Égypte : un ancien candidat à la présidence victime d’une agression « barbare » en prison
L’ancien candidat à la présidence égyptienne Abdel Moneim Aboul Fotouh a été victime d’une agression « barbare » de la part de gardiens dans sa cellule dans le tristement célèbre complexe pénitentiaire de Tora, selon sa famille.
Ancien membre des Frères musulmans et dirigeant du parti d’opposition Pour une Égypte forte, Abdel Moneim Aboul Fotouh, 71 ans, aurait été agressé le 23 mars dans la prison agricole de Tora appartenant au complexe, selon un communiqué publié sur Facebook par sa famille.
Selon une source juridique, qui s’est adressée au journal égyptien indépendant en ligne Mada Masr sous couvert d’anonymat, celui qui s’est porté candidat à la présidentielle en 2012 s’apprêtait à déposer une plainte officielle auprès du procureur général.
À la suite de l’agression présumée, Abdel Moneim Aboul Fotouh, qui a été victime de multiples crises cardiaques et d’autres problèmes de santé chroniques au cours de sa détention, a souffert d’une angine de poitrine, selon la déclaration.
L’homme politique dénonce depuis longtemps les négligences médicales dont il est victime depuis son arrestation et son placement en détention en février 2018, une pratique abondamment recensée par des groupes de défense des droits de l’homme dans les prisons égyptiennes.
Il a été arrêté cette année-là pour avoir prétendument diffusé de fausses informations dans le but de nuire à l’intérêt national. Il a fait l’objet de plusieurs autres accusations depuis lors mais n’a pas été traduit en justice.
En juin 2021, le bureau du procureur général de la sûreté de l’État a rendu une décision en faveur de la libération d’Abdel Moneim Aboul Fotouh et abandonné certaines des charges qui pesaient sur lui depuis son arrestation, mais sa détention a été renouvelée après que l’institution a déposé de nouvelles charges contre lui dans le cadre d’une autre affaire.
« Une mort lente »
En février 2020, son nom a été ajouté à une nouvelle affaire au terme de sa détention provisoire initiale.
Alors que la loi égyptienne fixe la durée maximale d’une détention provisoire à deux ans, il est courant en Égypte de voir de nouvelles poursuites être engagées contre des détenus politiques au terme de cette période, une pratique que les groupes de défense des droits de l’homme décrivent comme un « recyclage des affaires existantes » permettant une détention indéfinie.
Abdel Moneim Aboul Fotouh avait commencé à protester le 29 janvier en refusant de recevoir des visiteurs.
Cette initiative était liée à ses conditions de détention « exceptionnelles », selon le communiqué de sa famille, qui indique qu’il « se voit imposer des restrictions injustifiées ».
L’agression présumée s’est produite après que le prisonnier a demandé à rencontrer le directeur de l’établissement pénitentiaire afin de déposer une plainte expliquant pourquoi il refusait de recevoir des visiteurs, indique sa famille.
En juillet 2021, Abdel Moneim Aboul Fotouh a survécu à « une grave crise cardiaque » en prison, selon son fils. Il affirme que le gardien qui se trouvait à l’extérieur de la cellule « a été témoin de ses souffrances alors qu’il cherchait en vain de l’aide pendant des heures ».
La famille de l’homme politique a accusé à plusieurs reprises les autorités de le condamner à « une mort lente » en raison des négligences médicales et des conditions rudes de son isolement cellulaire.
« Après plus de trois ans et cinq mois de détention provisoire en isolement cellulaire total et une détérioration continue de son état de santé qui menace sa vie à chaque instant, quand rentrera-t-il chez lui ? », s’est interrogé son fils en juillet dernier.
Au moins 60 000 prisonniers politiques
Abdel Moneim Aboul Fotouh est l’un des 60 000 prisonniers politiques au minimum qui auraient été emprisonnés depuis que le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a pris le pouvoir par un coup d’État en 2013.
Sissi a renversé Mohamed Morsi, le premier président démocratiquement élu du pays, qui était affilié aux Frères musulmans.
Plusieurs dirigeants des Frères musulmans sont morts en détention ces dernières années, dont Mohamed Morsi et l’ancien député Essam el-Erian.
Selon des groupes de défense des droits de l’homme, ces décès sont très probablement liés à des négligences médicales et aux conditions de détention déplorables.
Selon le Committee for Justice, établi à Genève, au moins 731 personnes sont mortes en détention en raison d’un refus de soins de santé depuis le coup d’État de Sissi.
Traduit de l’anglais (original) par VECTranslation.
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