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Rebelles d’Alep : nous partirons « en portant des ceintures d'explosifs »

« Si on les arrête, ils sont prêts se battre », déclare le dernier journaliste dans l’enclave rebelle, alors que l’armée syrienne conseille aux rebelles d’accélérer l'évacuation
Le journaliste Bilal Abdul Kareem (à gauche) photographié à côté d’un combattant qui, dit-il, porte un gilet d’explosifs (Facebook)
Par MEE

Les combattants rebelles revêtent des ceintures d’explosifs et sont prêts à se battre si les forces pro-gouvernementales essaient de les empêcher de quitter Alep-Est, selon le dernier journaliste présent dans l’ancien bastion rebelle.

Les séquences vidéo diffusées mardi par Bilal Abdul Kareem, journaliste américain piégé dans Alep-Est depuis des semaines, montraient un combattant portant une ceinture d’explosifs sous sa veste, Kalachnikov à la main.

Kareem a indiqué que les combattants se préparaient à quitter Alep, suite à l’évacuation de déjà 25 000 habitants environ de l’est de la plus grande ville de Syrie, encore récemment sous le contrôle des rebelles.

« Voici une ceinture d’explosifs. C’est celle que portent beaucoup de combattants parce qu’ils ne font pas confiance aux promesses du régime de les laisser partir sans les attaquer », explique Kareem.

« Si on les arrête, ils sont prêts à se battre. »

Traduction : « On n’a pas permis aux combattants de partir. Ils ont tous des ceintures d’explosifs et affirment qu’ils ne se laisseront pas arrêter si le régime ne tient pas promesse. »

La vidéo ne permettait pas d’établir à quelle organisation le combattant était affilié ou si la ceinture n’était pas factice.

Kareem a indiqué à MEE que des représentants d’environ 22 groupes de combattants étaient toujours piégés dans Alep-Est. Il a précisé que ces combattants et leur famille quittaient la ville dans des files de voitures d’un kilomètre de long.

La plupart des civils avaient été évacués au moment de la vidéo, mais il restait encore un certain nombre d’habitants blessés, ainsi que des docteurs et des infirmiers.

« Ils pensent qu’ils devaient, selon les termes de l’accord avec l’autre partie, avoir quitté la ville au cours de la matinée », indique Kareem.

« Cependant, ils ont l’impression que les [forces gouvernementales syriennes et alliées] renégocient sans cesse, et ça les décourage. »

À la question de savoir si cette initiative ne risquait pas de provoquer les forces pro-gouvernementales, Kareem répond que les combattants rebelles ont « une longue expérience en matière de relations avec le régime et qu’ils n’ont aucune confiance en lui ».

« Ils pensent qu’il est possible qu’ils veuillent traverser le point de passage, et que, quelque part aux alentours, ils feront face à certains problèmes, et que s’il y a des problèmes, ils seront prêt à leur faire face », a ajouté Kareem.

Malgré cela, Kareem a déclaré que les rebelles désiraient partir et remettre les quartiers Est d’Alep aux forces gouvernementales syriennes.

« Ils craignent des attaques potentielles. En même temps ils tiennent à répéter qu’ils ne veulent pas de problèmes. Tout ce qu’ils souhaitent c’est remplir leur part du contrat et remettre la ville aux forces d’Assad ; ensuite ils partiront. »

Selon un accord signé entre rebelles et gouvernement syrien et ses alliés, les combattants et les civils ont l’assurance de pouvoir passer sans encombre dans les régions tenues par les rebelles dans la province d’Idleb à l’ouest.

L’opération d’évacuation est contrôlée par le Comité international de la Croix-Rouge et, suite à un vote au Conseil de sécurité des Nations unies lundi, des observateurs seront dépêchés sur le terrain.

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Les évacuations d’Alep-Est continuaient mardi, mais l’on estime que des milliers des gens attendent encore de partir.

Une source rebelle en Turquie a déclaré à l’agence de presse Reuters que, même après le départ de milliers de gens lundi, environ la moitié seulement des civils qui voulaient partir avait pu le faire à ce moment donné.

Cependant, l’armée syrienne a diffusé des messages dans les quartiers Est d’Alep mardi, pour signaler qu’elle allait pénétrer dans la zone pendant la journée, et engageait donc les combattants de l’opposition d’accélérer leur évacuation.

Plusieurs fois ces derniers jours et à cause de la méfiance réciproque de l’armée syrienne et des rebelles, les évacuations ont commencé mais se sont arrêtées pour recommencer ensuite. Le camp des rebelles redoute également que l’armée syrienne et les milices alliées ne laissent pas les combattants partir.

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Une opération parallèle d’évacuation des résidents de deux villages majoritairement chiites assiégés par les rebelles dans Idleb a été interrompue lorsque des combattants qui seraient affiliés à Jabhat Fatah al-Sham, l’ancien Front al-Nosra allié d’Al-Qaïda, ont incendié les bus prévus les emmener.

Le contributeur de Middle East Eye, Zouhir al-Shimale, évacué lundi, a indiqué que le bus dans lequel il voyageait a traversé des postes de contrôle contrôlés par les forces russes et iraniennes et par la milice Hezbollah libanaise.

Il a expliqué que des soldats russes sont montés à bord des bus pour vérifier que les passagers ne cachaient pas d’armes.

« Ils disaient aux gens qu’ils pouvaient revenir du côté du régime et que personne ne les harcèlerait ou ne les arrêterait. Mais personne ne les a écoutés... Les gens restaient silencieux. Nous sommes allés vers la campagne à l’ouest en toute sécurité et personne n’a été arrêté ou blessé. »

Pendant ce temps, ce sont des conditions désolantes qui attendent les civils des quartiers Est d’Alep arrivant à Idleb. Les travailleurs humanitaires ont averti qu’il n’y a pas assez de places pour les nouveaux arrivants dans les abris, et que les ressources alimentaires et les fournitures médicales sont également insuffisantes.

Traduit de l’anglais (originial) par [email protected].

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