Derrière le boycott de Foxtrot, l'ombre de la ministre israélienne de la Culture
L'ambassadrice d’Israël en France ne participera pas à la soirée d'ouverture du festival du cinéma israélien, qui se tiendra du 13 au 20 mars à Paris, en raison de la diffusion du film controversé Foxtrot, a annoncé dimanche le ministère des Affaires étrangères d’Israël.
L'ambassade « a suggéré à la direction du festival de choisir un film qui ne suscite pas la controverse pour sa soirée d'ouverture mais à la suite de son refus, le ministère a décidé que l'ambassadrice ne sera pas présente à cette soirée », a-t-il affirmé dans un communiqué.
Dans Foxtrot, le réalisateur israélien Samuel Maoz revient sur son expérience de soldat à travers une histoire de deuil. Le film, qui a obtenu l'an dernier le Lion d'argent Grand Prix du Jury à la Mostra de Venise et le prix de l’Académie israélienne du film, était aussi candidat aux Oscars dans la catégorie du meilleur film étranger. Il n’a finalement pas été retenu dans la dernière sélection.
« Foxtrot montre le traumatisme du soldat israélien qui a commis une erreur tragique, qu’il aurait préféré ne jamais commettre, tout en désignant le civil palestinien comme la véritable victime du drame qui se joue dans un check-point. Le film présente le prix élevé de l’occupation militaire israélienne payé de part et d’autre du conflit », expliquait Raya Morag, professeur d’études du cinéma à l’Université hébraïque de Jérusalem, dans un entretien au magazine Télérama, en décembre dernier.
En janvier, la ministre israélienne de la Culture Miri Regev, membre du Likoud, le parti de droite au pouvoir en Israël, s’en était réjouie. « Cette décision nous a épargné une déception amère et une représentation mensongère dans le monde de l'armée israélienne », avait-elle affirmé en accusant le film de prêter le flanc à une accusation de « meurtre rituel » à l'encontre de soldats israéliens.
Tout en admettant ne pas avoir vu le film, la ministre avait aussi expliqué que sa colère n'était pas liée à des questions artistiques mais à l'image d'Israël qu'il projette à l'étranger. « Un film qui présente des soldats israéliens de manière trompeuse comme des assassins et porte atteinte à la renommée des Forces de défense israéliennes ne peut pas représenter Israël. »
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Miri Regev entretient des relations tumultueuses avec le monde artistique israélien et s'en prend régulièrement à l'élite culturelle, largement ancrée à gauche.
L’an dernier au Festival de Cannes, elle avait provoqué une polémique en montant les marches dans une robe longue ivoire représentant un vaste panorama de Jérusalem. Il s'agissait pour elle de justifier l'annexion de Jérusalem-Est, le secteur palestinien de la ville occupé par Israël depuis 1967.
En janvier, elle s’était retrouvée au cœur d’une nouvelle controverse après avoir posté une vidéo d'elle au milieu de supporters de l'équipe de football du Beitar Jerusalem lors d'un match contre le club arabe israélien de Sakhnin, du nom d'un village du nord. Durant la rencontre à Jérusalem, des supporters du Beitar auraient chanté « Nous allons brûler leur village » à l'adresse de l'équipe adverse.
Traduction : « La ministre israélienne de la Culture et des Sports a posté une vidéo où on la voit lors d’un match de football en Israël, entourée de supporters en train de chanter des chants génocidaires contre l’équipe arabe. 50 ans à occuper et à réprimer une population indigène a vraiment fait d’Israël une société malade »
« L'ambassade d'Israël en France est fière de soutenir le festival du cinéma israélien à Paris depuis sa création il y a dix-huit ans et n'a pas l'habitude de se mêler du choix des films diffusés durant le festival », a néanmoins précisé le communiqué du ministère.
Le réalisateur Samuel Maoz avait affirmé en septembre 2017 qu'il critiquait l'endroit où il vivait « parce que je me fais du souci, parce que je veux le protéger, je le fais par amour ».
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