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France : aux urgences, il vaut mieux être un homme blanc qu’une femme noire, selon une étude

Une enquête menée auprès de 1 500 soignants en France, Belgique, Suisse et à Monaco montre que la prise en charge aux urgences peut varier selon le sexe et l’origine ethnique des patients
Les hommes sont pris plus au sérieux (à 62 % des cas) que les femmes (49 %), et le cas est jugé moins grave quand la personne est noire : 47 % des patients noirs ont été jugés en urgence vitale contre 58 % pour les patients blancs (AFP/Sébastien Bozon)
Les hommes sont pris plus au sérieux (à 62 % des cas) que les femmes (49 %), et le cas est jugé moins grave quand la personne est noire : 47 % des patients noirs ont été jugés en urgence vitale contre 58 % pour les patients blancs (AFP/Sébastien Bozon)
Par MEE

« L’idée, c’était de montrer que […] vivre dans une société où il y a du racisme et du sexisme, ça touche tout le monde, même ceux qui n’en ont pas conscience. »

Xavier Bobbia est chef des urgences au CHU de Montpellier. Il a coordonné une étude publiée en décembre dans la revue internationale European Journal of Emergency Medicine, qui montre qu’avec les mêmes symptômes, selon notre sexe ou notre origine ethnique, on ne suscite pas les mêmes réactions chez les soignants.

L’enquête a été menée auprès de 1 500 soignants dans des services d’urgence en France, en Belgique, en Suisse et à Monaco. On leur a présenté des photos de femmes et d’hommes de couleur de peau différente (générées par intelligence artificielle), accompagnées de la description d’un même cas clinique (une douleur thoracique qui pourrait être le signe d’un infarctus). Face à ces images, il leur a été demandé de coter la priorité à l’accueil des urgences de 1 à 5.

C’est ainsi que la plupart des médecins établissent leur diagnostic, sur un modèle appelé « diagnostic intuitif ».

« Ils sont mis devant des situations toute la journée, toute l’année, et au final […] quand ils se retrouvent face à des [cas] similaires, ils arrivent à établir des diagnostics sans même comprendre le cheminement qu’ils font pour y arriver, comme l’intuition en général », explique Xabier Bobbia au micro de France Bleu Hérault.

Priorité aux Maghrébins

Cette étude confirme que les préjugés sexistes et racistes impactent bien le diagnostic.

Les hommes sont pris plus au sérieux (à 62 % des cas) que les femmes (49 %), et le cas est jugé moins grave quand la personne est noire : 47 % des patients noirs ont été jugés en urgence vitale contre 58 % pour les patients blancs.

« Cela peut avoir des conséquences, surtout sur les délais de prise en charge », conclut Xavier Bobbia.

Concernant l’origine ethnique en particulier, l’apparence nord-africaine a été jugée comme ayant plus d’urgences vitales (61 %) que l’apparence blanche (58 %), asiatique du sud-est (55 %) et noire (47 %).

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« Si l’on examine la géographie des facteurs de risque cardiovasculaire, l’Afrique du Nord, l’Asie centrale et l’Europe centrale présentent le risque le plus élevé par rapport à l’Afrique subsaharienne. On pourrait supposer un biais représentatif chez les répondants en fonction de leur expérience clinique », précise l’étude.

Dans de nombreux pays, dont la France, des études ont déjà montré que l’accès aux soins, dont la rapidité de prise en charge des patients, dépend de leur origine ethnique et de leur sexe.

En 2018, un collectif d’associations avait publié une enquête révélant des cas de discriminations dans toute la chaîne des urgences, du SAMU à l’hôpital.

Le rapport faisait état du « syndrome méditerranéen largement diffusé dans le corps médical ». Une théorie selon laquelle les personnes d’origine maghrébine auraient tendance à exagérer leur douleur et qui leur vaudrait d’être moins prises au sérieux quand elles décrivent leurs symptômes.

En 2020, une autre étude de l’Institut national d’études démographiques avait révélé que certains patients, ayant eu le sentiment « d’avoir été moins bien traités que les autres », renonçaient à des soins pour ne plus subir d’attitudes jugées vexatoires.

Les discriminations justifiaient ainsi 32 % de ces renoncements chez les Africains subsahariens, 26 % chez les musulmans, 22 % chez les Nord-Africains et 13 % chez les Ultramarins.

Quant aux femmes, l’enquête montrait qu’elles faisaient plus souvent état que les hommes d’un « refus de service » ou d’une « qualité de soins inférieure ». Les discriminations étaient invoquées une fois sur six (17 %) comme raison de l’abandon des soins par les femmes.

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