Le ministre des Affaires étrangères libanais critiqué pour des remarques anti-réfugiés
Au moment où Donald Trump Jr compare les réfugiés syriens à des Skittles, le ministre des Affaires étrangères du Liban Gebran Bassil veut leur vendre des pommes.
« J’ai parlé à de nombreux États et organisations internationales… Je suis plus convaincu aujourd’hui que la seule façon de vendre la récolte de pommes du Liban est de contraindre les organisations [d’aide aux] réfugiés à les acheter », a tweeté jeudi Bassil, qui assistait à l’Assemblée générale des Nations unies à New York.
Quelques jours plus tôt, Bassil avait écrit sur Twitter qu’il soutenait le droit des Libanaises à transmettre leur nationalité à leurs maris et leurs enfants, sauf si elles sont mariées à un Palestinien ou à un Syrien, afin de préserver les terres du Liban.
Si une Libanaise est mariée à un étranger, ses enfants ne sont pas considérés libanais, même s’ils sont nés dans le pays. En revanche, les enfants et les conjointes des Libanais se voient automatiquement accorder la citoyenneté.
Trois lois qui permettraient d’assurer l’égalité des sexes ont été proposées au parlement libanais entre 2010 et 2013. Les législateurs ne les ont même pas mises au vote.
Permettre aux enfants et conjoints des Libanaises d’acquérir la citoyenneté ouvrirait la porte à la naturalisation des réfugiés palestiniens par le mariage, et altérerait le délicat équilibre sectaire du pays.
Le Liban abrite des centaines de milliers de Palestiniens déplacés, qui vivent pour la plupart dans des camps miséreux. En outre, depuis 2011, plus d’un million de personnes ont fui vers le Liban depuis la Syrie.
Le gouvernement libanais attribue des postes en fonction de l’appartenance religieuse. Par exemple, le président doit être chrétien maronite, le Premier ministre est sunnite et le président du parlement est chiite.
La brusquerie de Bassil a choqué les activistes et les utilisateurs des réseaux sociaux libanais.
Traduction : « C’est une honte que notre représentant à l’étranger soit une personne raciste, sectaire et inintelligente. C’est une honte qu’il soit ministre. Pour commencer, il ne devrait pas être dans le monde de la politique. Bassil doit démissionner. » – Angie Kabbara (@anjiekab)
Le ministre des Affaires étrangères est le beau-fils du candidat à la présidence Michel Aoun, un ancien général allié avec le Hezbollah. Plus tôt cette année, Bassil est devenu le leader du Courant patriotique libre, un parti politique à prédominance chrétienne fondé par Aoun.
Lebanese Women’s Right to Nationality and Full Citizenship, un groupe de défense des femmes, a condamné les remarques de Bassil, affirmant que le ministre des Affaires étrangères prive les femmes de leurs droits civils.
« Nous sommes révulsés par toutes ces insultes, cette agressivité et ce mépris pour l’intelligence des gens », a déclaré l’organisation dans un communiqué. « Les Libanaises ne font-elles pas partie de notre peuple ? Leurs enfants ne sont-ils pas nos enfants ? »
Mario, un activiste politique libanais qui n’a pas souhaité donné son nom par crainte de harcèlement de la part des partisans de Bassil, a déclaré que les remarques du ministre des Affaires étrangères étaient misogynes.
« Il identifie qui les femmes doivent épouser et qui elles ne devraient pas », a déclaré Mario à Middle East Eye par courriel.
Mario a affirmé que Bassil est sectaire et n’incarne pas les principes chrétiens, notant que St Maron, le fondateur de l’église maronite dont Bassil est un fidèle, était Syrien.
Le tweet de Bassil a provoqué un tollé sur les réseaux sociaux. Un hashtag arabe appelant à sa démission a rassemblé des centaines de tweets.
« Les Palestiniens et les Syriens honorent le monde entier. Vous n’avez pas d’éthique. Vous n’êtes pas humain. Votre racisme ne représente pas le peuple libanais », a écrit à Bassil Mohammad Alqadi, un utilisateur de Twitter.
Cependant, certaines personnes sont venues à la rescousse du ministre.
« Le nombre de réfugiés est plus grand que le peuple d’origine dans un petit pays dont les ressources sont limitées. Les accusations de racisme sont rejetées », a écrit Claudette Hayeck, utilisatrice de Twitter.
Les activistes se sont surtout moqués de la proposition de Bassil concernant la récolte des pommes.
« Pour obtenir la citoyenneté, combien de kilos de pommes faut-il acheter ? » a demandé sur Twitter Fakher al-Ayoubi.
Traduction : « Gebran Bassil dirait : une pomme par jour éloigne le réfugié » – Tee Owe (@tee_owe)
Le journal arabe al-Akhbar a comparé le ministre des Affaires étrangères libanais à Donald Trump.
« Cette rhétorique raciste est injuste pour les Libanaises et les empêche de jouir de leurs droits fondamentaux avec leurs enfants depuis des décennies », a écrit le personnel du journal.
Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.
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