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« Un seul héros le peuple » pour explorer le « Dien Bien Phu politique » de la guerre d’Algérie

Un site, un livre et un film reviennent sur les manifestations anticoloniales du 11 décembre 1960 en Algérie, analysant le dispositif militaro-policier français face aux soulèvements populaires  
Des parachutistes français dispersent une manifestation d’Algériens à Alger, le 11 décembre 1960 (AFP)
Des parachutistes français dispersent une manifestation d’Algériens à Alger, le 11 décembre 1960 (AFP)
Par MEE

Il y a 60 ans, les manifestations du 11 décembre 1960 en Algérie marquaient un tournant dans le combat anticolonial, six ans après le déclenchement de la lutte armée.  

Ces manifestations populaires enracinèrent le soutien de la population algérienne au Front de libération national (FLN) et à son aile politique, le Gouvernement provisoire de la république algérienne (GPRA).

Parties d’Alger et de ses quartiers populaires, elles embrasèrent l’ensemble du pays avant d’être réprimées dans le sang par l’armée et la police françaises, avec plus de 250 morts.

C’est sur ce soulèvement que revient le projet Un seul héros le peuple qui intègre un site web, un ouvrage et un film, fruit d’une recherche sociohistorique de près de sept ans menée par le chercheur Mathieu Rigouste, scrutateur engagé de l’évolution de la doctrine française de contre-insurrection, « cette forme de ‘’guerre dans la population’, modernisée et industrialisée par l’État français en Indochine et en Algérie puis commercialisée dans de nombreux pays, jusqu’à devenir un marché mondial », pour reprendre le chercheur. 

« Largement ignorés par l’historiographie, les soulèvements de décembre 1960 passionnent et déconcertent des deux côtés de la Méditerranée. Ceux qui les ont vécus n’aspirent généralement qu’à transmettre leurs souvenirs », précise l’initiateur de ce projet, dont Un seul héros le peuple est le premier film.

Au-delà de la quête historique, ce projet « est aussi une sorte de quête généalogique personnelle, sur les traces de mes grands-­parents juifs algériens », explique Mathieu Rigouste dans la présentation du projet.

« À la recherche d’historiens et de témoins, j’ai rencontré des jeunes, des femmes, des anciens qui m’ont toujours accueilli en fils, frère, cousin ou ami. Nous avons parlé de décembre 1960, de la colonisation et de la guerre de libération mais aussi d’aujourd’hui. Il semble que cette histoire suture des plaies de part et d’autre de la mer et de la guerre. »

Remonter aux racines de l’insurrection

« Les insurgés d’hier partagent avec nous des plans de fuite, des techniques de sabotage, des feintes de corps. Une femme explique comment elle fabriquait des drapeaux secrètement et depuis si longtemps, comment le peuple se préparait à surgir. D’autres nous révèlent ce qui selon eux a permis de déclencher l’insurrection de la Casbah d’Alger. On nous confie par où se sont échappés ceux qui ont brûlé le Monoprix de l’Aqiba [quartier populaire d’Alger] et comment des cortèges de femmes ont enfoncé des barrages de soldats », poursuit Mathieu Rigouste, qui a aussi rencontré des historiens pour remonter aux racines de l’insurrection.  

Mathieu Rigouste : « Décembre 1960 s’inscrit dans la longue histoire des crimes coloniaux »
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« J’ai pris conscience qu’il y avait un tissu d’histoires cachées, du point de vue du massacre qui avait eu lieu alors, mais également du point de vue de l’engagement des classes populaires. Il y avait urgence à les faire témoigner, ne serait-ce qu’en raison de leur âge. Il s’agissait aussi de recueillir cette parole qui n’avait pas été entendue », avait déclaré Mathieu Rigouste à Middle East Eye.  

Pour le chercheur, décembre 1960 est « le ‘’Dien Bien Phu politique’’ de la guerre d’Algérie, une clef indispensable pour saisir le dénouement de la révolution algérienne mais aussi pour penser la place du ‘’peuple’’ et de la violence dans les sociétés contemporaines ».

On peut regarder ce film jusqu’au 15 décembre sur unseulheroslepeuple.org, en attendant des projections publiques ou privées et des débats en salle ou en streaming, comme le souhaite Mathieu Rigouste.

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