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Syrie/Irak : qui fait quoi dans la lutte contre l’État islamique ?

Après les premières frappes aériennes du Royaume-Uni sur des cibles liées au groupe EI en Syrie, examinons qui fait quoi dans la lutte contre Daech
Un peshmerga irakien dans un char au nord de l’Irak, où les Kurdes combattent l’EI depuis l’année dernière (AA)

Mercredi soir, le Parlement britannique a voté une motion pour étendre les frappes aériennes contre l’État islamique en Syrie. Dans les heures suivant ce vote, le ministère de la Défense a indiqué que quatre avions de chasse Tornado avaient décollé de Chypre et avaient conduit des frappes aériennes contre Daech en Syrie, même si aucun détail sur les raids n’a été divulgué.

Cette décision est intervenue après que les États-Unis ont annoncé qu’ils allaient envoyer une équipe d’élite en Irak pour y aider les forces locales.

Alors que la situation continue à évoluer rapidement, qui au juste combat le groupe EI en Syrie et en Irak, et à quel titre ?

Armées syrienne et irakienne

- SYRIE : l’armée syrienne comptait 178 000 soldats en 2015, selon l’International Institute for Strategic Studies (IISS). Elle a perdu la moitié de ses effectifs d’avant-guerre en raison des décès, des défections et de l’insoumission croissante au service militaire. Dans sa lutte contre les groupes d’opposition, elle s’appuie en outre sur les milices, qui compteraient 150 000 à 200 000 membres.

- IRAK : l’armée comprend 177 600 hommes, selon l’IISS, bien que d’autres sources estiment que ce nombre est grandement exagéré et qu’il n’y a que quelques dizaines de milliers de combattants valides. Après l’invasion américaine en 2003, les responsables américains ont dissous l’armée, qui était alors forte de 450 000 hommes ; ils essaient néanmoins de reconstruire de nouvelles forces depuis l’effondrement de l’armée irakienne en juin 2014 face à la pression de l’EI. Washington et ses alliés ont essayé de former l’armée irakienne, envoyant des conseillers militaires et des armes spéciales, mais l’Irak a continué à dépendre fortement des milices chiites, notamment les Unités de mobilisation populaire (Hachd al-Shaabi).

Forces kurdes, milices rebelles et combattants étrangers

- Les Kurdes ont essayé de défendre leur propre territoire face à l’EI, soutenus par des raids de la coalition menée par les États-Unis, avec les Unités de protection du peuple (YPG) dans le nord et le nord-est de la Syrie et les peshmergas dans le nord de l’Irak.

- En Syrie, après l’échec d’un projet visant à former des factions rebelles arabes, Washington a accru en octobre son soutien à une coalition de groupes de miliciens et de rebelles kurdes connus sous le nom de Forces démocratiques syriennes (FDS).

- Ailleurs en Syrie, l’opposition armée est composée d’une multitude de groupes jugés modérés et islamistes par l’Occident, notamment la puissante faction Ahrar al-Sham dans le nord et nord-ouest de la Syrie, l’Armée de l’Islam près de Damas et le Front Sud dans la province de Daraa. Le Premier ministre britannique David Cameron a affirmé qu’il y avait 70 000 combattants « modérés » sur le terrain avec lesquels il pourrait coopérer. Beaucoup ont mis en doute le bien-fondé de ces allégations, alors que les partisans du Premier ministre conservateur ont déclaré qu’il pourrait bien y avoir environ 65 000 combattants « modérés ».

Cependant, certaines de ces forces se sont parfois alliées au Front al-Nosra, branche syrienne d’al-Qaïda et rival du groupe EI, qui compterait entre 5 000 à 7 000 combattants. En raison de l’inconstance des objectifs et des alliances, il est extrêmement difficile pour les chercheurs d’estimer précisément le nombre de combattants sur le terrain.

Bien que les renseignements occidentaux pensent qu’environ 31 500 hommes combattent dans les rangs de Daech en Irak et en Syrie, un commandant kurde a récemment cité un chiffre beaucoup plus élevé, affirmant qu’ils étaient au moins 200 000.

