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Jérusalem-Est : des colons israéliens cherchent à s’emparer du quartier arménien par la force

Des colons armés, soutenus par les forces de sécurité israéliennes, tentent d’occuper près de 25 % du quartier arménien, une « menace existentielle » pour une communauté pluriséculaire
Nourhan Ier Manoukian (au centre), patriarche arménien de Jérusalem, arrive à l’église de la Nativité à Bethléem le 18 janvier (AFP)

Un convoi de voitures et de motos de colons israéliens a pénétré mercredi dans le quartier arménien de Jérusalem-Est occupée, cherchant à usurper la zone sous contrôle arménien, a indiqué la communauté dans un communiqué.

Le Mouvement pour la protection et la préservation du quartier arménien a averti, dans une publication sur Instagram, que les tensions étaient vives et que la police israélienne avait arrêté « sans motif probable » trois Arméniens, dont un mineur, tout en apportant son soutien aux colons.

« Au lieu d’éloigner les intrus, la police israélienne a permis à plusieurs colons de maintenir leur présence destinée à posséder les propriétés arméniennes », poursuit le communiqué.

Alors que le monde a les yeux tournés vers la guerre israélienne à Gaza, les colons dans les territoires palestiniens occupés, y compris la vieille ville de Jérusalem, exploitent cette diversion pour concrétiser leurs revendications territoriales illégales.

Selon le communiqué, la tentative des colons d’invasion des « jardins arméniens » – connus sous le nom de « Jardin des vaches » – dans la vieille ville de Jérusalem est une « tentative malveillante de changer la réalité sur le terrain ».

« Nous luttons maintenant pour l’intégrité des quartiers arménien et chrétien », déclare à Middle East Eye Hagop Djernazian, co-fondateur du Mouvement pour sauver le quartier arménien et membre de la communauté arménienne de Jérusalem.

« Si nous ne parvenons pas à annuler officiellement l’accord, nous pourrions être confrontés à une menace existentielle, non seulement pour la présence arménienne à Jérusalem, mais aussi pour la présence chrétienne »

- Hagop Djernazian, militant de la communauté arménienne

Le conflit a commencé après la signature par le patriarcat arménien de Jérusalem d’un accord obscur et secret avec une société nommée Zana Capital qui prévoit la location des jardins historiques arméniens pour construire un hôtel de luxe, explique-t-il.

« Malheureusement, cet accord contient des manipulations et des fraudes », poursuit-il.

La communauté est désormais confrontée à une menace existentielle en raison de cet accord qui verrait, via un bail emphytéotique de 99 ans, quelque 25 % du quartier arménien attribués à des communautés de colons cherchant prétendument à construire un complexe de luxe.

Le patriarcat arménien de Jérusalem a annoncé le 26 octobre qu’une lettre avait été envoyée aux promoteurs pour annuler l’accord.

« Un grave danger »

Bien que signé en 2021, l’accord est devenu public en 2023, lorsqu’une des entreprises israéliennes a cherché à devenir propriétaire du lieu, déclenchant les protestations de la communauté arménienne.

« Depuis le 26 octobre, la soi-disant société Zana, qui s’avère être soutenue par des colons, et Ateret Cohanim, une organisation de colons qui tente de transformer la composition démographique de la vieille ville en faveur d’une majorité juive, tentent de provoquer et de s’approprier une partie des terres par la force », explique Djernazian.

Les colons ont tenté d’intimider la communauté et le Mouvement pour sauver le quartier arménien en faisant notamment venir des bulldozers et des camions afin de démolir les murs et les terres, rapporte-t-il.

« Ils ont amené des colons armés il y a deux semaines pour s’emparer des terres par la force, utilisant des colons armés et des chiens d’attaque.

« Hier et aujourd’hui, la soi-disant société a fait appel à une agence de sécurité pour qu’elle puisse s’emparer du territoire par la force, avec le soutien et la coopération de la police israélienne. »

Un groupe d’Arméniens, en coopération avec le patriarcat, manifeste dans le quartier arménien pour mettre fin aux constructions illégales sur leurs terres (Mouvement pour la protection du quartier arménien)
Un groupe d’Arméniens, en coopération avec le patriarcat, manifeste dans le quartier arménien pour mettre fin aux constructions illégales sur leurs terres (Mouvement pour la protection du quartier arménien)

Le gouvernement israélien d’extrême droite, dirigé par le Premier ministre Benyamin Netanyahou et composé de colons, a créé un climat encore plus permissif pour de tels accaparements de terres.

« Les autorités ne font rien pour sauver et aider la communauté arménienne », déplore Djernazian. « Au contraire, elles font pression sur la communauté arménienne. »

La communauté pense désormais que les colons sont derrière l’accord par lequel la terre a été initialement cédée à un homme d’affaires australien.

« Ces colons sont soutenus par le gouvernement israélien, et les ministres du gouvernement israélien font pression sur la communauté et la confrontent à une grave menace existentielle », prévient Djernazian.

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L’avenir de la communauté arménienne et plus largement de la communauté chrétienne de la vieille ville est désormais en jeu.

« Si nous réussissons dans cette lutte à protéger l’intégrité du quartier arménien et protéger nos terres, nous pourrons continuer à vivre à Jérusalem comme nous le faisons depuis le IVe siècle en encourageant nos jeunes à rester ici », déclare Djernazian.

« Malheureusement, si nous ne parvenons pas à annuler officiellement l’accord, nous pourrions être confrontés à une menace existentielle, non seulement pour la présence arménienne à Jérusalem, mais aussi pour la présence chrétienne, car cet accord fait courir un grand danger aux quartiers arménien et chrétien », ajoute-t-il.

« Les chrétiens doivent s’unir et unir leurs forces avec les Arméniens afin de protéger le statu quo et la mosaïque de la ville sainte de Jérusalem, et pour que nous ayons un avenir dans cette ville. »

Traduit de l’anglais (original).

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