EN IMAGES : Coup de foudre à Chatila
Trouver le bon endroit pour une séance photo spéciale peut être une mission ardue pour certains couples – mais pas pour Rayan Sokkar, 24 ans, et son fiancé Samih Mahmoud, 23 ans. Rayan était sûre de son choix : elle voulait que leurs photos de fiançailles soient prises dans le camp de réfugiés de Chatila, au Liban.
« Nos camps sont étiquetés comme des lieux sinistres, des points chauds pour toutes sortes d’actes criminels », témoigne Rayan à Middle East Eye. « Je voulais que cela change. Je voulais que les gens comprennent qu’il y a d’autres genres de personnes dans les camps. » (Photo fournie/Omar Ahmad)
Rayan est née et a grandi à Chatila. Samih, qui est originaire du camp de réfugiés de Yarmouk près de Damas, en Syrie, vit à Chatila depuis que sa famille a fui la guerre en Syrie il y a sept ans.
Ces deux Palestiniens se sont rencontrés lors d’un atelier de journalisme organisé dans le camp en 2017. Samih affirme être tombé amoureux dès le début mais qu’il lui a fallu du temps pour convaincre la jeune femme de lui donner une chance car il avait un an de moins qu’elle. Ils ont commencé à se fréquenter en 2018 et cette année, ils ont décidé d’officialiser leur relation. (Photo fournie/Omar Ahmad)
Situé à l’ouest de la capitale du Liban, Beyrouth, le camp de réfugiés de Chatila a été le théâtre du tristement célèbre massacre de Sabra et Chatila en 1982, au cours duquel au moins 1 300 personnes ont été tuées par la milice des Phalanges libanaises sous la supervision de l’armée israélienne.
Bien que créé à l’origine pour les Palestiniens qui ont fui pendant la Nakba, le camp accueille aujourd’hui plus de 20 000 réfugiés d’origines diverses.
Entre logements exigus, ruelles sombres et étroites et câbles électriques dangereusement bas, les conditions de vie dans le camp sont connues pour être difficiles. Depuis quelques années, Chatila se distingue par la présence accrue du trafic de drogue et de gangs violents.
Mais Rayan n’apprécie pas les stéréotypes. « Il y a des mauvaises personnes dans toutes les communautés mais cela ne veut pas dire que nous sommes tous les mêmes », affirme-t-elle. « J’espère que [cette image du camp] va changer. » (Photo fournie/Omar Ahmad)
Rayan a dû se montrer quelque peu persuasive pour que Samih accepte de se prêter à cette séance photo.
« Au début, je n’aimais pas l’idée de Rayan », confie-t-il à MEE. « Je n’aime pas le camp. Je n’aime pas le fait que nous ayons été forcés de vivre ici […] J’ai hésité à me lancer parce que j’étais inquiet de la réaction de notre communauté. Mais ensuite, Rayan m’a expliqué le message derrière le choix du lieu. Finalement, elle m’a fait changer d’avis. »
« Mon père non plus n’appréciait pas du tout cette idée », ajoute Rayan. « Il voulait que je prenne les photos dans un endroit plus agréable. Il a essayé de me dire que le camp ne nous ressemblait plus, mais j’ai insisté pour aller au bout de mon idée. »
Samih raconte que presque aucun de ses amis n’approuvait l’idée et que même sa mère se moquait d’eux. « Quand nous avons posé pour les photos, ma mère se tenait sur le balcon et nous a dit : “Vous êtes un couple tellement drôle”. » (Photo fournie/Omar Ahmad)
Samih raconte en riant que les enfants les suivaient pendant que le photographe Omar Ahmad les prenait en photo, alors que tous ceux qui les voyaient passer dans le camp se mettaient à rire.
« Ils ont changé d’avis après la publication des photos », précise-t-il.
Diffusées au début du mois, les photos de fiançailles de Rayan et Samih ont fait sensation et ont été reprises par plusieurs publications en langue arabe.
« Tous ceux que nous connaissons ont partagé les photos, même des gens qui savent très peu de choses sur les camps », affirme Rayan. « Je suis heureuse que nous ayons réussi à surmonter les frontières géographiques et les stéréotypes sociaux autour de nos camps. »
« Désormais, davantage de gens savent que nous sommes des personnes ordinaires avec des rêves et des vies ordinaires, et que les camps sont comme les autres communautés qui les entourent, où les bonnes et les mauvaises personnes coexistent. » (Photo fournie/Omar Ahmad)
Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.
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