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À la veille de l’anniversaire de son indépendance, l’Algérie retrouve les crânes de ses résistants à la colonisation française

La France restitue à l’Algérie les restes de plusieurs résistants algériens tués entre 1840 et 1850 par le corps expéditionnaire français. Un nouveau geste en faveur de l’apaisement des mémoires
Les 24 cercueils à leur arrivée à l’aéroport d’Alger vendredi 3 juillet (Présidence algérienne)
Les 24 cercueils à leur arrivée à l’aéroport d’Alger vendredi 3 juillet (Présidence algérienne)
Par MEE

C’est un nouveau petit pas franchi dans la politique menée par Emmanuel Macron sur le très sensible dossier de « la mémoire » entre la France et l’Algérie. 

Les restes de 24 résistants algériens à la colonisation française, cédés par des collectionneurs au Musée de l’homme à Paris en 1880 où ils se trouvaient jusqu’à maintenant, vont être rapatriés ce vendredi 3 juillet en Algérie.  

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« Dans quelques heures, en début de la journée bénie du vendredi, se posera à l’aéroport international d’Alger Houari Boumedienne un avion de nos forces aériennes transportant les restes mortuaires de 24 chefs de la résistance populaire et leurs compagnons de toutes les contrées d’Algérie », a annoncé le président Abdelmadjid Tebboune lors de la cérémonie de remise de grades et de médailles aux officiers de l’Armée nationale populaire (ANP), à l’occasion du 58e anniversaire de la fête de l’indépendance et de la jeunesse.

La restitution des crânes de ces résistants avait fait l’objet d’une demande officielle de l’Algérie à la France en 2018 et la question avait été soulevée lors d’entretiens entre les plus hautes autorités des deux pays.

Une commission technique composée d’experts algériens avait été mise en place pour procéder à l’identification des crânes de ces résistants algériens.

Le ministre des Moudjahidine (anciens combattants) Tayeb Zitouni avait déclaré en janvier 2019 : « À ce jour, 31 crânes ont été déjà identifiés et l’opération se poursuit. »

Il s’agit d’une « première étape », a souligné le président algérien, qui concerne notamment des chefs très connus : Chérif Boubaghla, mort en 1854, Cheikh Bouziane, chef de la révolte des Zaatchas (dans la région de Biskra), fusillé puis décapité en 1849, ou encore Si Mokhtar ben Kouider al-Titraoui, tous « privés depuis plus de 170 ans du droit naturel et humain d’être inhumés ».

https://www.facebook.com/kitouni.hosni/posts/10223213023610828

L’Algérie devrait aussi récupérer le moulage intégral de la tête de Mohamed ben-Allel ben Embarek, le lieutenant et alter ego de l’émir Abdelkader.

Ce vendredi, des avions militaires algériens en provenance de France vont se poser à l’aéroport international Houari Boumediène avec les restes. Ce retour donnera lieu, selon le site MenaDefense, à un « show aérien ».  « Le rapatriement sera effectué par un Hercules C-130 de l’armée de l’air algérienne qui sera escorté à son retour par une formation de trois chasseurs Sukhoï Su-30. Ce retour donnera lieu à une cérémonie aérienne avec un passage en formation au dessus de la baie d’Alger pour partager avec la population ce moment historique », précise le site.

Sur les réseaux sociaux, l’annonce de la restitution des crânes est accueillie depuis mercredi par des réactions enthousiastes. 

Après avoir qualifié la colonisation de « crime contre l’humanité » pendant qu’il était en campagne présidentielle en 2017, Emmanuel Macron s’était dit « prêt » à restituer les crânes des combattants. « Je souhaite qu’on ravive la relation avec le travail mémorial entre nos deux pays, que la restitution des crânes soit décidée, je la déciderai, je suis prêt », avait-il déclaré en décembre 2017 à un média local. 

En mai 2011, une première pétition lancée par l’archéologue et historien algérien Ali Farid Belkadi avait été lancée pour demander leur restitution. Elle avait été suivie en 2017 par une autre pétition signée par plusieurs intellectuels français et algériens – dont les historiens Benjamin Stora, Mohammed Harbi et Malika Rahal ou encore l’écrivain Didier Daeninckx – qui estimaient qu’il n’avaient « rien à faire » au Musée de l’homme. 

Dans cet appel, les intellectuels précisaient les motivations de leur démarche : « Contribuer à sortir de l’oubli l’une des pages sombres de l’histoire de France, celles dont l’effacement participe aujourd’hui aux dérives xénophobes qui gangrènent la société française. »

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