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Une actrice iranienne et un film égyptien récompensés à Cannes

L’actrice exilée en France Zar Amir Ebrahimi s’est vu décerner le prestigieux prix d’interprétation féminine pour son rôle dans Les Nuits de Mashhad, tandis que le réalisateur suédois d’origine égyptienne Tarik Saleh a remporté le prix du scénario pour Boy from Heaven
L’actrice iranienne Zar Amir Ebrahimi pose avec le prix d’interprétation féminine lors de la cérémonie de clôture de la 75e édition du Festival de Cannes, le 28 mai 2022 (AFP)
Par MEE

Le prix d’interprétation féminine du 75e Festival de Cannes a été décerné samedi à l’actrice iranienne Zar Amir Ebrahimi, qui vit en exil en France, pour son rôle dans Les Nuits de Mashhad.

Elle y incarne une journaliste qui tente d’élucider des meurtres en série de prostituées dans la ville sainte iranienne de Machhad.

« J’ai parcouru un long chemin avant d’arriver sur cette scène ce soir », a-t-elle déclaré au public lors de la cérémonie de remise des prix.

« Ce ne fut pas une histoire facile, il y a eu de l’humiliation, de la solitude, mais il y avait le cinéma. Il y a eu de l’obscurité, mais il y avait le cinéma. Et maintenant, je me trouve devant vous et c’est une nuit de joie. »

« Ce ne fut pas une histoire facile, il y a eu de l’humiliation, de la solitude […] Et maintenant, je me trouve devant vous et c’est une nuit de joie »

– Zar Amir Ebrahimi, lauréate du prix d’interprétation féminine au Festival de Cannes

Les Nuits de Mashhad, réalisé par Ali Abbasi, né en Iran et vivant au Danemark, s’inspire de l’histoire vraie du « tueur-araignée », un homme de la classe ouvrière qui a assassiné des prostituées au début des années 2000.

Ali Abbasi s’est vu refuser l’autorisation de tourner en Iran. Finalement tourné en Jordanie, le film devrait être interdit en Iran.

Zar Amir Ebrahimi est devenue une star en Iran vers l’âge de 25 ans pour son second rôle dans Nargess, l’un des plus longs feuilletons diffusés dans le pays.

Mais sa vie et sa carrière se sont effondrées peu de temps après la fin du programme, à la suite de la diffusion en ligne en 2006 d’une sextape dans laquelle elle figurait prétendument.

Le personnage incarné par l’actrice dans Les Nuits de Mashhad est également victime de rumeurs obscènes et de prédation masculine. 

Le film pointe du doigt la faible pression exercée par les autorités pour attraper le meurtrier, qui finit par devenir un héros de la droite religieuse. 

« Ce film parle des femmes, de leur corps, ce film est rempli de visages, de cheveux, de mains, de seins, de sexe, tout ce qu’on ne peut montrer en Iran », a déclaré Zar Amir Ebrahimi.

« Merci, Ali Abbasi, d’être si fou et si généreux. Merci d’avoir réalisé contre vents et marées cette chose aussi puissante. »

Le cinéma, a-t-elle ajouté, lui a « pratiquement sauvé la vie ».

Le prix du scénario attribué à un film égyptien

Le réalisateur suédois d’origine égyptienne Tarik Saleh a remporté le prix du scénario à Cannes pour Boy from Heaven, un thriller qui se déroule dans la mosquée al-Azhar du Caire.

Tarik Saleh a connu la célébrité en 2017 avec Le Caire confidentiel, un thriller sombre dont l’intrigue se déroule en Égypte. 

Après un passage réussi à Hollywood, où il a réalisé un épisode de Westworld et le thriller d’action The Contractor, Tarik Saleh est retourné en Égypte pour Boy from Heaven, qui décrit en détail la lutte de pouvoir déclenchée à al-Azhar par la mort soudaine et spectaculaire du grand imam. 

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Dans la lignée de son précédent film Le Caire confidentiel, il se livre à une nouvelle exploration des différentes autorités contestataires qui gouvernent l’Égypte.

Après la corruption au sein de la police, Boy from Heaven s’intéresse à la plus haute autorité religieuse du pays, dont les liens étroits avec l’establishment politique constituent un sujet bien connu mais tabou qui n’a jamais été exploré au cinéma auparavant. 

La production du film Le Caire confidentiel a été notoirement interrompue par les autorités égyptiennes, qui l’ont ensuite interdit. 

Boy from Heaven, qui a été tourné à la mosquée Süleymaniye d’Istanbul et avec des acteurs non égyptiens, devrait provoquer des remous dans un pays désormais connu pour son intolérance à l’égard de toute œuvre critique présentée à l’international.

« On m’a demandé si ce film en valait la peine », a déclaré Tarik Saleh, qui ne peut plus retourner dans sa seconde patrie, dans son discours de remerciement à Cannes.

« Bien sûr, cela n’en vaut pas la peine. L’Égypte est probablement mon endroit préféré dans le monde, […] mais il fallait que je le fasse. Je veux dédier ce prix aux jeunes cinéastes égyptiens pour qu’ils élèvent la voix et racontent leurs histoires. »

Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.

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