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Gaza : deux mois après la guerre, l’enclave palestinienne reste paralysée

Les restrictions israéliennes sur les importations entravent les efforts de reconstruction et font grimper le chômage à Gaza. Cela entraînera-t-il une nouvelle flambée des hostilités ?
Une femme attend de recevoir des fonds pour reconstruire sa maison, l’une des quelque 18 000 habitations endommagées ou détruites au cours des combats à Gaza en mai 2021 (SOPA Images/Nidal Alwaheidi via Reuters)
Une femme attend de recevoir des fonds pour reconstruire sa maison, l’une des quelque 18 000 habitations endommagées ou détruites au cours des combats à Gaza en mai 2021 (SOPA Images/Nidal Alwaheidi via Reuters)
Par Adam Khalil à GAZA, Territoires palestiniens occupés

Deux mois après la conclusion par Israël et le Hamas d’un cessez-le-feu marquant la fin d’un conflit de onze jours qui a fait 248 morts dans la bande de Gaza et 13 en Israël, la vie est restée au point mort pour beaucoup dans l’enclave palestinienne sous blocus.

Les deux millions de Palestiniens qui vivent à Gaza sont toujours confrontés à de sévères restrictions israéliennes sur l’entrée de marchandises dans le territoire exigu, ce qui provoque une récession économique majeure et rend la reconstruction impossible.

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Si la médiation égyptienne a permis de mettre un terme au massacre et aux destructions, les efforts du Caire n’ont pas encore contribué à ramener la situation à Gaza à son niveau d’avant-guerre, à savoir un statu quo déjà précaire et tendu pour ses habitants, qui vivent déjà depuis quatorze ans sous un siège orchestré par Israël. 

Face à l’insistance d’Israël à lier la question des importations et de la reconstruction à la libération de quatre Israéliens soupçonnés d’être retenus par le Hamas, les analystes sont partagés quant à savoir si la paralysie qui touche actuellement Gaza pourra nourrir une nouvelle confrontation.

Des efforts de reconstruction en suspens

Les responsables à Gaza dénoncent les effets négatifs des restrictions israéliennes strictes sur tous les aspects de la vie dans le territoire palestinien assiégé, qui ont entraîné une hausse sans précédent des taux de pauvreté et de chômage.

« Israël ne laisse passer que 30 % de la quantité de marchandises et de produits de base qui entraient à Gaza avant le début de la guerre, ce qui a provoqué une hausse exorbitante des prix », indique à Middle East Eye Rami Abu al-Rish, responsable du commerce et des passages frontaliers pour le ministère gazaoui de l’Économie. 

Israël empêche l’importation de matières premières, de matériaux de construction, d’appareils et d’équipements électriques ainsi que de bois, de métal et de plastique à Gaza, tout en imposant des restrictions drastiques en matière d’exportations, en raison desquelles seules de faibles quantités de produits et de poissons peuvent sortir du territoire palestinien.

D’après Abu al-Rish, ces restrictions ont entraîné un état de « paralysie » dans divers secteurs industriels, commerciaux et agricoles de Gaza, ce qui a eu des conséquences négatives sur l’ensemble de la population, notamment un taux de chômage de 75 %.

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Selon le ministère gazaoui de l’Économie, des milliers de personnes ont perdu leur moyen de subsistance au cours des derniers mois, que ce soit en raison de la destruction d’installations commerciales et industrielles ou de la suspension des activités de production due au blocus et aux restrictions, en plus de l’impact des restrictions maritimes sur la vie de milliers de personnes qui dépendent de la pêche pour travailler.

Alors que les marchandises qu’elles ont commandées sont bloquées du côté israélien des passages frontaliers, les entreprises palestiniennes souffrent. 

C’est le cas de celle d’Adel Hussein, directeur d’une société dans le secteur de l’énergie solaire. « Il y a d’importantes cargaisons de marchandises destinées à notre entreprise et à d’autres sociétés qui ne peuvent pas entrer, malgré la souffrance engendrée dans la bande de Gaza par les coupures de courant et la nécessité de systèmes d’énergie solaire », explique-t-il à MEE.

Selon les estimations de la Haute commission gouvernementale gazaouie en charge de la reconstruction, les pertes et les dégâts occasionnés par les onze jours de guerre s’élèvent à environ 479 millions de dollars. Adel Hussein affirme toutefois que le coût du conflit sur le long terme est difficile à quantifier.

« Les pertes directes résultant de la guerre ont été identifiées, mais il y a des pertes qui résultent de la fermeture [de la frontière], et personne n’en parle », déplore-t-il. « Il y a une récession économique majeure en raison de l’indisponibilité de nombreux biens et de la faiblesse du pouvoir d’achat des citoyens. »

Un étal de vêtements est dressé près des décombres de la tour al-Shorouk, visée par des frappes israéliennes en mai, le 12 juillet 2021 (AFP)
Un étal de vêtements est dressé près des décombres de la tour al-Shorouk, visée par des frappes israéliennes en mai, le 12 juillet 2021 (AFP)

Dans le même temps, Israël empêche l’entrée de l’aide qatarie, qui s’élève à quelque 30 millions de dollars par mois depuis la Grande Marche du retour de 2018 – ainsi, Mohammed al-Emadi, un responsable du Comité qatari pour la reconstruction, se voit empêcher d’apporter l’argent dans une valise par le passage frontalier d’Erez.

