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Trump suspendu de Twitter : dix publications islamophobes du président sortant 

Vendredi, Twitter a suspendu définitivement le compte de Donald Trump pour empêcher de « nouvelles incitations à la violence » après l’assaut du Capitole. Retour sur plusieurs de ses tweets controversés
« Le Royaume-Uni s’efforce de dissimuler son énorme problème musulman », tweetait Trump en 2015 (AFP)
Par Ali Harb à WASHINGTON, États-Unis d’Amérique

Dure semaine pour le président Donald Trump. Ses vains efforts pour annuler les résultats de l’élection ont subi un coup d’arrêt ; ses alliés républicains l’abandonnent ; les Démocrates veulent le destituer et de nombreux Américains le tiennent responsable de l’émeute au Capitole

Vendredi soir, il a en outre été chassé de son réseau social préféré. Twitter a définitivement suspendu le compte de Trump « en raison du risque de nouvelles incitations à la violence » après les troubles provoqués par ses partisans à Washington plus tôt dans la semaine.

Twitter avait bloqué temporairement le compte de Trump mercredi, jour des émeutes. Il a pu y accéder de nouveau jeudi soir. 

Vendredi matin, il a envoyé deux tweets : l’un affirmant que ses partisans, qu’il a qualifiés de « grands patriotes américains », ne seraient pas « insultés ni traités injustement », et un autre confirmant qu’il n’assisterait pas à l’investiture du président Joe Biden, le 20 janvier.

Dans un communiqué justifiant cette suspension, Twitter indique que ces deux publications étaient « susceptibles de pousser d’autres à reproduire les actes de violence qui ont eu lieu » mercredi.

Muslim Advocates, un groupe américain pour les droits civiques, a salué la suspension du compte du président sortant. « En bannissant définitivement le compte de Trump, Twitter fait preuve d’un véritable leadership et prend une mesure significative pour couper une source majeure de haine et de désinformation en ligne – tout en contribuant à empêcher de nouvelles violences nationalistes blanches », a indiqué le groupe dans un communiqué.

Si les incitations de Trump ont culminé avec le chaos à Washington la semaine dernière, le président sortant a utilisé Twitter pendant des années pour diffuser des fausses informations et des propos intolérants – en particulier islamophobes.

Middle East Eye revient sur dix publications de Trump qui ont suscité la controverse et des accusations d’intolérance sans aboutir à une suspension :

Approuver la surveillance des musulmans à New York

Quelques années avant l’annonce de sa candidature à la présidence, Trump avait tweeté son soutien au programme inconstitutionnel de surveillance mis en place par la police de New York à l’encontre de la communauté musulmane locale. 

« Le chef de la police de New York a sagement et légalement entrepris de surveiller les activités de certains membres de la communauté musulmane. La vigilance assure notre sécurité », avait tweeté Trump en 2012.

En 2020, l’ancien maire de New York Michael Bloomberg, qui supervisait ce programme, s’est présenté aux primaires démocrates à la présidentielle et a défendu l’espionnage des musulmans comme étant « la chose à faire » à l’époque.

Affirmer à tort que des Américains musulmans se sont réjouis des attentats du 11 septembre 2001

Trump a lancé sa campagne présidentielle en 2015 en qualifiant les migrants mexicains sans-papiers de « violeurs » et en continuant à diffuser la haine et le racisme au cours des premières semaines de sa candidature.

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Alors que le groupe État islamique perpétrait d’horribles violences en Irak et en Syrie et menait des attentats à travers le Moyen-Orient et l’Europe, Trump n’a pas tardé à retourner son hostilité à l’égard des immigrés contre les musulmans. 

Il a affirmé à tort que des Américains musulmans dans le New Jersey s’étaient réjouis des attentats du 11 septembre 2001. « Source crédible de célébration musulmane du 11 septembre : le FBI », avait-il tweeté en novembre 2015 avec un lien vers un article contenant de fausses informations.

Dans les semaines suivantes, il allait retweeter plusieurs publications d’internautes affirmant avoir été témoins de fêtes qui n’avaient pas eu lieu.

Décrier l’« énorme problème musulman » du Royaume-Uni

Fin 2015, des centaines de milliers de personnes en Grande-Bretagne avaient signé une pétition parlementaire exhortant leur gouvernement à empêcher la venue de Trump dans leur pays en raison de sa proposition tristement célèbre : le « Muslim ban ». Le futur président américain avait riposté en affirmant que le Royaume-Uni souffrait d’un « problème musulman ».

