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Ce qu’Isabelle Adjani dit de l’Algérie

Alors que ce mercredi sort Sœurs, le nouveau film de Yamina Benguigui, la comédienne française d’origine algérienne qui partage l’affiche avec Rachida Brakni et Maïwenn a évoqué avec émotion l’Algérie dans plusieurs médias
De gauche à droite : Rachida Brakni, Isabelle Adjani et Maïwenn dans Sœurs (StudioCanal/Jour2Fête)
De gauche à droite : Rachida Brakni, Isabelle Adjani et Maïwenn dans Sœurs (StudioCanal/Jour2Fête)
Par MEE

Yamina Benguigui tenait à ce que les trois actrices de son film, Sœurs, qui sort ce mercredi en France, aient un « lien avec l’Algérie ». Et c’est Isabelle Adjani – une des trois sœurs, avec Rachida Brakni et Maïwenn, qui partent à la recherche de leur frère – qui s’est le plus exprimée sur son pays d’origine, celui de son père, à l’occasion de la promotion du film.

Dans Le Dauphiné libéré, elle confie : « C’était bouleversant de revenir en Algérie pour tourner un film qui met en scène un drame familial, qui expose la complexité des liens entre le ‘’ici’’ et le ‘’là-bas’’, entre deux pays qui ont une histoire commune si douloureuse dont je fais aussi partie tout en ayant ma propre histoire. J’ai été émue par la gentillesse des personnes qui ont participé à ce qu’on pourrait appeler des retrouvailles secrètes. Il y avait beaucoup de simplicité, c’était apaisant. »

Celle qui fut récompensée par cinq César de la meilleure actrice, un record inégalé, a toujours été très engagée aux côtés des Algériens. 

En novembre 1988, de passage à Alger, elle s’était par exemple adressée aux étudiants de la faculté de Bouzareah, dans une intervention restée célèbre : « Je suis venue pour vous dire que je vous admirais, vous êtes les nouveaux combattants de ce pays. C’est ça que je voudrais que la jeunesse française sache et j’aimerais qu’elle vous soutienne. Je suis fière en tant que Française d’assister à la naissance d’une démocratie grâce à vous. »

Isabelle Adjani et le militant des droits de l’homme Ali Yahia Abdennour à Alger en novembre 1988 (AFP/Joël Robine)
Isabelle Adjani et le militant des droits de l’homme Ali Yahia Abdennour à Alger en novembre 1988 (AFP/Joël Robine)

Aujourd’hui encore, Isabelle Adjani suit ce qu’il se passe en Algérie : « Le pays évolue, il est en pleine mutation, les femmes algériennes sont diplômées, actives… Et comme elles, comme Zohra [un des personnages du film], j’espère que le code de la famille va changer, qu’il sera plus favorable aux mères, aux filles, aux femmes… aux sœurs », ajoute-t-elle dans l’interview au Dauphiné libéré.  

« Dans notre ADN »

Sur ce sujet, Yamina Benguigui la rejoint : « C’est dans notre ADN de suivre ce qui se passe en Algérie », a-t-elle déclaré dans l’émission « C à vous » sur France 5. « On suit, sur la pointe des pieds, avec beaucoup d’émotions, avec notre cœur car le peuple algérien est avec nous. Mais à quel moment le peuple algérien et la diaspora font-ils corps ? »

Cette relation à leur pays d’origine n’est pas sans douleur. 

Rachida Brakni rappelle dans l’émission cette « injonction à choisir entre deux nations », ce « tiraillement », « en France, le regard des autres, faisait que je [n’étais] pas totalement française, et quand j’allais en Algérie, on m’appelait ‘’l’immigrée’’ ». 

Au bord des larmes, Isabelle Adjani a lu sur le plateau de « C à vous » un passage du livre L’Or du temps de François Sureau, rêverie autobiographique, littéraire et philosophique, en expliquant : « Elles ont toutes une réparation à faire. Pour moi, ce sont trois visages de l’Algérie, qui sont fracturés de façons différentes, comme le rapport entre l’Algérie et la France, et elles font ce chemin, même de façon antagoniste, pour réparer quelque chose qui les réunit, pour ne faire qu’une et être ensemble, à trois, dans une sororité intégralisée. »

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Le cinéma est peut-être une des solutions pour « réparer » les êtres des deux côtés de la Méditerranée.

Dans le magazine Elle, à la question « le cinéma peut-il combler le silence sur l’Algérie ? », l’actrice défend : « Il n’y a jamais assez de films de mémoire. Les Américains n’ont jamais cessé d’en faire sur le Vietnam, mais, pour nous, anciens colons, c’est compliqué, et l’Algérie est un pays qui veut rester impénétrable ». 

« La quatrième génération va s’intéresser à cette histoire parce qu’il y a un grand silence qui prête au malentendu. Je n’ai jamais entendu mon père parler un mot d’arabe, par exemple. Il va falloir que les uns et les autres se posent en réconciliateurs d’un héritage, pour retrouver une culture qui, bien souvent, se réduit à l’identité religieuse. »

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