur les musulmans et leurs institutions, a reconnu les efforts de la communauté : « La charité est l’une des choses essentielles dans l’islam. Ici, en Grande-Bretagne, les musulmans sont nos principaux donateurs – ils donnent plus aux associations que tout autre groupe confessionnel ».
Depuis les attentats terroristes du 7 juillet 2005, la communauté musulmane a continuellement subi des attaques de médias de droite, de think tanks liés aux néoconservateurs et de groupes d’extrême droite tels que Britain First. Le scrutin pour le Brexit le 23 juin n’a fait qu’aider les xénophobes et islamophobes. Bien que le grand succès de Sadiq Khan comme maire de Londres en mai ait été une source d’inspiration pour les jeunes musulmans, beaucoup de jeunes gens de la communauté réfléchissent à deux fois avant d’entrer dans la vie publique et de se mettre au service de la nation.
Encore la semaine dernière, l’ancien rédacteur du Sun, Kelvin MacKenzie, a demandé si une journaliste portant le foulard aurait dû être autorisée à apparaître sur Channel 4 News après le terrible attentat de Nice. Ses commentaires ont été qualifiés de « haine religieuse » par Channel 4 News et l’autorité qui régule la presse a reçu plus de 800 plaintes.
Cependant, ce type de remarques désobligeantes envers les musulmans dans le domaine public devient beaucoup trop commun et, par conséquent, décourage souvent bon nombre de musulmans. Bien que cette situation ait poussé une grande part de jeunes professionnels de la communauté musulmane à investir leur énergie et leur passion dans le secteur bénévole, la société dans son ensemble ne bénéficie pas pleinement de leur contribution dans des domaines vitaux tels que la politique et les médias.
Le Ramadan, qui a pris fin début juillet, est spécial pour les musulmans : il est censé être un moment de moisson spirituelle à travers l’action sociale. Pendant ce mois, de nombreux musulmans versent leur zakat obligatoire (2,5 % des économies annuelles de chacun) aux nécessiteux et aux démunis. Ils font aussi un effort particulier en ce mois pour augmenter leur contribution bénévole envers les gens autour d’eux et prennent un soin particulier à se garder des actes répréhensibles. Le comportement du public musulman change de manière significative et en mieux pendant ce mois. Par sa nature même, ce mois transforme la vie publique de chacun en termes de comportement et de relations empathiques avec ses proches et ses êtres chers ainsi qu’avec ses voisins et ses collègues – indépendamment de leur origine.
En dehors des dons, le Ramadan contribue à bâtir des ponts entre toutes les personnes. Les musulmans sont une minorité relativement nouvelle et jeune en Grande-Bretagne et il est essentiel qu’ils se connectent à leurs concitoyens, clarifient de manière proactive les malentendus et corrigent les mythes à leur sujet. L’esprit du Ramadan aide les musulmans à aller vers les autres et à s’impliquer de manière proactive dans un large éventail d’activités civiques.
Le Ramadan enseigne aux croyants à être une force pour le bien de tous. Bien que les dons soient un ingrédient essentiel du Ramadan, un élément tout aussi crucial est la sympathie pour et au-delà de sa communauté. Nous respirons tous le même air et avons des espoirs ou des préoccupations similaires en ce qui concerne notre sécurité là où nous vivons.
Le Ramadan en fait aide les musulmans à mener une guerre contre nos ennemis communs : l’ignorance, la peur et l’inaction. Notre monde a désespérément besoin d’un message d’espoir pour guérir nos fractures et lutter pour la justice et l’égalité. Nous avons désespérément besoin d’une régénération spirituelle dans un monde de plus en plus centré sur l’épanouissement individuel, la richesse matérielle et les gains à court terme. Nous avons besoin d’un point d’ancrage moral solide pour naviguer à travers les complexités et les défis de la vie moderne. Le Ramadan peut mieux préparer les croyants à pratiquer ce qu’ils prêchent.
Les dons musulmans aux associations caritatives, non seulement en Grande-Bretagne, mais à travers le monde, se multiplient pendant le Ramadan. Des musulmans ordinaires deviennent extraordinaires pendant ce mois-là. L’esprit du don crée des gens comme Abdul Sattar Edhi, un philanthrope légendaire et un saint vivant qui est décédé récemment. Cependant, il y a beaucoup de saints et de héros inconnus parmi nous qui donnent toute leur énergie et passion 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 dans le secteur caritatif britannique, ainsi que dans la vie publique.
Comme c’est une période de réflexion profonde et de conscience, l’ordre du jour du Ramadan devrait être de renforcer la résilience de la solidarité communautaire, de renforcer l’empathie et d’exceller à donner, non à prendre.
- Le Dr Muhammad Abdul Bari est un pédagogue, auteur et consultant en éducation. Il est membre du conseil de Citizens UK. Vous pouvez le suivre sur Twitter @MAbdulBari
Les opinions exprimées dans cet article n’engagent que leur auteur et ne reflètent pas nécessairement la politique éditoriale de Middle East Eye.
Photo : des musulmans britanniques à la prière du vendredi dans la mosquée d’East London, le 15 juillet 2005 (AFP).
Traduit de l’anglais (original).
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