« Le Royaume-Uni s’efforce de dissimuler son énorme problème musulman. Tout le monde est conscient de ce qui se passe, c’est très triste ! Soyons honnêtes », avait-il tweeté.

Plus tard ce jour-là, Trump avait rendu hommage à la chroniqueuse britannique d’extrême droite Katie Hopkins, saluant son « écriture puissante » sur les « problèmes musulmans du Royaume-Uni ».

Désormais, Trump rejoint Katie Hopkins, qui a autrefois comparé les migrants à des « cafards », sur la liste des personnes bannies de Twitter. Le réseau social a radié le compte de la chroniqueuse tôt cette année en raison d’« abus et de comportement haineux ».

Nier l’existence des grands sportifs américains de confession musulmane

En décembre 2015, le président de l’époque Barack Obama saluait les Américains de confession musulmane, « nos amis et voisins, nos collègues, nos vedettes sportives ». Trump avait alors remis en question cette assertion.

« Obama a déclaré dans son discours que les musulmans [étaient] nos vedettes sportives. De quel sport et de qui parle-t-il ? Est-ce qu’Obama fait du profilage ? » 

Parmi les grands sportifs américains de confession musulmane figurent notamment le boxeur de légende Mohamed Ali et le meilleur marqueur de l’histoire de la NBA Kareem Abdul-Jabbar.

Quelques mois plus tard, Trump faisait l’éloge de Mohamed Ali à son décès, le qualifiant – sur Twitter – de « véritable grand champion et un type merveilleux ».

« J’ai réclamé le ban »

Après le meurtre de dizaines de personnes dans une boîte de nuit à Orlando par le militant Omar Mateen (29 ans), Trump a mentionné qu’il était félicité en raison de ses propositions visant les musulmans. 

Il écrivait en juin 2016 : « J’apprécie les félicitations [que je reçois] parce que je fais ce qu’il faut contre le terrorisme islamique radical, [mais] je ne veux pas de félicitations, je veux de la fermeté et de la vigilance. Nous devons faire preuve d’intelligence ! »

Il a également réitéré son appel à une interdiction totale pour les musulmans de pénétrer aux États-Unis. 

« Ce qui s’est produit à Orlando n’est que le début. Nos dirigeants sont faibles et inefficaces. Je le dénonce et j’ai réclamé le ban, Il faut être ferme. »

Retweeter les fausses vidéos d’actes de violence commis par des « migrants musulmans »

Dans les premiers mois de son mandat, Trump est resté mesuré dans ses expressions d’islamophobie – du moins sur Twitter. Mais un jour de novembre 2017, il a retweeté trois publications d’un activiste d’extrême droite britannique prétendant montrer des actes de violence commis par des musulmans en Europe.

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L’une des vidéos venait d’Égypte, une autre de Syrie et la troisième, filmée aux Pays-Bas, n’impliquait pas de musulmans. 

« Que la vidéo soit authentique ou non, la menace est réelle », a réagi Sarah Sanders, porte-parole de la Maison-Blanche, écartant les questions au sujet de l’authenticité des publications.

« C’est une incitation à la violence contre les musulmans américains », avait à l’époque déclaré à MEE Ibrahim Hooper, porte-parole du Council on American Islamic Relations.

Arrivée d’« inconnus du Moyen-Orient » à la frontière

À l’approche des élections de mi-mandat de 2018, Trump a battu le tambour de la peur en dénonçant une « caravane de migrants » en provenance d’Amérique centrale qui se dirigeait vers la frontière sud des États-Unis.

En octobre, il a affirmé sans donner de preuves que parmi les migrants figuraient des « inconnus du Moyen-Orient ».

« Des criminels et des Moyen-Orientaux inconnus se sont mélangés », a-t-il écrit. « J’ai alerté les gardes-frontières et l’armée, il s’agit d’une urgence nationale. Il faut changer les lois ! »

Cette affirmation a été condamnée à l’époque par des groupes de défense des droits civiques. 

« C’est un tweet très xénophobe. Il vise à perpétuer la haine, le sectarisme, la xénophobie envers les Arabes », a déclaré à MEE Abed Ayoub, directeur juridique de l’American-Arab Anti-Discrimination Committee (ADC), suite à la publication de Trump.

Sommer des élues américaines de « retourner » dans les pays d’où « elles viennent »

Même si c’est de Trump qu’il s’agit, cette attaque sortait de l’ordinaire. En juillet 2019, le président a envoyé une série de tweets dans lequel il a sommé des élues américaines progressistes de retourner dans les « endroits […] infestés par la criminalité dont elles viennent ».

