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« Les civils n’ont aucun espoir » : le cessez-le-feu en Syrie sur le point de débuter

Les civils syriens ont exprimé peu d’espoir quant aux chances de réussite du cessez-le-feu alors que l’accord entre les États-Unis et la Russie doit entrer en vigueur
Des Syriens portant des bébés se frayent un chemin à travers les décombres des bâtiments détruits à la suite d’une frappe aérienne sur le quartier de Salihin, tenu par les rebelles, dans la ville d’Alep, le 11 septembre 2016 (AFP)

Un cessez-le-feu négocié par la Russie et les États-Unis doit débuter en Syrie au coucher du soleil ce lundi, après la mort de dizaines de civils au cours d’un week-end de frappes sanglantes.

La trêve, annoncée après un marathon de négociations entre les ministres des Affaires étrangères russe et américain, a été présentée comme la meilleure chance de mettre fin à cinq ans de guerre civile en Syrie, durant laquelle plus de 290 000 personnes auraient péri.

Alors que chaque minute nous rapproche du coucher du soleil, moment où il est prévu que commence le cessez-le-feu, les rebelles qui luttent contre le gouvernement syrien et l’opposition politique se demandent encore s’ils respecteront cet accord.

Un seul groupe rebelle, Ahrar al-Sham, a officiellement répondu : rejetant l’accord de cessez-le-feu qui, selon ces influents rebelles radicaux, ne servirait qu’à asseoir le président Bachar al-Assad.

Alors même que les puissances mondiales se sont prononcées en faveur de l’accord, les frappes de ce weekend sur les villes clés de l’opposition, Alep et Idlib, ont tué au moins 74 personnes.

Les raids aériens du gouvernement sur les zones d’Alep tenues par les rebelles ont tué 6 civils et en ont blessé 30 ce dimanche, d’après l’Observatoire syrien des droits de l’homme.

« Nous espérons qu’il y aura un cessez-le-feu afin que les civils se voient accorder un répit. Le pilonnage se poursuit jour et nuit, il y a des tueries ciblées, des villes assiégées », a déclaré Abu Abdullah, qui vit dans l’est d’Alep sous contrôle rebelle.

« Les civils n’ont plus d’espoir. »

Des avions de combat non identifiés ont bombardé les deux villes samedi, tuant 62 personnes rien qu’à Idlib.

Les frappes à Idlib ont touché plusieurs zones, notamment un marché bondé de personnes faisant leurs courses en préparation de la fête musulmane de l’Aïd al-Adha, qui commence ce lundi.

Assad et ses alliés saluent la trêve

L’agence de presse officielle SANA a rapporté samedi que le gouvernement du président syrien Bachar al-Assad « approuvait l’accord » concernant la trêve.

La milice libanaise du Hezbollah, qui intervient militairement au nom d’Assad, a également annoncé son soutien.

Principal soutien d’Assad et du Hezbollah, l’Iran a également salué l’accord, bien que le porte-parole du ministère des Affaires étrangères Bahram Ghasemi ait averti que son succès reposait sur la création d’un « mécanisme global de contrôle, notamment au niveau des frontières, afin d’empêcher l’envoi de nouveaux terroristes » en Syrie.

Le principal groupe d’opposition syrien, le Haut Comité des négociations – regroupant des dissidents politiques ainsi que des factions rebelles armées – n’a pas encore répondu officiellement.

Cependant, le radical Ahrar al-Sham, qui travaille en étroite collaboration avec le Front Fatah al-Sham (ancien affilié d’al-Qaïda), a rejeté l’accord, affirmant que celui-ci « réduirait à néant tous les sacrifices et les victoires de notre peuple qui s’est soulevé ».

Fatah al-Sham n’est pas concerné par l’accord de trêve mais a lui aussi rejeté ce projet. Son porte-parole, Mostafa Mahamed, a écrit sur Twitter : « Les négociations et les accords qui ne tiennent pas compte des combattants sur le terrain sont inutiles. »

Les Syriens « ont perdu la foi »

À Damas, Taher Ibrahim, un habitant, a dit qu’il ne s’attendait à aucun répit durable des combats.

« Personne parmi la population syrienne n’accepte cet accord… [les groupes d’opposition] sont tous les mêmes et aucun d’entre eux ne s’en tiendra à cette trêve », estime-t-il.

Toutefois, dans la ville rebelle de Douma, assiégée par les forces gouvernementales depuis 2013, le conseil local a indiqué soutenir la trêve et a lancé un appel pour la paix : « Assez de la guerre. »

L’accord a été conclu après des discussions entre le secrétaire d’État américain John Kerry et le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov à Genève.

Aux termes de cet accord, les combat et les frappes aériennes aveugles cesseront à travers le pays à partir du coucher du soleil ce lundi et pendant 48 heures, éventuellement renouvelables.

Pour faire parvenir l’aide humanitaire dans la ville assiégée d’Alep, isolée la semaine dernière par les forces gouvernementales pour la deuxième fois en deux mois, une « zone démilitarisée » serait établie autour de la route du Castello.

Si le cessez-le-feu tient pendant une semaine, les États-Unis et la Russie – qui soutiennent des camps opposés dans ce conflit – pourraient commencer des opérations conjointes contre les militants du groupe État islamique (EI) et Fatah al-Sham.

Le journal syrien pro-gouvernement Al-Watan a déclaré dimanche que l’accord ouvrirait la voie à de nouvelles négociations de paix à Genève.

Plusieurs tentatives de négociations ont échoué depuis que le conflit a éclaté ; plus tôt cette année, des discussions dans la ville suisse sont tombées à l’eau après le départ de l’opposition en protestation contre la situation humanitaire.

Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.

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