Selon les dernières estimations, le nombre de combattants étrangers qui sont partis combattre en Irak ou en Syrie dépasse maintenant les 20 000 – dont près d’un cinquième de résidents ou ressortissants de pays d’Europe occidentale, d’après l’International Centre for the Study of Radicalisation and Political Violence du King’s College de Londres.

Forces étrangères

La coalition internationale menée par les États-Unis mène des frappes aériennes en Irak depuis septembre 2014, à la demande de Bagdad, et en Syrie, même si elle a publiquement refusé de collaborer avec les autorités de Damas.

La coalition comprend environ 60 pays, parmi lesquels la Grande-Bretagne, la France, les voisins arabes de la Syrie et la Turquie, ainsi que la Tunisie, la Malaisie et le Nigeria depuis fin septembre.

Elle a publiquement exclu d’envoyer des troupes au sol, mais a envoyé des soldats pour former les troupes irakiennes et, en début de semaine, les États-Unis ont annoncé qu’ils enverraient des forces d’élite pour frapper l’État islamique.

Moins d’une douzaine de pays mènent effectivement des frappes aériennes, lesquelles se sont chiffrées à 8 300 au cours de l’année dernière, dont environ 80 % de frappes américaines.

Cinq pays (les États-Unis, la France, le Canada, l’Australie et la Jordanie) ont participé aux frappes aériennes en Syrie et en Irak. La Grande-Bretagne sera le sixième.

D’autres participent à des frappes en Syrie mais pas en Irak : l’Arabie saoudite, le Bahreïn, les Émirats arabes unis et la Turquie ; ou au contraire en Irak mais pas en Syrie : le Danemark et les Pays-Bas.

Washington a également déployé le porte-avions USS Harry S Truman en Méditerranée ainsi que 3 500 soldats en Irak, et devrait en plus déployer au moins 200 soldats des forces spéciales en Irak et en Syrie.

FRANCE : elle intensifie ses frappes aériennes en Syrie après les attaques du 13 novembre à Paris qui ont tué 130 personnes et ont été revendiquées par Daech. La France a mobilisé 3 500 soldats et déployé le porte-avions Charles de Gaulle en Méditerranée orientale, elle a ainsi plus que triplé sa capacité de frappe.

TURQUIE : elle a lancé ses premières frappes aériennes avec la coalition le 28 août. Ankara a autorisé les États-Unis à utiliser sa base stratégique d’Incirlik et serait en négociation avec la France et peut-être l’Allemagne pour leur permettre d’utiliser cette base également.

CANADA : il projette de retirer ses avions de combat, mais d’apporter des renforts aux 69 membres des forces spéciales actuellement postés au Kurdistan irakien.

ALLEMAGNE : elle a envoyé environ 100 soldats pour entraîner les troupes kurdes et doit voter l’envoi ou non de 1 200 soldats pour combattre en Syrie, notamment à bord d’une frégate qui accompagnera le Charles de Gaulle, et le ravitaillement ainsi que les avions de reconnaissance.

RUSSIE : alliée clé du gouvernement de Damas, Moscou a commencé à lancer des frappes aériennes le 30 septembre en Syrie, après avoir accru sa présence militaire au cours de l’été.

Sa flotte dans la mer Caspienne a également tiré des missiles de croisière. La Russie appelle à une « grande coalition anti-terroriste » et a envoyé jusqu’à 2 000 soldats en Syrie, selon la presse russe.

Accusée par les États-Unis et ses alliés de cibler l’opposition à Damas plutôt que le groupe EI, Moscou a multiplié les attaques sur Daech depuis les attentats de Paris et le crash d’un avion russe sur le Sinaï égyptien, même si elle continue à frapper également d’autres groupes. La Russie, l’Iran, la Syrie et l’Irak partagent des renseignements depuis septembre.

IRAN : Téhéran soutient le gouvernement de Damas et de Bagdad et a engagé ses troupes d’élite, les Gardiens de la Révolution, dans les combats en Syrie. En tout, quelque 7 000 soldats ont été envoyés en Syrie et en Irak.

LIBAN : la puissante milice chiite qu’est le Hezbollah a déployé entre 5 000 et 8 000 combattants en Syrie où ils opèrent aux côtés de l’armée.

Traduction de l’anglais (original) par VECTranslation.

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