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Conspiration émiratie pour mettre un terme à la démocratie naissante en Tunisie

Le chef d’État-major émirati a déclaré à son homologue algérien qu’il mettrait fin à « l’expérience d’Obama » et reviendrait à la « routine habituelle », selon le compte-rendu de la réunion
Mohammed Hamad al-Thani Rumaithi (à droite), chef d’État-major des EAU, avec le cheikh Hamdan bin Zayed (WAM)

Les Émirats arabes unis cherchent à mettre un terme à la transition démocratique en Tunisie et à faire revenir le pays à un régime autoritaire, selon le compte-rendu d’une réunion entre de hauts responsables militaires émiratis et algériens.

Ces dernières révélations, provenant d’une source tunisienne haut placée, surviennent après que Middle East Eye a révélé que les EAU avaient menacé de déstabiliser la Tunisie parce que le président Béji Caïd Essebsi avait rejeté un projet d’Abou Dhabi visant à réprimer le mouvement tunisien islamiste Ennahdha.

Une source haut placée a confié à MEE sous couvert d’anonymat que les Émirats Arabes Unis ont fait connaître leurs intentions lorsque les chefs respectifs des forces armées algériennes et émiraties se sont rencontrés au salon aéronautique de Dubaï le 9 novembre.

Le chef d’état-major des forces armées des EAU, le général de corps d’armée Hamad Mohammed Thani al-Rumaithi, a annoncé au chef d’État-major algérien, le général de corps d’armée Ahmed Gaïd Salah : « Bientôt ‘’l’expérience d’Obama’’ sera finalement réglée de manière définitive et nous pourrons revenir à la routine habituelle. »

Le service officiel Algérie Presse a rapporté la réunion et a indiqué que les deux généraux « ont évalué le niveau de la coopération militaire entre les deux forces armées ». La discussion concernant la Tunisie n’a pas été mentionnée.

L’expérience d’Obama fait référence au soutien sans faille que les États-Unis apportent à la Tunisie dans sa transition vers la démocratie depuis qu’en 2011 une révolution a renversé le régime autoritaire de longue-date de Zine el-Abidine Ben Ali.

La nouvelle d’un plan émirati visant à saper la transition démocratique tunisienne est de nature à contrarier ses alliés américains, qui considèrent la Tunisie comme la seule réussite des soulèvements du « Printemps arabe ».

Plus tôt cette année, les États-Unis ont fait de la Tunisie un important allié non membre de l’OTAN et le président Obama a promis d’envoyer à Tunis 123,6 millions d’euros d’aide en 2016 – toutefois, ce projet de loi est bloqué au Sénat, qui n’a approuvé qu’environ 80 millions d’euros.

En novembre, le secrétaire d’État américain John Kerry a visité Tunis pour annoncer l’équivalent de 460 millions d’euros en garanties de prêts pour la Tunisie en échange de réformes économiques. Il a déclaré à cette occasion : « Les yeux du monde sont braqués sur la Tunisie et l’Amérique veut que la Tunisie s’en sorte. »

Le chef d’État-major émirati a confié à son homologue algérien son plan de déstabilisation de la Tunisie, persuadé que les deux pays avaient un intérêt commun dans la gestion des changements politiques tunisiens.

Cependant, après le récent remplacement de celui qui a pendant longtemps dirigé les services de renseignement algériens, les priorités politiques en Algérie ont évolué et se concentrent désormais sur la sécurisation des frontières, notamment celle avec la Libye, où le militantisme armé a augmenté et le groupe État islamique (EI) a fait son apparition au milieu de l’actuelle guerre civile.

Alger ne cherchant plus à s’impliquer dans la politique tunisienne, le général Salah a répondu au général Rumaithi : « La Tunisie constitue une limite à ne pas franchir et toute déstabilisation sera considérée comme une menace pour la sécurité nationale algérienne. »

Des responsables algériens (non identifiés) ont transmis le message à Tunis après la réunion à Dubaï, mais on ignore si Abou Dhabi a entrepris quoi que ce soit de concret pour faire reculer la menace algérienne.

Des rumeurs d’ingérence politique émiratie en Tunisie ont circulé plus tôt cette année lorsque le journaliste local Sofian Ben Farhat, qui prétend être un proche confident du président Essebsi, a affirmé que les Émirats arabes unis avaient essayé d’obtenir du président que celui-ci s’empare du pouvoir avant son élection en décembre dernier.

Farhat a déclaré que les Émirats arabes unis avaient offert de financer Essebsi s’il répétait « le scénario égyptien », allusion au soutien financier apporté par Abou Dhabi au coup d’état militaire de 2013 au Caire, qui a renversé le président élu Mohamed Morsi et l’a remplacé par le chef de l’armée de l’époque Abdel-Fattah al-Sissi, lequel a depuis mené une politique de répression de grande envergure contre le mouvement des Frères musulmans de son prédécesseur.

L’offre a été rejetée et le parti Nidaa Tounes du président Essebsi a formé plus tard un gouvernement de coalition, comprenant notamment Ennahdha. Comme Middle East Eye l’a rapporté le mois dernier, cela aurait conduit Abou Dhabi à chercher à remplacer les dirigeants tunisiens.

Traduction de l’anglais (original) par VECTranslation.

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