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« Je suis Irakien, je lis » : le festival qui fait vibrer Bagdad

Le festival se tient pour sa 5e édition sur les bords du Tigre. Une aubaine pour les lecteurs et pour la ville qui manque de lieux culturels
Cette année, pour sa 5e édition, le festival « Je suis Irakien, je lis » distribue gratuitement 15 000 livres (AFP)
Par AFP

BAGDAD – Assis dans l'herbe sur les bords du Tigre, des lecteurs, hommes et femmes de tous âges, sont venus feuilleter romans à l'eau de rose, essais philosophiques ou poésie : à Bagdad, le temps d'une journée, un festival a mis la lecture à l'honneur.

Depuis des décennies, du Maroc au Yémen, en passant par le Soudan et Oman, le dicton veut que les livres soient « écrits au Caire, publiés à Beyrouth et lus à Bagdad ».

Cette année, pour sa 5e édition, le festival « Je suis Irakien, je lis » a voulu redonner tout son sens au proverbe en distribuant « 15 000 livres récoltés gratuitement et offerts à tous », explique à l'AFP un volontaire, Moustapha al-Katib, 19 ans.

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Autour de longues tables recouvertes de nappes rouges où – avec d'autres bénévoles – il aligne les livres, des mains se tendent à chaque fois que sort des cartons un roman, un manuel technique ou juridique, un traité religieux, de géographie ou un recueil de poésie.

Hussein Ali, étudiant en droit de 23 ans, était déjà venu alimenter sa bibliothèque l'année dernière dans le parc Abou Nouwas, du nom du célèbre poète arabe connu notamment pour ses écrits sur les délices de l'ivresse.

De retour cette année, il « espère que ce type d'événement culturel continuera, notamment pour les jeunes », qui déplorent régulièrement le manque de lieux culturels et d'espaces d'expression en Irak, où 60 % de la population a moins de 25 ans. 

Foire aux livres organisée tous les vendredis dans une rue de Bagdad (Tom Westcott/MEE)

« Notre cerveau, c'est comme une boîte qu'il faut toujours remplir avec des nouvelles choses », explique Raghed Nassir, étudiante en finances de 22 ans qui dit lire « beaucoup de livres, surtout des romans ».

Touqa Mohammed, juriste en devenir du même âge, veut aussi du « changement ». Attraper un livre au hasard parmi ceux distribués, « c'est encore mieux, c'est comme une nouvelle aventure », lance-t-elle dans un sourire.

De nombreux policiers

À côté, sur un immense panneau, des dizaines de personnes, feutres à la main, laissent un message. L'un d'eux a inscrit : « lis plus et tu verras encore plus loin ». D'autres messages appellent à lire pour survivre aux difficultés du quotidien.

Mountazer Jawad est venu spécialement de sa province de Diwaniyah, à 200 kilomètres de la capitale, pour faire le plein de livres. Si lire est à la portée de tout un chacun, être publié n'est pas donné à tous, affirme à l'AFP le jeune homme aux cheveux noirs ultra-gominés et au look travaillé.

« Pour les jeunes auteurs, il est très difficile d'accéder à une aide pour être imprimé et édité »

-Mountazer Jawad, auteur

À 20 ans, il affirme avoir « de nombreux écrits, dont trois romans ». Mais, dit-il, « pour les jeunes auteurs, il est très difficile d'accéder à une aide pour être imprimé et édité ».

Passionné de littérature, il a déjà dû renoncer à des études dans cette branche, au profit d'un diplôme en gestion et administration, « pour obéir à sa famille pour qui cette filière ne lui permet pas de trouver un travail, et à cause de la situation en Irak ».

Dans et autour du parc, la présence de nombreux policiers est là pour rappeler que la sécurité en Irak, où chaque jour une attaque ensanglante une ville ou une localité du pays, est loin d'être rétablie.

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Fusils automatiques à l'épaule, ils s'autorisent toutefois à admirer avec les badauds les artistes qui peignent leur chevalet posé dans l'herbe, des bibliothèques, des lecteurs ou encore des portraits du « Che ».

Touqa Mohammed, gilet foncé sur sa chemise à carreaux rouge et noir, se félicite de voir « de nombreux jeunes réunis autour de la lecture car c'est un moyen de faire changer la société ». 

Un sujet d'autant plus brûlant « pour les femmes irakiennes, dont la vie est régie par les traditions », renchérit Raghed Nassir, un foulard aux motifs colorés noués en bandana sur un côté du crâne.

En surplomb, une statue se dresse : celle de Shéhérazade, la princesse des Mille et une nuits, contant au sultan Shahriar une nouvelle épopée. Une histoire qui lui permettra de rester en vie une nuit de plus. 

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