EN IMAGES : Hasan, un Syrien aveugle, a trouvé sa lumière dans la foi
Dans ses souvenirs les plus lointains, l’obscurité était déjà la norme pour Hasan Fadel, un Syrien de 29 ans originaire du village de Hassarjah, dans la campagne d’Idleb.
Enfant, il pensait que tout le monde autour de lui était également aveugle. C’est l’absence de peur et d’hésitation dans la voix de ses frères et sœurs lors de leurs allées et venues dans la maison familiale qui lui a fait comprendre qu’il n’était pas comme les autres.
« Ce n’était pas ce que je ressentais et, peu à peu, j’ai appris que j’étais différent, que je n’étais pas doté du sens le plus important qu’une personne puisse avoir – la vue », se souvient-il.
Ce sont surtout les petits tracas associés à son handicap qui l’ont complexé durant son enfance, comme lorsque ses parents demandaient à l’un de ses frères d’aller ouvrir à la porte à sa place. Ces choses ainsi que les brimades de la part des enfants du quartier l’ont rendu solitaire : il sortait rarement de la maison sans sa famille (MEE/Abdul Razzak el-Shami).
Hasan est devenu aveugle peu de temps après sa naissance. Sa mère attribue cette déficience à un nerf optique endommagé qui est apparu peu après l’accouchement. Le jeune garçon a arrêté de répondre aux stimuli visuels.
Malgré sa déficience visuelle, la famille de Hasan affirme qu’il a été un élève enthousiaste et « assoiffé de connaissances » : il a ainsi appris à lire le braille dès l’âge de 6 ans. En dépit des finances limitées et de l’impossibilité pour la famille de payer tous les équipements nécessaires pour aider Hasan dans sa scolarité, le jeune homme a excellé au cours de ses études secondaires. Mais ses rêves de diplôme ont été réduits à néant par le début de la guerre civile syrienne.
Les combats sont rapidement arrivés à la porte de Hasan, forcé de fuir avec sa famille quand les avions du gouvernement syrien ont commencé à bombarder son village.
Lorsque les combattants révolutionnaires ont pris le contrôle de la ville d’Idleb en 2015, la famille s’y est installée et a loué une maison près d’une mosquée.
Le son des versets du Coran récités depuis la mosquée pendant que le gouvernement bombardait la ville est devenu une source de réconfort pour Hasan. Les versets qu’il entendait durant les violences l’ont aidé à surmonter le traumatisme de la guerre.
« J’étais détendu et rassuré lorsque j’entendais le Coran et que je répétais ses versets », confie-t-il. Il a alors décidé d’apprendre par cœur le livre sacré de l’islam, qui compte 6 346 versets.
Hasan a suivi des cours à la mosquée de son quartier pour mémoriser le Coran, mais contrairement aux autres étudiants qui pouvaient lire, il ne comptait que sur sa capacité à écouter et à mémoriser ce que son instructeur disait.
Les professeurs de Hasan ont été stupéfaits par sa capacité prodigieuse à se souvenir des versets et des chapitres qu’il entendait. Le jeune homme n’avait besoin d’écouter une page qu’une ou deux fois pour la graver dans sa mémoire. En un an, il est parvenu à mémoriser l’ouvrage en entier.
Il est fréquent de voir Hasan se promener dans les rues d’Idleb avec un enregistreur et une enceinte Bluetooth qu’il utilise pour écouter le Coran et pratiquer ses récitations.
En plus de l’avoir transformé sur le plan spirituel, son exploit a également changé le regard des gens. « Avant, les gens du quartier me regardaient avec pitié et me considéraient comme quelqu’un qui avait des besoins particuliers », explique-t-il. « C’était quelque chose qui me dérangeait beaucoup et qui avait un impact psychologique sur moi. »
À mesure que la nouvelle de son exploit s’est répandue, Hasan a remarqué que les attitudes commençaient à changer autour de lui, que les gens devenaient moins condescendants.
La plupart des musulmans retiennent quelques courts chapitres – ou sourates – du Coran pour accomplir leurs prières et autres rites, mais le fait d’apprendre l’intégralité du texte est quelque chose de plus rare.
Ceux qui y parviennent reçoivent le titre honorifique de hafiz, de l’arabe signifiant « gardien ». Bien que ce ne soit pas une pratique universelle, ceux qui mémorisent le livre sacré auprès de certaines institutions islamiques se voient décerner une ijaza, terme pouvant se traduire par « autorisation ».
L’ijaza certifie qu’une personne a atteint un niveau de compréhension dans un domaine spécifique des études islamiques. Dans le cas de Hasan, son ijaza reconnaît qu’il a appris le Coran par cœur.
Dans de nombreux cas, l’obtention du statut de hafiz est la première étape vers une carrière dans l’érudition islamique. Une personne qui a appris le Coran par cœur étudie ensuite les recueils de hadiths, des paroles et des récits attribués au prophète Mohammed.
Après les avoir maîtrisés, l’étudiant se tourne vers les ouvrages des juristes islamiques classiques, avant de se lancer dans ses propres recherches. Hasan n’a pas l’intention de mettre fin à ses études religieuses et espère devenir un prédicateur islamique.
L’esprit de Hasan n’est pas seulement occupé par ses ambitions religieuses. À 29 ans, il rêve de fonder une famille. « J’espère avoir une épouse avec laquelle j’accomplirai le voyage de ma vie et j’aurai des enfants. »
Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.
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