Les réseaux parisiens des Émirats arabes unis se mobilisent pour Haftar
Les Émirats arabes unis (EAU) s’activent à travers leurs « amis » du gotha parisien pour porter à bout de bras l’option Khalifa Haftar alors que ce dernier subit revers militaires et diplomatiques sur le terrain libyen.
Ainsi, la lettre confidentielle Africa Intelligence révèle que « ce sont les autorités émiraties qui ont réglé la note du dîner de presse organisé le 21 septembre par la revue Politique internationale au Prince-de-Galles autour du thème ‘‘La Libye, poudrière au cœur de la Méditerranée’’ ».
« L’événement était copiloté par Mezri Haddad, ex-ambassadeur de Tunisie à l’UNESCO, devenu l’un des plus fervents relais d’Abou Dabi – et le plus virulent critique de Doha – à travers son Centre international de géopolitique et de prospective analytique [CIGPA] », précise Africa Intelligence.
L’enthousiasme de Pierre Lellouche
Mezri Haddad n’est pas un inconnu à Paris ni sur la scène arabe. Très critique envers le Printemps arabe – qu’il qualifie de « Sykes-Picot 2 » – et le soulèvement en Tunisie de 2011 ( « coup d’État islamo-atlantiste allumé par les fameux jeunes cybercollabos », selon son dernier post Facebook), cet universitaire mène une campagne virulente contre l’islam politique, les Frères musulmans et l’influence du Qatar.
On apprend aussi que c’est l’ex-secrétaire d’État au commerce, Pierre Lellouche (ex-membre du groupe parlementaire d’amitié France-Émirats arabes unis aux côtés de Jean-Yves Le Drian), qui a animé cette soirée. Pierre Lellouche était également le sherpa de l’ex-président Nicolas Sarkozy aux EAU.
L’ex-député Pierre Lellouche, à l’occasion de ce dîner, a « glissé plusieurs compliments à l’endroit du prince héritier d’Abou Dabi, Mohammed ben Zayed [MBZ], entre deux dénonciations des visées expansionnistes de Recep Tayyip Erdoğan en Méditerranée et en Libye ».
« L’engagement » de l’ex-ministre ne semble pas désintéressé. Reconverti dans le consulting, Pierre Lellouche, qui a fondé son cabinet Lixbus, « pourra chercher à accompagner les entreprises tricolores cherchant des débouchés dans l’ex-Jamahiriya [Libye] ».
Le jet privé de Haftar à Paris
Le magazine Politique internationale, dirigée par Patrick Wasjman, avait même décerné le « prix du courage politique » à Khalifa Haftar en juin dernier.
« [Haftar] mène dans son pays un combat décisif contre le terrorisme islamiste et contre le régime des Frères musulmans basé à Tripoli et soutenu militairement par le président turc Erdoğan », avait déclaré Patrick Wajsman, ajoutant que « c’est la cause qu’incarne Haftar qui se trouve ainsi récompensée. Un choix dicté également par le péril que représenterait pour l’Europe une implantation turque durable sur la rive méridionale de la Méditerranée ».
« Cet activisme intervient alors que les partisans du maréchal tentent d’organiser sa venue à Paris pour lui permettre d’y retrouver des soutiens. La France, qui l’a longtemps soutenu, a rééquilibré sa position en faveur de Tripoli après que l’ANL [autoproclamée Armée nationale libyenne dirigée par Haftar] a été contrainte de se retirer de l’ouest du pays, en avril », relève Africa Intelligence.
« Aucune date n’a encore été fixée, mais un jet privé régulièrement utilisé par Khalifa Haftar et son entourage a effectué un aller-retour entre Benghazi et Paris, les 20 et 22 septembre », conclut la lettre confidentielle.
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