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Les résultats de recherche sur Google associent le keffieh palestinien au terrorisme

Alors que cette découverte suscitait une vague d’indignation sur les réseaux sociaux, Amazon et Google ont signé lundi un accord de 1,2 milliard de dollars avec Israël
Le moteur de recherche Google place le keffieh en tête des résultats de la recherche portant sur le type de couvre-chef ou de foulard porté par les terroristes (Google/capture d’écran)
Le moteur de recherche Google place le keffieh en tête des résultats de la recherche portant sur le type de couvre-chef ou de foulard porté par les terroristes (Google/capture d’écran)
Par Azad Essa

L’emblématique keffieh palestinien, foulard noir et blanc à carreaux généralement porté autour de la tête ou du cou, serait le couvre-chef préféré des terroristes selon Google.

Mardi sur les réseaux sociaux, les internautes ont fustigé le moteur de recherche après avoir constaté que la recherche portant sur le type de couvre-chef ou de foulard porté par les terroristes plaçait le keffieh en tête des résultats.

Symbole du nationalisme palestinien, le keffieh a été rendu célèbre dans les années 1960 par le leader palestinien Yasser Arafat. Largement considéré comme un symbole de la résistance palestinienne, il est, de nos jours, souvent porté en signe de solidarité.

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Nadim Nashif, directeur exécutif de 7amleh - Arab Center for Social Media Advancement, explique à Middle East Eye que cette découverte illustre comment les grandes sociétés technologiques façonnent des discours négatifs sur les Palestiniens.

« Bien qu’on ne sache pas vraiment comment Google Search en est venu à associer le keffieh au terrorisme, 7amleh a effectué des recherches et rendu compte de la manière dont les politiques de Google – que ce soit dans Google Maps, sur YouTube ou dans le Knowledge Panel de Google – discriminent les Palestiniens, diffusent des informations erronées et font de la désinformation, et perpétuent des stéréotypes racistes et déshumanisants, en violation des lois et normes relatives aux droits de l’homme », affirme Nadim Nashif.

« Le keffieh est une coiffe historique des Arabes et des Palestiniens depuis des décennies, apparue chez les agriculteurs avant de devenir un symbole du nationalisme palestinien […] Associer ce symbole historico-culturel au terrorisme est une pratique raciste et déshumanisante. »

Le groupe indique avoir déposé une plainte officielle auprès de Google et attend une mise à jour de la part de la société. 

Google n’a pas répondu à la demande de précisions ou de commentaires formulée par MEE.

Un accord de 1,2 milliard de dollars signé par Google et Amazon avec Israël

Alors que cette découverte suscitait une vague d’indignation sur les réseaux sociaux, Amazon Web Services (AWS) et Google ont signé lundi un accord de 1,2 milliard de dollars avec Israël.

Dans le cadre de ce projet, appelé Nimbus, les deux sociétés technologiques fourniront des services cloud au secteur public et à l’armée israélienne.

L’accord, qui a été confirmé en avril mais n’a été signé que lundi, est intervenu quelques jours seulement après qu’un groupe d’employés de Google connu sous le nom de Jewish Diaspora in Tech a exhorté le PDG Sundar Pichai à mettre fin aux contrats commerciaux portant atteinte aux droits de l’homme en Palestine. 

Signée initialement par au moins 250 employés, la lettre demandait à Google de protéger et de soutenir la liberté d’expression, et notamment de rejeter l’insinuation selon laquelle critiquer Israël est un acte antisémite.

Les événements au sein de Google s’accompagnent d’efforts similaires déployés chez Apple, où un millier d’employés ont demandé au PDG Tim Cook de publier de toute urgence un communiqué en soutien aux droits des Palestiniens

« Nous demandons aux dirigeants de Google de rejeter toute définition de l’antisémitisme identifiant les critiques d’Israël ou du sionisme comme des actes antisémites », peut-on lire dans la lettre.

Les événements au sein de Google s’accompagnent d’efforts similaires déployés chez Apple, où un millier d’employés ont demandé au PDG Tim Cook de publier de toute urgence un communiqué en soutien aux droits des Palestiniens.

La lettre demandait à Apple de reconnaître le fait que « des millions de Palestiniens subissent actuellement une occupation illégale ».

Interrogée par MEE, l’activiste américaine d’origine palestinienne Nerdeen Kiswani estime que cet accord illustre le « mépris » des deux firmes pour la vie des Palestiniens.

« Plus de 50 000 Palestiniens de Gaza ont été déplacés et plus de 200 ont été assassinés », affirme-t-elle. « Au lieu d’émettre un quelconque signe de préoccupation ou de solidarité pour les Palestiniens, Google et Amazon ont fait demi-tour pour signer cet accord honteux d’un milliard de dollars avec Israël alors que les Palestiniens continuent de souffrir. »

De même, Nadim Nashif de 7amleh estime que l’accord montre « comment les entreprises technologiques permettent les violations des droits de l’homme et développent des politiques visant à laver ces pratiques illégales ». 

« AWS [Amazon Web Services] ne devrait pas fournir de services cloud à des sociétés qui collaborent avec des gouvernements et des armées dans le but de développer des technologies de surveillance et d’espionner les Palestiniens ainsi que les autres activistes et organisations défendant les droits de l’homme. »

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Google et Amazon n’ont pas répondu à la demande de commentaires formulée par MEE au sujet de l’accord.

Ces réactions au sein du monde de la technologie interviennent dans un contexte d’innombrables allégations de censure de comptes ou de messages propalestiniens sur les réseaux sociaux, notamment Facebook, Instagram et Twitter.

La semaine dernière, des chercheurs ont déclaré à MEE qu’il était même difficile d’établir l’ampleur réelle des dégâts causés à Gaza par les onze jours de bombardements aériens menés par Israël, dans la mesure où de nombreux outils de cartographie open source, dont Google, n’ont pas mis à jour leurs cartes avec des images haute résolution.

Sans donner d’explication, Google a indiqué à MEE qu’aucune mise à jour de ses cartes de Gaza n’était prévue.

Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.

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