Israël soutient que les mécanismes d’entrée de l’aide dans la bande de Gaza doivent être modifiés pour éviter qu’elle ne parvienne au Hamas. Ces modifications ont été rejetées jusqu’à présent par le groupe palestinien, qui est le parti au pouvoir de facto dans la bande de Gaza depuis le conflit armé qui l’a opposé en 2007 à son rival politique, le Fatah.

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La municipalité de Gaza, la plus grande ville de la bande de Gaza, a été particulièrement touchée par les restrictions imposées aux importations. Selon le ministère gazaoui des Travaux publics et du Logement, quelque 1 800 logements ont été détruits et environ 16 800 ont été partiellement endommagés. Parmi les bâtiments détruits, on dénombre cinq tours, 74 installations publiques et gouvernementales, 66 écoles et trois mosquées.

Hisham Skaik, membre du conseil municipal, indique à MEE que treize projets d’infrastructure en cours ont été interrompus après le début de la guerre.

« Le renforcement des restrictions à Kerem Shalom, le seul poste frontalier commercial permettant l’entrée à Gaza, a également empêché le démarrage d’environ seize projets d’infrastructure qui avaient été financés il y a deux ans et pour lesquels les contrats avaient été signés », affirme-t-il.

En outre, ajoute-t-il, la municipalité n’a pas encore reçu d’aide internationale significative pour remédier aux dommages causés aux infrastructures par les frappes aériennes israéliennes en mai, dont le coût est estimé à 20 millions de dollars.

Pour Rami Abu al-Rish, « l’horizon est bouché ». Alors que la situation à Gaza s’aggrave de jour en jour, le chef d’entreprise palestinien ne voit pour sa part aucun signe d’une avancée prochaine.

Des pressions pour la libération de prisonniers

En imposant des restrictions strictes en matière d’importations, Israël ferait délibérément pression sur le Hamas afin d’obtenir la libération de quatre Israéliens, dont deux sont morts, qui seraient retenus par le mouvement palestinien à Gaza.

Les corps des soldats israéliens Oron Shaul et Hadar Goldin seraient retenus par le Hamas depuis la guerre de 2014. Deux civils israéliens, Avera Mengistu et Hisham al-Sayed, qui se sont aventurés dans la bande de Gaza en 2014 et 2015 respectivement, seraient également retenus en captivité par le Hamas.

Le Hamas insiste pour que la libération se fasse dans le cadre d’un accord d’échange de prisonniers similaire à l’accord Shalit de 2011, lors duquel un soldat israélien, Gilad Shalit, avait été échangé contre 1 027 Palestiniens emprisonnés par Israël.

Les responsables palestiniens indiquent que les efforts de médiation menés par l’Égypte n’ont donné lieu à aucune avancée tangible jusqu’à présent.

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En réponse, le Hamas et ses factions alliées à Gaza ont cherché ces derniers jours à exercer une pression sur Israël en relançant partiellement les activités dites de « confusion nocturne », initiées pendant la Grande Marche du retour le long de la barrière de séparation entre Gaza et Israël – pneus incendiés la nuit, déploiement de ballons gonflables incendiaires et explosifs depuis Gaza vers le territoire israélien, entre autres.

Selon les médias israéliens, les responsables des services militaires et de sécurité du pays craignent une nouvelle confrontation avec le Hamas si l’impasse perdure autour de l’entrée de l’aide qatarie à Gaza et des pourparlers relatifs à l’accord d’échange de prisonniers, et si les difficultés économiques et humanitaires persistantes dans l’enclave ne sont pas soulagées – outre les tensions qui se poursuivent à Jérusalem-Est occupée, notamment au sujet de la mosquée al-Aqsa.

Le porte-parole du Hamas, Abdul-Latif al-Qanu, a averti que « davantage de restrictions imposées à Gaza ne [feraient] qu’engendrer une explosion face à l’occupation ».

L’analyste politique palestinien Hassan Abdo exclut toutefois un retour à une confrontation militaire de grande ampleur avec Israël sur le court terme.

« La réalité sur le terrain à Gaza après la dernière guerre ne se prête pas à un nouveau cycle de confrontation armée, alors que d’autre part, le nouveau gouvernement israélien dirigé par Naftali Bennett est un gouvernement “fragile” qui craint que toute confrontation avec Gaza ne précipite son effondrement. »

Néanmoins, Hassan Abdo n’exclut pas l’idée que la poursuite des restrictions israéliennes contre Gaza puisse entraîner une réapparition « des actions de la Grande Marche du retour et l’émergence de nouvelles formes de résistance à l’occupation ».

Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.

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