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Au Qatar, une femme dans le club très fermé des conducteurs du désert

Traverser le désert du Qatar au volant d’un véhicule tout-terrain est surtout un loisir masculin. Mais la Sud-Africaine Marcelle Visser est devenue l’une des rares femmes à pratiquer et à encadrer cette activité dans ce riche émirat du Golfe où elle vit
Marcelle Visser a découvert la conduite dans le désert grâce à son mari amateur de 4x4 (AFP)
Par AFP à SEALINE, Qatar

« Dès que mes pneus ont touché le sable, je suis tombée amoureuse du désert », confie Marcelle Visser au volant de sa Land Cruiser blanche qui se lance à travers l’étendue beige ondulée, à Sealine, dans le sud-ouest du Qatar.

Dans ce petit pays musulman conservateur, la séparation des genres est commune. Dans le désert, les femmes sont très rares. Les hommes érigent des tentes pour des veillées ou sillonnent les dunes au volant d’engins vrombissants.

« Au départ, vous pensez que c’est un sport d’hommes, ce qui vous tient à l’écart », raconte la Sud-Africaine de 36 ans, qui a découvert cette activité grâce à son mari amateur de 4x4, mais pas aussi passionné qu’elle.

Sa nomination parmi la poignée de commissaires à la sécurité, appelés capitaines, a créé la surprise et quelques remous au sein du prestigieux Dune Rider Club. Très convoité, il faut passer par un processus de sélection strict pour décrocher sa carte de membre en nombre limité.

Un 4x4 roule sur une dune du désert de Sealine au Qatar, à environ 63 kilomètres au sud de la capitale Doha, le 8 janvier 2021 (AFP)
Un 4x4 roule sur une dune du désert de Sealine au Qatar, à environ 63 kilomètres au sud de la capitale Doha, le 8 janvier 2021 (AFP)

Mais Khaled Shash, chef de la sécurité de ce club réunissant des passionnés du désert et de gros 4X4, l’a immédiatement encouragée.

« Dès que j’ai vu à quel point Marcelle était passionnée par le tout-terrain en général, j’ai décidé de miser sur elle », dit-il.

« Même chose »

Les capitaines sont responsables de la sécurité des membres du groupe lors des excursions dans le désert, de la formation des participants aux techniques de conduite hors circuit et de l’assistance aux usagers du désert en détresse.

« Dès que j’ai vu à quel point Marcelle était passionnée par le tout-terrain en général, j’ai décidé de miser sur elle »

- Khaled Shash, chef de la sécurité du Dune Rider Club

Selon le ministère de l’Intérieur, plus de 4 300 accidents ont été signalés au cours des cinq dernières années dans la zone de conduite hors circuit de Sealine, la plus populaire du Qatar.

Les Dune Riders, comme la plupart des autres clubs, organisent régulièrement des ateliers pour les nouveaux arrivants, afin de les sensibiliser à la sécurité.

Lors d’un de ces ateliers, Marcelle Visser montre à un groupe de jeunes hommes comment s’assurer que leurs voitures adhèrent bien au sable pour éviter de déraper et de s’enfoncer.

« C’est la même chose pour les femmes qui se retrouvent coincées que pour les hommes car il ne s’agit pas de force physique. Vous devez juste suivre les bonnes procédures », explique la capitaine.

Marcelle Visser (à gauche), forme les participants aux techniques de conduite hors route dans le désert de Sealine au Qatar, le 8 janvier 2021 (AFP)
Marcelle Visser forme les participants aux techniques de conduite hors route dans le désert de Sealine au Qatar, le 8 janvier 2021 (AFP)

Le camping dans le désert et le tout-terrain seront au premier plan de l’offre faite par le Qatar aux amateurs de football qui viendront dans l’émirat pour le Mondial 2022, le premier dans le monde arabe.

« Vraiment douée »

« Le tout-terrain avec ses poussées d’adrénaline a toujours fasciné les hommes et ce n’était pas un truc de femmes », déclare Khaled Shash.

Mais Marcelle Visser ne s’est pas laissée décourager, passant de simple membre du groupe à capitaine en un peu plus d’un an.

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« Cela a fait sourciller beaucoup de monde », raconte celle qui doit parfois redoubler d’efforts pour s’imposer face aux membres de son club.

Le groupe ne compte qu’une poignée de femmes – ce que Marcelle Visser cherche à changer en encourageant les compagnes des membres à tenter l’expérience.

Leurs maris ont en tout cas fini par accepter l’une des rares femmes capitaines du pays.

« Je suis allé dans de nombreux clubs, même en Inde, j’étais dans tous les clubs de deux-roues mais je n’ai jamais vu une femme qui s’occupe de ce genre de choses seule », assure Ram Arun, membre du groupe.

« C’est la première fois que je vois une femme, qui est très audacieuse, très patiente. Elle est vraiment douée », estime-t-il.

Par Anne Levasseur et Gregory Walton.

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