Plus d’un million de personnes vivent encore en état de siège en Syrie, selon un rapport
Plus d’un million de Syriens vivent encore en état de siège alors même que le cessez-le-feu actuel négocié par les États-Unis et la Russie est entré en vigueur, selon un rapport accablant publié ce mardi par le groupe de surveillance Siege Watch.
D’après l’organisation, un projet conjoint de l’organisation pour la paix PAX et du Syria Institute, plus d’un million de personnes étaient encore prises au piège dans au moins 40 communautés assiégées à travers le pays en juillet.
Bien que Siege Watch ait reconnu que des milliers de personnes ont depuis été évacuées du quartier assiégé de Daraya, à Damas, le rapport a souligné qu’avant cela, un grand nombre de civils dans les zones contrôlées par les rebelles étaient dans de nombreux cas simplement transférés vers d’autres zones en état de siège, ce qui a considérablement limité la baisse globale du nombre de Syriens pris au piège par les combats.
Le groupe a déclaré qu’1,4 million de Syriens supplémentaires figuraient sur sa liste de surveillance des individus sous la menace d’un siège ; Siege Watch a exhorté la communauté internationale à agir en urgence.
« Ces évacuations de masse contribuent à ce qui est devenu une politique claire d’ingénierie démographique orchestrée par le gouvernement syrien »
« La situation des Syriens assiégés semble sombre. Six communautés assiégées observées par Siege Watch ont été prises par la force au cours de la période étudiée, ce qui a déplacé des dizaines de milliers de personnes. Pas un seul siège n’a été levé par des moyens diplomatiques. »
L’évacuation de Daraya en août suite à la capitulation des rebelles a été présentée comme un « nettoyage ethnique » par certaines sources d’opposition, qui ont souligné que la banlieue était désormais pratiquement vide après la fin du siège imposé par le gouvernement syrien. Le président syrien Bachar al-Assad a été montré ce lundi par la télévision d’État syrienne dans une posture de défi, en train de prier dans la ville à l’occasion du début de la fête musulmane de l’Aïd al-Adha.
« Les évacuations forcées soulèvent un certain nombre de questions au-delà du fait que les gens sont souvent déplacés vers d’autres zones assiégées : ces évacuations de masse contribuent à ce qui est devenu une politique claire d’ingénierie démographique orchestrée par le gouvernement syrien », a indiqué à Middle East Eye Valerie Szybala, directrice exécutive du Syria Institute.
« La Syrie est déjà submergée par une énorme crise des déplacés internes et les personnes déplacées de cette manière sont très vulnérables à des violations des droits de l’homme telles que des disparitions forcées ou une conscription militaire. »
Le quartier d’al-Waer, à Homs, a été décrit dans le rapport comme la zone nécessitant l’attention la plus urgente de la part des puissances mondiales, avec une communauté de près de 100 000 personnes au bord de l’« effondrement complet ». « Le secteur médical a été durement touché par l’intensification du siège d’al-Waer en raison d’une pénurie de carburant et de fournitures médicales qui entrave le traitement efficace de toutes les affections », a précisé le rapport.
Le rapport a également averti que les morts de civils augmentaient « en raison d’un manque de soins pour les affections telles que les maladies rénales », avant d’ajouter que le gouvernement du président Bachar al-Assad autorisait rarement les évacuations médicales depuis cette zone.
Le rapport a ensuite appelé l’ONU et le Groupe international de soutien à la Syrie (ISSG), un groupe de puissances mondiales qui œuvre en vue de trouver une solution à la crise, à veiller à assurer la libre circulation des civils vers et depuis les zones assiégées au lieu de se concentrer sur des convois d’aide ponctuels.
Il a également appelé les organismes à « aller au bout des choses dans le suivi de la mise en œuvre de tout accord de cessez-le-feu local qu’ils contribuent à initier ».
Un cessez-le feu tendu
Dans le cadre du cessez-le-feu négocié par la Russie et les États-Unis, qui est entré en vigueur lundi soir, des convois d’aide sont amenés à entrer dans certaines des zones les plus touchées. Cependant, l’incertitude quant à la stabilité de la trêve a bloqué jusqu’ici les groupes d’aide à la frontière turque, bien que les agences insistent sur le fait qu’elles sont prêtes à se déployer rapidement en Syrie.
Le cessez-le-feu de lundi a été accueilli avec méfiance par l’opposition syrienne, mais son principal groupe de coordination, le Haut Comité des négociations (HCN), semble avoir accepté le cessez-le-feu, à condition que certaines « garanties » quant aux groupes non inclus soient respectées.
La Russie a déclaré lundi qu’elle continuerait de cibler les groupes « terroristes » au cours d’un cessez-le feu en Syrie, dont le Front Fatah al-Sham – l’ancien Front al-Nosra affilié à al-Qaïda – ainsi que le groupe État islamique.
L’accord sera soutenu par « les plus grands groupes », notamment Ahrar al-Sham, malgré le fait que ces derniers expriment leur inquiétude au sujet de la viabilité de l’accord et ont semblé tout d’abord le rejeter.
Traduction : « La télévision d’État syrienne annonce un cessez-le-feu et affirme que l’armée d’Assad a le droit de riposter à des hostilités. »
Mardi, la trêve semblait tenir, mais les analystes ont averti que le cessez-le-feu resterait probablement fragile alors que la communauté internationale est incapable de sanctionner les violations.
« Je crois que [le secrétaire d’État américain John] Kerry a noté lors de la conférence de presse de vendredi que l’accord exigeait "un accès humanitaire sans entrave et soutenu à toutes les zones assiégées et difficiles à atteindre". La priorité pour les zones assiégées devrait être de faire en sorte que cette déclaration devienne une réalité », a estimé Szybala.
« La pression la plus efficace qui pourrait être appliquée doit concerner la mise en œuvre effective des termes de l’accord, avec des conséquences pour ceux qui l’enfreignent. Le défaut de mise en œuvre a été une erreur fatale lors des accords précédents, dans la mesure où les parties belligérantes – en particulier le gouvernement syrien et ses alliés – ont appris qu’elles pouvaient commettre des violations en toute impunité. »
Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.
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