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« Ce virus est toujours moins douloureux que les bombes » : la crainte du coronavirus s’étend à Idleb 

Dans la dernière enclave de l’opposition syrienne, les médecins et humanitaires tentent de mettre en place des mesures pour protéger la population du COVID-19. Un défi dans cette zone où s’entassent près de 3,5 millions d’habitants, en majorité des déplacés
Une Syrienne pose un masque de protection sur le visage d’une enfant après un atelier animé par la fondation turque d’aide humanitaire (IHH) pour sensibiliser à la nouvelle épidémie de coronavirus dans un camp pour personnes déplacées du village de Kafr Lusin, à la frontière avec la Turquie, dans la province d’Idleb, le 23 mars (AFP)

Plongée dans une crise humanitaire depuis des mois à cause de la guerre et des déplacements massifs de population, l’opposition syrienne, qui gouverne la région d’Idleb, n’a signalé pour l’instant aucun cas de coronavirus dans la zone, tandis qu’un premier cas a été confirmé par les autorités de Damas.

Alors qu’un porte-parole de l’OMS a indiqué à l’AFP que quelque 300 kits de diagnostic devraient être livrés ce mercredi à un laboratoire de la ville d’Idleb, les humanitaires et secouristes des Casques Blancs tentent d’endiguer une possible contamination en désinfectant les tentes et les centres médicaux. 

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Mouna Alfalani et son équipe parcourent les camps de déplacés chaque jour. « On met en place des cliniques mobiles pour les populations qui ne peuvent pas avoir accès à un centre médical. Cela nous permet de vérifier l’état de santé de tout le monde et de détecter les éventuels cas de coronavirus », expliquait-elle à Middle East Eye dans un camp d’Idleb le 13 mars.

Mais la tâche semble immense dans ces camps où les conditions d’hygiène sont catastrophiques depuis plusieurs mois. Comment expliquer aux familles déplacées qu’elles doivent se laver les mains régulièrement quand elles n’ont pas d’eau ? Comment leur expliquer les précautions à prendre quand elles survivent sous des tentes qui tiennent à peine debout ?

Des équipes désinfectent également les parcs restés ouverts afin de limiter les risques de propagation. 

Depuis le 6 mars dernier, l’accord de cessez-le-feu signé entre Ankara et Moscou semble durer. Les secouristes et humanitaires n’ont plus à traiter les conséquences des bombardements aériens, et peuvent donc se consacrer à la gestion de cette nouvelle crise. 

Manque de ressources

Cependant, les médecins de la région sont inquiets. Le docteur Mohamed Abrash travaille à l’hôpital de Bab al-Hawa, à la frontière turque. « Nous avons installé des tentes à l’entrée de l’hôpital afin de contrôler toutes les personnes qui arrivent. Ceux qui seront testés positifs devront être isolés dans une zone particulière du centre médical », précise-t-il à MEE par téléphone.

Selon plusieurs sources, trois cas suspects auraient été placés à l’isolement au sein de l’hôpital d’Atme, au nord d’Alep. Mais comme pour la plupart des médicaments et équipements, les médecins syriens manquent de tout. 

« Nous n’avons pas assez de masques, ni de gants, ni de désinfectant. Nous sommes contraints d’utiliser de l’alcool pour nous laver les mains »

- Mohamed Abrash, médecin

« Nous n’avons pas assez de masques, ni de gants, ni de désinfectant. Nous sommes contraints d’utiliser de l’alcool pour nous laver les mains et du chlore pour décontaminer toutes les surfaces et le matériel », indique le Dr Abrash.

Le docteur Maram Sheikh, ministre de la Santé du gouvernement de transition, qui rassemble l’opposition politique syrienne, se veut néanmoins rassurant.

Les autorités locales affirment suivre les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) afin de prendre les mesures nécessaires de détection. Trois centres de quarantaine ont ainsi été mis en place avec une capacité de vingt lits dans les villes de Salqeen, al-Bab et Darat Izza, aux différentes extrémités de la région. 

L’hôpital d’Afrin, au nord d’Alep, vient d’être fermé pour être désinfecté et servira bientôt de centre de dépistage et de quarantaine. Des affiches ont été installées dans la plupart des lieux publics et des écoles afin de rappeler aux habitants l’importance de se laver les mains et d’éviter tout contact.  

Les frontières avec la Turquie et les zones encore sous contrôle du gouvernement de Bachar al-Assad ont été fermées depuis plusieurs jours. Les malades en situation critique ne peuvent plus être transférés dans les hôpitaux turcs afin d’y être soignés. 

Si cette épidémie devait se répandre dans la région, les dégâts pourraient être terribles. La population souffre déjà de conditions de vie difficiles, tandis que les pathologies cardiaques et respiratoires ne sont plus vraiment soignées depuis de nombreuses années et la population est très fragile. 

Le Dr Abrash résume tristement les choses : « Malgré la gravité de la situation, ce virus est toujours moins douloureux que les bombes russes et du régime qui détruisent nos vies depuis si longtemps. »  

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