Ses propos s’adressaient aux quatre élues de gauche – dont deux membres musulmanes du Congrès, Ilhan Omar et Rashida Tlaib – connues sous le nom de « The Squad ». Alexandria Ocasio-Cortez, l’une des élues ciblées par Trump, est en réalité originaire de New York, sa ville natale.

« Tellement intéressant de voir des élues démocrates “progressistes” du Congrès, originaires de pays dont les gouvernements sont dans une situation totalement catastrophique, les pires, les plus corrompus et ineptes au monde (si tant est qu’ils aient un gouvernement en état de fonctionner) oser maintenant dire haut et fort et de manière perfide à la population des États-Unis, la plus grande et la plus puissante nation de la Terre, comment notre gouvernement doit être dirigé », a-t-il écrit.

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 « Pourquoi ne retournent-elles pas dans ces endroits totalement défaillants et infestés par la criminalité dont elles viennent pour aider à les réparer ? Et ensuite, elles reviennent et nous montrent comment il faut faire. Ces endroits ont vraiment besoin de votre aide, partez au plus vite. Je suis sûr que [la présidente de la Chambre des représentants] Nancy Pelosi sera très contente de vous trouver rapidement des voyages gratuits ! »

Dire à des immigrés et à des gens de couleur de « rentrer chez eux » est un discours raciste courant que le président des États-Unis a employé de manière répétitive – non pas sous forme de lapsus, mais dans des messages sur Twitter.

Ces propos ont suscité de vives réactions dans le camp démocrate, tandis que la plupart des alliés républicains du président ont continué de le défendre.

« C’est le programme des nationalistes blancs, qu’il se déroule dans les salons de discussion ou à la télévision nationale. Et maintenant, il a même atteint les jardins de la Maison-Blanche », a réagi à l’époque Ilhan Omar, élue musulmane au Congrès américain.

Accuser Ilhan Omar d’avoir dansé à l’occasion de l’anniversaire du 11 septembre

Le 13 septembre 2019, Trump a réitéré ses fausses affirmations formulées en 2015 concernant des musulmans célébrant le 11 septembre ainsi que ses propos islamophobes à l’encontre d’Ilhan Omar en retweetant un message accusant l’élue d’avoir fait la fête à l’occasion de l’anniversaire des attentats.

« DESTITUEZ CETTE FEMME. Ilhan Omar a fait la fête à l’occasion de l’anniversaire du 11 septembre », indiquait le tweet.

La publication reprenait une vidéo dans laquelle on pouvait voir Ilhan Omar danser au milieu la foule sur une chanson de la pop star américaine Lizzo. 

En réalité, Ilhan Omar se trouvait à un événement du Congressional Black Caucus deux jours après l’anniversaire du 11 septembre.

« [Cette vidéo est issue] d’un événement du CBC [Congressional Black Caucus] que nous avons organisé ce week-end pour célébrer les femmes noires au Congrès », a écrit l’élue en réponse au retweet de Trump.

« Le président des États-Unis continue de répandre des mensonges qui mettent ma vie en danger. Que fait Twitter pour lutter contre cette désinformation ? »

Accuser Joe Biden de vouloir transformer le Midwest en un « camp de réfugiés »

Avec la propagation du COVID-19 et les tensions raciales à travers le pays, Trump n’a pas autant cité les musulmans durant sa campagne de réélection qu’il ne l’avait fait en 2015 et 2016.

Mais dans la dernière ligne droite, il a souvent invoqué les réfugiés et la députée Ilhan Omar pour susciter la peur chez les électeurs. Quelques jours avant le scrutin de novembre dernier, il a averti sur Twitter que son adversaire Joe Biden ferait venir des réfugiés issus de « nations terroristes » dans des swing states.

« Joe Biden veut augmenter de 700 % le nombre de réfugiés provenant de nations terroristes », a écrit Trump. 

« Son plan submergerait vos communautés et transformerait le Michigan, le Minnesota, le Wisconsin et tout le Midwest en un camp de réfugiés. C’est moi qui protège vos familles et garde les terroristes islamistes radicaux HORS de notre pays. »

Trump a perdu les élections avec plusieurs millions de voix de retard après avoir été battu dans les trois États du Midwest qu’il a mentionnés dans le tweet. Il a finalement été banni de Twitter.

Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.

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