Syrie : prolongation de la trêve malgré des violations et le blocage de l'aide humanitaire
Ce mercredi, la Russie et les États-Unis se sont déclarés favorables à une prolongation de 48 heures du cessez-le-feu sur tout le territoire syrien en dépit des désaccords entre les parties belligérantes et les craintes sur les retards des livraisons d’aides humanitaires au deuxième jour du cessez-le-feu.
La trêve négociée la semaine dernière entre la Russie et les États-Unis, prévoyait initialement un cessez-le-feu de deux jours, amené à être étendu à sept jours. Les Russes et les Américains devant ensuite discuter la mise en place d’une commandement commun pour cibler les groupes considérés comme terroristes par les deux camps, ce qui inclut le groupe État islamique (EI) et le Front al-Nosra renommé récemment Fateh al-Sham.
Le Département d'État américain a déclaré que John Kerry s'était entendu avec son homologue russe pour prolonger la trêve.
Un peu plus tôt dans la journée, un officier russe de haut rang, Viktor Poznikhir, lors d’un point presse diffusé à la télévision d’État, avait annoncé que l'extension du cessez-le-feu serait adoptée malgré une soixantaine de violations par les rebelles depuis l'entrée en vigueur de la trêve lundi.
« Nous avons aussi noté que des groupes contrôlés par les États-Unis, comme Ahrar al-Sham, ont ouvertement annoncé leur volonté de ne pas respecter le cessez-le-feu », a-t-il ajouté. « Le plus grand nombre de violations de la trêve est associé à ces groupes. »
L'Observatoire syrien des droits de l'homme, organisme de surveillance basé au Royaume-Uni, a affirmé de son côté que des forces pro-Assad avaient bombardé deux villages dans la province située au sud d'Alep ainsi qu'une zone en périphérie de Damas, mais n'a fait état d'aucun décès ou blessure.
Les États-Unis ont confirmé ces infractions mais ont indiqué s'attendre à ce que le cessez-le-feu général tienne.
L'envoyé spécial des Nations unies pour la Syrie, Staffan de Mistura a salué ce qu'il considère comme une « baisse conséquente de la violence » dans toute la Syrie.
Il a relevé que plusieurs rapports signalaient encore des conflits, en particulier lundi soir, mais qu'au lever du jour mardi, dans l'ensemble, la situation était bonne.
Côté américain, un officier de haut rang a déclaré au Guardian que ni le gouvernement syrien, ni les forces kurdes d’opposition ne s’étaient retirées de Castello Road, la route d’approvisionnement vers l’est d’Alep, un point clé de l’accord. Selon lui, Washington essaie de faire le maximum pour assurer au convoi humanitaire de l’ONU un passage sécurisé.
« Nous avons passé l’essentiel de la journée à faire pression sur les Russes et, à travers eux, sur le régime syrien. Les Nations unies voulaient s’assurer que le régime et l’opposition laisser traverser librement et sans menace les camions. »
Les Nations unies n'ont apporté aucune aide aux civils syriens dans le besoin tout au long du premier jour du cessez-le-feu négocié par les États-Unis et la Russie, en raison de problèmes de sécurité, selon les explications données par les officiels mardi.
Les Casques blancs syriens, qui mènent des opérations de sauvetage en Syrie, ont accusé le gouvernement ou ses alliés d'avoir poursuivi leurs frappes après l'entrée en vigueur du cessez-le-feu et ont publié une vidéo filmant des opérations de sauvetage qui se seraient déroulées après le commencement de la trêve.
« Baisse conséquente de la violence »
Reste encore à savoir si les parties belligérantes permettront que l'aide humanitaire atteigne la population civile victime des combats en Syrie.
Ce mercredi, deux convois d’aide humanitaire qui ont traversé la frontière turque pour rejoindre en Syrie la ville assiégée d’Alep se sont retrouvés à attendre dans un no man’s land.
Les convois, comprenant chacun vingt camions transportant pour la plupart de la nourriture et de la farine, sont entrés mardi en Syrie par la ville de Cilvegozu, frontalière avec la Turquie, à 40 km à l’ouest d’Alep. Ils se sont avancés un peu plus loin que le poste de contrôle douanier turc. Un officiel turc a déclaré qu’aucun autre camion n’était supposé traverser la frontière mercredi jusqu’à ce que la situation s’éclaircisse.
Mardi, l’envoyé spécial des Nations unies pour la Syrie, Staffan de Mistura, a précisé que les Nations unies attendaient toujours que Damas leur délivre les papiers pour autoriser la livraison des aides humanitaires.
« Les choses prennent un peu plus de temps que ce que nous espérions », a déclaré David Swanson, le porte-parole du Bureau de coordination des affaires humanitaires de l'ONU (OCHA). Il a précisé que vingt camions des Nations unies attendaient à la frontière, « prêts à démarrer ».
Le cessez-le-feu, en vigueur depuis lundi, exige que des passages sécurisés soient assurés pour les cargaisons d’aide humanitaire dans toutes les zones de la Syrie. Il stipule que le gouvernement syrien soit informé – et non pas qu’il délivre des autorisations – de l’acheminement de l’aide par camions dans les zones aux mains des rebelles.
Le gouvernement syrien a averti mardi que toute aide destinée à la ville d'Alep, en particulier l'aide envoyée par la Turquie, devait être coordonnée conjointement avec Damas et les Nations unies.
« En réponse à la déclaration du régime turc concernant son intention d'envoyer de l'aide soi-disant humanitaire à Alep, la République arabe syrienne s'oppose à l'entrée de toute aide humanitaire à Alep, en particulier en provenance du gouvernement turc, si elle ne fait pas l'objet d'une coordination avec le gouvernement syrien et les Nations unies, » a prévenu le ministre des Affaires étrangères.
L’impasse dans laquelle semble se trouver l’aide humanitaire complique un peu plus la trêve déjà fragile négociée entre Washington et Moscou.
La semaine dernière, 73 ONG en Syrie ont annoncé qu’elles cessaient toute collaboration avec les Nations unies en raison de ses rapports étroits avec Damas, et ont demandé une enquête sur le travail de l'ONU en Syrie.
Traduit de l'anglais (original) par StiiL.
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