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À Riyad, des dessous en vitrine pour une Saint-Valentin qui ne dit pas son nom

En Arabie saoudite, où le conservatisme reste très présent, la promotion de la Saint-Valentin, associée au culte chrétien romain du IIIe siècle, est toujours prohibée
Au Panorama mall de Riyad, capitale de l’Arabie saoudite, une vendeuse range des sous-vêtements féminins, le 9 février 2022 (AFP)
Au Panorama mall de Riyad, capitale de l’Arabie saoudite, une vendeuse range des sous-vêtements féminins, le 9 février 2022 (AFP)
Par MEE à RIYAD, Arabie saoudite

En Arabie saoudite, où la police religieuse sévissait naguère contre les vendeurs de roses et autres symboles de la Saint-Valentin, les sous-vêtements de couleur rouge s’affichent aujourd’hui dans les vitrines des boutiques, mais en toute discrétion, sans faire mention de la fête de l’amour.

« Les gens ne fêtaient pas la Saint-Valentin, mais maintenant beaucoup le font », confie à l’AFP Khouloud, une vendeuse saoudienne à Riyad, qui n’a pas souhaité donner son nom complet.

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« Les [sous-vêtements] sont très demandés, et les clients veulent souvent du rouge », ajoute la femme de 36 ans, faisant état de profits en hausse durant cette période.

L’Arabie saoudite tente depuis quelques années de se défaire de son image de royaume musulman austère, autorisant les cinémas et les fêtes tout en mettant à l’écart la police des mœurs qui était chargée, il y a encore peu, de faire respecter une stricte application de la loi islamique.

Mais dans la riche monarchie pétrolière, où le conservatisme reste très présent, la promotion de la Saint-Valentin, associée au culte chrétien romain du IIIe siècle, est toujours prohibée. 

« La direction nous a demandé mettre en vitrine des sous-vêtements rouges […] mais sans faire aucune mention de la Saint-Valentin », raconte à l’AFP une autre vendeuse dans la capitale saoudienne, préférant rester anonyme. 

Une autre commerçante, s’exprimant aussi sous couvert d’anonymat, se réjouit de pouvoir « désormais aisément mettre en évidence des sous-vêtements rouges, même en vitrine ».

« Nous avons des réductions pendant cette période, mais nous ne les appelons pas des offres de la Saint-Valentin », confirme-t-elle à l’AFP.

Fêter la Saint-Valentin, mais « sagement »

Plusieurs magasins, notamment des boutiques de cosmétiques, affichent en effet des réductions allant jusqu’à 50 %, mais aucun ne fait référence à la fête de l’amour.

Depuis la nomination de Mohammed ben Salmane (MBS) comme prince héritier en 2017, et son influence de plus en plus grande au sein du pouvoir, des réformes sociales ont été menées, notamment l’autorisation pour les femmes de conduire

« Nous avons des réductions pendant cette période, mais nous ne les appelons pas des offres de la Saint-Valentin »

- Une commerçante saoudienne à Riyad

Mais l’image du royaume, premier exportateur de brut au monde et plus grande puissance économique du monde arabe, reste ternie par une répression féroce de la société civile, des opposants politiques aux militantes féministes.  

Même discrète, la folie rouge de la Saint-Valentin n’est pas du goût des plus conservateurs. « Je ne veux pas voir ces choses-là, elles me dérangent », confie à l’AFP une Saoudienne vêtue d’un voile intégral noir. 

« Mais il y a des gens qui aiment ça et c’est leur liberté », reconnaît toutefois cette femme qui a requis l’anonymat.

Pour Reem al-Qahtani, 22 ans, la fête de la Saint-Valentin se fait « progressivement » une place dans la société saoudienne. 

« Pour l’instant, on la célèbre sagement dans les cafés et restaurants, mais on espère que cela va prendre plus d’ampleur dans les années à venir », dit-elle à l’AFP.

Par Haitham El-Tabei.

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