EXCLUSIF : La mission secrète des Émirats arabes unis en Iran
Tahnoun ben Zayed, le conseiller à la sécurité nationale des Émirats arabes unis (EAU) et frère cadet du prince héritier, s’est rendu ce weekend à Téhéran pour une mission secrète visant à désamorcer la crise du Golfe, a appris à Middle East Eye une source bien placée dans le secteur de la sécurité émirati.
Cette mission secrète de Thanoun marque la rencontre au plus haut niveau entre les deux parties depuis que la crise a éclaté.
Elle fait suite à plusieurs signes indiquant que les EAU suivent leur propre ligne de conduite, moins dure qu’auparavant, vis-à-vis de Téhéran, après l’attaque de quatre pétroliers (dont deux saoudiens et un des Émirats) au large du port émirati de Fujaïrah plus tôt cette année.
Bien que l’amiral Michael Gilday, chef de l’état-major de la marine américaine, ait déclaré que les renseignements avaient conclu que le Corps des gardiens de la révolution islamique était « directement responsable » de ces attaques, les EAU n’ont quant à eux jamais pointé du doigt l’Iran.
Au contraire, ils ont envoyé des officiers de marine rencontrer leurs homologues en Iran, une visite qui a été annoncée. La mission de ce weekend a en revanche été gardée secrète.
Lorsque le Royaume-Uni, l’Allemagne et la France ont tenté de contrecarrer les efforts américains visant à intensifier la confrontation militaire dans le Golfe, le ministre d’État émirati aux Affaires étrangères Anwar Gargash a salué leurs efforts diplomatiques.
« À chaque occasion, les EAU ont évité le conflit avec l’Iran », a-t-il déclaré. « Nous continuerons à prendre toutes les mesures pour apaiser les tensions et réduire le potentiel d’hostilités. Si nécessaire, nous sommes prêts à agir en légitime défense, mais toujours proportionnellement, judicieusement et avec retenue. Nous cherchons une voie diplomatique et pragmatique pour réduire les tensions et créer une ouverture pour des négociations sérieuses. »
Cette mission secrète intervient au milieu d’un foisonnement de canaux de communication visant à aboutir à des négociations entre l’Arabie saoudite et l’Iran. Les Saoudiens ont demandé au Premier ministre irakien Adel Abdel-Mahdi de transmettre des messages à Téhéran.
Comme l’a révélé MEE le 1eroctobre, Abbas al-Hasnawi, un responsable du bureau du Premier ministre irakien, a confirmé qu’Adel Abdel-Mehdi assurait la médiation entre les dirigeants à Riyad et à Téhéran et avait communiqué les conditions de chaque partie pour des négociations.
Depuis lors, le Premier ministre pakistanais Imran Khan s’est impliqué et doit faire la navette entre Téhéran et Riyad cette semaine.
Deux haut-responsables du gouvernement pakistanais ont confirmé à Reuters que Khan allait à Téhéran pour tenter de désamorcer les tensions entre les deux rivaux, après que le président américain Donald Trump a demandé son aide.
Le mois dernier, en marge de l’assemblée générale de l’ONU, Khan avait déclaré aux journalistes : « Le président Trump m’a demandé si je pouvais apaiser la situation et peut-être parvenir à un autre accord. J’ai donc transmis sa requête [au président iranien Hassan Rohani] et oui, nous faisons de notre mieux. C’est une affaire en cours alors je ne peux pas en dire plus. »
Dernièrement, les EAU ont laissé transparaître plus d’un signe indiquant qu’ils suivaient leur propre voie avec l’Iran. Ils ont annoncé le retrait de leurs troupes au Yémen et ont publiquement soutenu les séparatistes sudistes dans la ville portuaire d’Aden, divisant en deux le pays.
Depuis, leur milice yéménite combat les forces loyales à Abd Rabbo Mansour Hadi, le président yéménite reconnu par la communauté internationale, pour le contrôle du Sud. Les Houthis soutenus par les Iraniens et les séparatistes soutenus par les Émiratis ont participé à un échange de prisonniers, ce qui ne s’est pas produit avec les forces loyales à Hadi.
Vendredi, le Pentagone a déclaré qu’environ 2 000 soldats supplémentaires seraient déployés en Arabie saoudite, ainsi qu’un escadron de chasse, un escadron aérien expéditionnaire et du personnel de défense aérienne. Il s’agira du second envoi de troupes en lien avec les attaques contre les installations pétrolières saoudiennes.
Le Pentagone a précisé qu’il envoyait aussi deux batteries Patriot et un système antimissile Terminal High Altitude Area Defense (THAAD).
« Avec les autres déploiements, cela constitue l’envoi de 3 000 soldats supplémentaires qui a été étendu ou autorisé le mois dernier », indiquait le porte-parole du Pentagone Jonathan Hoffman dans un communiqué.
MEE a contacté le service de presse de l’ambassade des EAU à Londres mais n’avait pas reçu de réponse au moment de la publication.
Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.
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