France : vers l’adoption d’une loi pour renforcer la réponse pénale aux infractions à caractère raciste ou antisémite
Tandis que « chaque année, 1,2 million de victimes subissent une discrimination ou une atteinte à caractère raciste ou antisémite », prévient un rapport rédigé par le député Mathieu Lefèvre (Renaissance, le parti d’Emmanuel Macron), l’Assemblée nationale débat depuis ce mardi d’une nouvelle loi qui propose de renforcer la réponse pénale contre les infractions à caractère raciste.
Le texte se base sur un constat : entre 2016 et 2023, les atteintes à caractère raciste, xénophobe ou antireligieux ont augmenté en France de plus de 56 %. En dehors d’une stabilisation due au covid-19 en 2020 et d’un reflux léger et hélas passager en 2022, ces atteintes augmentent ainsi chaque année.
🔴 Renforcer la réponse pénale contre les infractions à caractère raciste ou antisémite
— Assemblée nationale (@AssembleeNat) March 6, 2024
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Depuis l’attaque du Hamas en Israël le 7 octobre, qui a entraîné la mort d’au moins 1 160 personnes, et la riposte d’Israël à Gaza, qui a tué depuis plus de 30 000 Palestiniens, le nombre d’actes antisémites est passé, selon le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), qui a croisé des données du ministère de l’Intérieur et du Service de protection de la communauté juive (SPCJ), de 436 en 2022 à 1 676 en 2023. Et 57,8 % de ces actes ont porté atteinte à des personnes.
Le rapport de Mathieu Lefèvre ne le précise pas mais en 2023, le ministère de l’Intérieur a également relevé une hausse des actes antimusulmans. Parmi les 242 faits recensés, plus de la moitié ont été commis au cours des trois derniers mois de l’année, a rapporté le ministre, qui y voit un lien avec l’attaque du Hamas – et la subséquente offensive israélienne à Gaza – et admet que ces actes sont « manifestement encore sous-estimés ».
Selon le texte, l’une des raisons de l’explosion des infractions à caractère raciste ou antisémite est « la démocratisation toujours plus grande des réseaux sociaux et la désinhibition de plus en plus importante de certains de leurs utilisateurs ».
Il apparaît d’ailleurs que les Français auraient tendance à être davantage violents sur les réseaux sociaux que leurs voisins européens, selon un rapport du réseau social X (ex‑Twitter) sur le contrôle de ses contenus.
Des amendes allant jusqu’à 3 750 euros
Même si un nouveau plan national de lutte contre le racisme, l’antisémitisme et les discriminations liées à l’origine a été mis en place en mars 2023, le rapporteur souligne que deux mesures de ce plan nécessitent l’intervention d’un législateur, pour « sanctionner les auteurs, au pénal, en civil et en disciplinaire », et « renforcer l’efficacité de la réponse pénale », qui comprend deux propositions principales.
La première : prévoir la circonstance aggravante en cas d’infractions à caractère raciste ou antisémite non publiques commises par des personnes dépositaires de l’autorité publique ou chargées d’une mission de service public.
La seconde : donner la possibilité à un tribunal de décerner un mandat d’arrêt contre le prévenu pour permettre l’exécution des peines d’emprisonnement en cas de condamnations à caractère raciste ou antisémite, pour contestation de crime contre l’humanité ou apologie de crime contre l’humanité ou de crime de guerre.
Dans son article 1, la proposition de loi propose d’élargir « à l’apologie de crimes et à la contestation de crimes contre l’humanité des délits pouvant faire l’objet d’un mandat de dépôt ou d’arrêt délivré par le tribunal correctionnel ».
Pour justifier cette mesure, Mathieu Lefèvre cite dans son rapport la condamnation de l’essayiste d’extrême droite Alain Soral à un an d’emprisonnement pour contestation de crime contre l’humanité (la Shoah). Sauf qu’en l’absence de mandat de dépôt, l’essayiste n’est jamais allé en prison. Cela n’aurait pas été le cas avec la loi débattue.
Autrement dit, un tribunal pourrait émettre un mandat d’arrêt ou de dépôt contre quiconque se rendrait coupable d’une infraction grave à caractère antisémite, raciste ou discriminatoire.
Cette possibilité est réservée aux délits de droit commun ou d’ordre militaire alors que les délits d’apologie des crimes contre l’humanité ou le négationnisme, qui ne font partie ni de l’un ni de l’autre, sont punis par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.
Un autre point concerne le niveau d’infraction retenu pour la provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence, la diffamation et l’injure non publiques à caractère raciste ou discriminatoire.
Actuellement, ce sont des contraventions, mais la proposition de loi entend les transformer en délit, ce qui permettrait des amendes allant jusqu’à 3 750 euros.
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