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L’Algérie demande à l’Égypte d’arrêter ses frappes en Libye

Pour Alger, l'attentat de vendredi contre les Coptes n'était qu'un « prétexte » pour mener un raid, Abdel Fattah al-Sissi ayant « prévu » bien avant cela de frapper la Libye
Un avion de combat égyptien de retour après des frappes en Libye en février 2016 (AFP/Ministère égyptien de la Défense)

ALGER – « Les attaques sur la Libye ne régleront pas les problèmes sécuritaires que connaît l’Égypte » : dans une lettre dont Middle East Eye a eu connaissance, la présidence, au nom du président Abdelaziz Bouteflika a demandé à Abdel Fattah al-Sissi d’arrêter de frapper la Libye.

Vendredi, les forces égyptiennes ont frappé un camp d’entraînement d'islamistes armés en réponse à une attaque contre un bus transportant des coptes, revendiquée par le groupe État islamique (EI) qui a fait au moins 29 morts. « L’Égypte n’hésitera pas à frapper les camps d’entraînement terroristes partout, sur son sol comme à l’étranger », a déclaré le président Abdel Fattah al-Sissi. 

« Dans la même journée, à une heure tardive, le Gouvernement d’union nationale [GNA], via son Premier ministre Fayez al-Sarraj, a téléphoné à Ahmed Ouyahia [directeur de cabinet de la présidence algérienne] » pour demander à Alger d’intervenir, confie une source sécuritaire à MEE.

Ce n’est pas la première fois que Fayez al-Sarraj, soutenu par la communauté internationale mais peu par les Libyens et les pays de la région, utilise le « canal d’Alger ». En octobre dernier, il avait également demandé à Alger d’interférer pour « bloquer la vente d’armes à Khalifa Haftar [le maréchal autoproclamé, à la tête d’un gouvernement rival dans l’Est] ». 

Alger, qui estime que les islamistes libyens doivent être intégrés au jeu politique une fois les armés déposées, via un dispositif de réconciliation nationale, n'est pourtant pas sur la même longueur d'ondes que Le Caire, qui rejette toute discussion avec eux.

Les deux capitales continuent toutefois à discuter : selon une source diplomatique, des représentants des Affaires étrangères des deux pays « doivent très prochainement se rencontrer pour aborder des questions militaires et humanitaires ».

À LIRE : Les groupes islamistes en Libye dans le collimateur de Washington

Selon un cadre des services de renseignements algériens contacté par MEE, l’Algérie se préparait depuis quelques semaines à une détérioration de la situation en Libye. « Nous pensons même que même s’il n’y avait pas eu cette attaque contre les coptes, l’Égypte se préparait à frapper. L'attentat de vendredi n'était qu'un prétexte », souligne-t-il en évoquant la récente visite (en mai) du chef d’état-major des forces égyptiennes, Mahmoud Hijazi, dans l’Est libyen où il s’est entretenu avec Khalifa Haftar.

Toujours selon cette source, le chef d’état-major de l’armée algérienne, Ahmed Gaïd-Salah, a tenu une réunion importante avec les forces spéciales à Biskra (sud-est) où il aurait exprimé ses craintes d’une « guerre » en Libye. « Il s’est aussi rendu à la frontière avec la Libye à deux reprises en quelques semaines pour des manœuvres militaires », poursuit notre source.

La dernière manœuvre remonte au 22 mai. Le ministère de la Défense a rapporté la visite du vice-ministre de la Défense (l’autre titre d’Ahmed Gaïd Salah) dans la quatrième région militaire, dans le secteur d’In Amenas, où les unités de la 41e brigade blindée a pris part à des exercices, appuyées par des unités terrestres et aériennes.

Manœuvres de l’armée algérienne à la frontière avec la Libye le 22 mai 2017 (ministère de la Défense algérien)

« Enfin, le directeur de l’aviation civile américaine a donné des instructions aux sociétés américaines de transport aérien de ne pas passer à proximité des côtes libyennes, sur la base de renseignements selon lesquels les forces navales russes étaient en train de faire des exercices. Tout laissait penser que la situation allait s’envenimer », poursuit l’officier. « Et cela s’est vérifié puisque les milices de Tripoli, pour qui cette frappe ne peut être que le résultat d’une complicité entre Sissi et le GNA, ont aussi déclenché des combats dans la capitale. »

Un bilan de 52 morts selon les forces pro-GNA

Vendredi toujours, des affrontements ont éclaté entre les forces loyales du GNA et des milices rivales à Tripoli. Selon Hachem Bichr, un responsable de la sécurité, les combats auraient fait 52 morts dans les rangs pro-GNA.

Traduction : « Énormes dégâts dans les magasins et les maisons à Tripoli »

Il n'est pas possible dans l'immédiat de vérifier ce bilan de source médicale ou indépendante. Le dernier bilan fourni vendredi soir par le ministère de la Santé faisait état de 28 morts et plus de 100 blessés, sans préciser qui étaient les victimes.

Traduction : « Les membres du Conseil de sécurité de l’ONU ont condamné l’escalade de violence à Tripoli et l’escalade militaire dans le sud de la Libye »

Les forces pro-GNA ont annoncé sur leurs pages Facebook avoir vaincu leurs rivaux et maintenu leurs positions dans la capitale. Elles ont même pu prendre le contrôle de la prison où étaient détenus les principaux dirigeants de l'ancien régime, comme le dernier Premier ministre de Mouammar Kadhafi, Baghdadi al-Mahmoudi, et l'ex-chef des services de renseignements, Abdallah Senoussi.

Samedi, alors que l'aviation loyale à Khalifa Haftar, a annoncé avoir participé aux frappes aériennes menées par l'Égypte en Libye, le gouvernement d'union nationale (GNA) basé à Tripoli et appuyé par la communauté internationale a pourtant dénoncé les raids égyptiens à Derna comme une « atteinte contre la souveraineté » du pays.

Depuis jeudi, les forces de Haftar ont aussi pris le contrôle de la base de Tamenhent dans le sud-est, où mi-avril, l’Armée nationale libyenne avaient frontalement attaqué les forces armées soutenant le GNA. 

Selon nos informations, le Croissant-Rouge algérien et le ministère de la Solidarité, relayés par une ONG libyenne locale ont envoyé depuis Illizi (sud-ouest  algérien) une aide alimentaire dans le sud-est de la Libye.

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