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Au Maroc, l’ambassade de France invite des Israéliens et provoque la colère de la société civile

Les cercles engagés contre la normalisation avec Israël dénoncent l’initiative française d’inviter de jeunes Israéliens à un forum méditerranéen organisé au Maroc
Photo prise au Forum euro-méditerranéen des jeunes leaders, au Maroc, en 2016 (Facebook)

Les détracteurs marocains de la normalisation avec Israël sont vent debout contre l’ambassade de France au Maroc. La raison ? Organisé par l’ambassade de France et l’Institut français, le Forum euro-méditerranéen des jeunes leaders, événement qui regroupera à Essaouira du 15 au 17 novembre, pour la cinquième année, des jeunes venus des pays du pourtour méditerranéen, ouvre ses portes à Israël. 

« Jeunes Israéliens de 18 à 25 ans comprenant bien le français, nous vous invitons à soumettre votre candidature pour participer au 5e Forum euro-méditerranéen des jeunes leaders sur le thème ‘’Engagement et partage pour une nouvelle citoyenneté’’, organisé par l’ambassade de France et l’Institut français du Maroc », peut-on lire sur le site de l’ambassade de France. 

Une annonce qui a suscité la colère de Boycott, Désinvestissement et Sanctions (BDS) Maroc, une campagne appelant à boycotter politiquement, économiquement et culturellement Israël. « Il s’agit en effet d’un acte de normalisation clair, autrement dit d’une tentative de faire paraître l’occupation, et donc le colonialisme de peuplement, comme un partenaire ‘’normal’’ d’une manifestation qui se tient au Maroc, alors que l’immense majorité de notre peuple refuse absolument toute normalisation avec les occupants de la Palestine », dénonce BDS Maroc dans un communiqué

« Il s’agit d’individus qui peut-être tout juste hier et certainement très bientôt demain seront aux premières lignes de la guerre coloniale d’occupation sans trêve contre le peuple palestinien »

- BDS Maroc

D’autant, soulignent les rédacteurs du texte, que « c’est la première fois que l’ambassade de France émet un appel à la participation d’Israël à cette manifestation ». Une allusion à peine voilée au rôle de la nouvelle ambassadeur française à Rabat, Hélène Le Gal, qui pris ses fonctions en septembre dernier après avoir été en poste à Tel  Aviv.

« En lançant un tel appel, l’ambassade de France s’octroie le droit, alors qu’elle n’a qu’un statut d’invitée au Maroc, de convoquer sur le territoire du Maroc de jeunes Israéliens qui ont l’âge du service militaire, qu’ils effectuent dans une armée pratiquant au quotidien le crime de guerre contre le peuple palestinien frère, en particulier à Gaza et à Jérusalem. Il s’agit d’individus qui peut-être tout juste hier et certainement très bientôt demain seront aux premières lignes de la guerre coloniale d’occupation sans trêve contre le peuple palestinien », dénonce le communiqué de BDS Maroc.

Ce dernier accuse aussi l’ambassade de France d’avoir caché aux candidats « et aux bailleurs de fonds locaux, ainsi qu’à une partie au moins des encadrants, que des Israéliens ont été invités à participer », acte qu’ils qualifient  « d’une violation grave des usages par la partie organisatrice ».

Les autorités, elles, n’ont pas officiellement réagi à cette invitation.

Polémique autour de la biennale de Jérusalem

Les pourfendeurs de la normalisation avec Israël sont d’autant plus en colère que des artistes marocains ont participé à la biennale de Jérusalem en octobre. Une participation controversée qui a poussé l’Association marocaine d’arts plastiques (AMAP) et le Syndicat marocain des artistes plasticiens professionnels (SMAPP) à marquer leurs distances avec certains artistes. 

« Quelles que soient les raisons qui ont amené ces artistes à accepter d’exposer leurs œuvres [...], motivations matérielles, morales, ou d’ordre politique, ils n’ont pas pris en considération que leur participation serait perçue comme une participation de leur pays, comme lorsque n’importe quel citoyen d’un pays participe à une rencontre internationale », se désolidarisent-ils dans une communiqué conjoint.

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« Il est impossible d’ignorer que pour se blanchir des crimes de guerre [colonisation de territoires occupés par la force, maltraitance des populations civiles…] et des crimes contre l’humanité [à Jérusalem mais aussi à Gaza privée de moyens de vie – l’eau ! etc.], la politique officielle des autorités d’occupation est de chercher à donner de l’occupation l’image d’un univers artistique et de savoir, et pour cela, elles ne cessent d’inviter artistes et sommités académiques », fait observer le communiqué.

Piqué au vif, l’artiste plasticien et vidéaste Mohamed El Baz, un des participants à la biennale de Jérusalem rétorque dans une déclaration donné au site Le360 : « Pourquoi ai-je voulu participer à cette exposition ? Parce que si on refuse [...], alors on accepte de fait cette histoire d’annexion, on accepte de fait que Jérusalem est la capitale d’Israël et pas celle de la Palestine. Donc, oui, il faut y être ! Y aller, c’est une manière de dire : je sais où je mets les pieds, je sais d’où je viens et je sais pourquoi je suis là. C’est quelque chose qui me concerne. »

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