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L’assassinat d’un chef rebelle porte un coup sévère aux négociations de paix

Force centrale de l’opposition syrienne et source de crédibilité pour un accord lors des futures négociations en Arabie saoudite, le groupe Jaysh al-Islam déclare maintenant refuser de négocier avec le gouvernement
Par MEE

Jaysh al-Islam, groupe pivot de la rébellion syrienne qui est perçu comme l’opposition la plus crédible au régime de Bachar al-Assad, a diffusé la vidéo d’une déclaration marquée par un ton de défi suite à l’assassinat de son chef, Zahran Allouche, qui a eu lieu vendredi dernier.

« Rien ne nous fera changer […] et ceci ne fait qu’accroître notre détermination à combattre le régime [de Bachar al-Assad] », a déclaré un membre du commandement de ce groupe après la nomination d’Abou Hammam al-Buyedhani comme successeur de Zahran Allouche.

« Que les [partisans de l’État islamique] se préparent à recevoir les coups des descendants d’Ali. »

Malgré les promesses de ce groupe de continuer à déployer ses milliers de combattants aussi bien contre Bachar al-Assad que contre l’État islamique (Daech), les analystes pensent que le meurtre de Zahran Allouche est un coup sévère porté à l’opposition, et qu’il intervient à un moment crucial où le gouvernement récolte les fruits de l’intervention russe à ses côtés.

Selon Aron Lund, rédacteur du site « La Syrie en crise » qui dépend de la Fondation Carnegie pour la paix internationale, Zahran Allouche aurait été « une personnalité centralisatrice d’un rare succès » au sein d’une opposition syrienne longtemps divisée.

Tenant d’une ligne dure, mais ayant tout de même affirmé sa volonté de débattre d’une solution politique au cours des négociations entre le régime et l’opposition censées débuter à Riyad en janvier, Zahran Allouche était une figure essentielle du mouvement.

« Pour être crédibles, ces négociations nécessitaient la présence de […] Zahran Allouche », a affirmé Aron Lund.

Survenu si peu de temps avant le début des négociations de paix, l’assassinat de Zahran Allouche a été perçu par d’autres observateurs comme le signe évident que la Syrie et ses alliés russes, qui se sont attaqués cette semaine aux différents groupes d’opposition, ne sont pas encore prêts à se rendre à la table des négociations.

« Ceci est le signe d’un rejet des négociations de Riyad », a affirmé vendredi au New York Times Ibrahim Hamidi, correspondant syrien du journal al-Hayat.

De son côté, le groupe Jaysh al-Islam a répondu au meurtre de Zahran Allouche en annonçant qu’il refuserait de participer à des négociations avec le gouvernement syrien.

Ce groupe a promis d’apporter une réponse « violente » à cet assassinat en frappant dans la capitale de Damas, que Zahran Allouche avait déclarée zone militaire en février dernier.

« Quelles que soient vos opinions, gardez à l’esprit que Zahran Allouche et le groupe Jaysh al-Islam étaient les partisans d’un processus politique en Syrie », a déclaré Salman Cheikh, ancien directeur de la Brookings Institution.

« Ce coup marque la mort anticipée des [négociations de paix qui allaient bientôt se tenir à Riyad]. Avant, parvenir à réunir toutes les parties autour d’une table n’avait pas été une tâche aisée. Désormais, cela semble impossible. Attendons-nous à la poursuite de la guerre. »

Même si Aron Lund, via le site de la Fondation Carnegie, a envisagé que la cohésion de l’opposition finirait par se « détricoter » en raison du meurtre de Zahran Allouche, d’autres ont prédit que ce décès pourrait avoir pour conséquence de renforcer le groupe Jaysh al-Islam.

Sur le site d’actualités en langue arabe Zaman al-Wasl, le journaliste syrien Abdullah al-Raja a rappelé ce qui était arrivé au groupe Ahrar al-Sham, une autre faction centrale de la rébellion, depuis que la plus grande partie de son commandement avait été balayée par une bombe en septembre 2014.

« L’assassinat du commandement du groupe Ahrar al-Sham a donné [à ses autres membres] une leçon de persévérance révolutionnaire », a écrit Abdullah al-Raja samedi dernier.

« [La nouvelle politique] consistant à établir des coalitions, qui a permis de mettre en place l’Armée de la conquête, compte parmi les plus grandes victoires du groupe Ahrar al-Sham.

« Aujourd’hui, le groupe Jaysh al-Islam est en train de tirer le même enseignement. »

Traduction de l’anglais (original) par Mathieu Vigouroux.

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