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Guerre à Gaza : les États-Unis proposent une contre-résolution au texte soumis au Conseil de sécurité

Pour contrer le projet de résolution présenté par l’Algérie, exigeant notamment un cessez-le-feu « immédiat » dans la bande de Gaza, les États-Unis ont fait circuler un texte alternatif. Le Conseil de sécurité doit se réunir ce mardi pour voter
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Des enfants palestiniens déplacés se rassemblent pour recevoir de la nourriture dans une école publique de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 19 février 2024 (AFP/Mohammed Abed)
Par MEE

Alors que ce mardi 20 février, le Conseil de sécurité des Nations unies doit se réunir pour voter une nouvelle résolution au sujet de la guerre à Gaza, les États-Unis ont préparé un projet alternatif de résolution à celui proposé par l’Algérie, selon Reuters et l’AFP.

Le texte américain demande un cessez-le-feu « temporaire » à Gaza et s’oppose à une offensive terrestre à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, où se sont réfugiés 1,4 million de Palestiniens, sur la base d’une « formule » incluant la libération de tous les otages.

Selon la résolution américaine, « dans les circonstances actuelles, une offensive terrestre majeure entraînerait des pertes supplémentaires parmi les civils et un nouveau déplacement de population, potentiellement dans les pays voisins ».

Alors qu’ils s’étaient jusqu’ici systématiquement opposés à l’utilisation du terme « cessez-le-feu », mettant leur veto à deux textes en octobre et en décembre, leur version soutient un cessez-le-feu mais pas immédiat. 

Le projet de résolution préparé par l’Algérie exige quant à lui un cessez-le-feu « immédiat », s’oppose au « déplacement forcé de la population civile palestinienne », alors qu’Israël a évoqué une évacuation des civils avant une offensive terrestre, et réclame la libération de tous les otages.

L’ambassadrice américaine auprès des Nations unies, Linda Thomas-Greenfield, avait averti ce week-end que les États-Unis bloqueraient la résolution algérienne, affirmant que cela pourrait compromettre un accord au sujet des otages qui mettrait fin aux combats entre Israël et le Hamas.

« Nous ne pensons pas que ce produit du Conseil améliorerait la situation sur le terrain, et donc si cette résolution est mise aux voix, elle ne passera pas », a répété lundi l’ambassadeur américain adjoint à l’ONU Robert Wood.

Ultimatum du Ramadan

Les dirigeants politiques israéliens ont annoncé leur intention de lancer une offensive sur la ville frontalière du sud. Lundi, Benny Gantz, membre du cabinet de guerre israélien, a prévenu que si le Hamas ne libérait pas les otages d’ici au début du Ramadan, qui devrait commencer autour du 10 mars, Rafah serait attaquée.

La majorité des Palestiniens ayant cherché refuge à Rafah ont déjà été déplacés de leurs foyers et vivent dans des conditions terribles, avec peu d’accès à la nourriture, à l’eau ou aux médicaments.

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Une fillette palestinienne de 8 ans est par exemple décédée de déshydratation et de faim dans la ville de Gaza, a rapporté samedi l’ONG Euro-Med Human Rights Monitor.

L’ONU a averti qu’une attaque contre la ville bondée conduirait à « un massacre ».

Un ancien haut responsable américain proche du dossier a récemment déclaré à MEE que Joe Biden avait probablement dissuadé Israël de lancer une attaque immédiate contre Rafah lors d’un appel téléphonique avec le Premier ministre Benyamin Netanyahou le week-end dernier.

Les États-Unis s’opposent à toute attaque contre la ville, craignant que cela ne provoque un déplacement forcé des Palestiniens vers l’Égypte, avec des effets potentiellement déstabilisateurs sur le pays le plus peuplé du monde arabe.

Le porte-parole du Conseil de sécurité nationale, John Kirby, a qualifié cette idée de « désastre ».

Mais bien que les États-Unis soient opposés à une agression, ils n’ont pas fixé de ligne rouge explicite à Israël.

Au contraire, lors d’une conférence de presse tenue la semaine dernière, le porte-parole du département d’État, Matthew Miller, a déclaré qu’Israël devait présenter un plan « crédible » de protection des civils qui « devrait être exécuté avant qu’ils [Israël] ne lancent une campagne militaire » sur la ville.

Le président Biden a même continué à faire pression publiquement sur le Congrès pour qu’il approuve les transferts d’armes vers Israël.

Tout en manifestant son mécontentement à l’égard de l’offensive de Rafah, le projet de résolution des Nations unies laisse à Washington une certaine marge de manœuvre diplomatique pour éviter une rupture totale avec son allié le plus proche au Moyen-Orient.

La menace israélienne d’une offensive terrestre sur Rafah pourrait constituer un moyen de pression, dans le cadre de négociations pour un accord entre des responsables arabes, israéliens et américains, indiquent des experts à MEE

L’administration américaine concentre ses efforts sur la négociation d’un accord entre le Hamas et Israël pour la libération des otages, qui pourrait déboucher sur une trêve de six semaines. Joe Biden espère que cette trêve pourra s’étendre à une « pause durable dans les combats ».

La menace israélienne d’une offensive terrestre sur Rafah pourrait constituer un moyen de pression, dans le cadre de négociations pour un accord entre des responsables arabes, israéliens et américains, indiquent des experts à MEE.

Mais la fuite du projet de résolution de l’ONU pourrait également être un moyen pour les États-Unis de faire pression sur Israël.

Toutefois, les appels lancés par des législateurs d’extrême droite au sein du gouvernement israélien en faveur de la colonisation de la bande de Gaza, ainsi que les signes indiquant qu’Israël prépare le terrain pour la création de zones tampons dans la région, ont contrarié Washington, qui souhaite maintenir l’intégrité territoriale de l’enclave assiégée.

Le projet de résolution américain rejetterait « toutes les actions menées par l’une ou l’autre partie qui réduisent le territoire de Gaza, de manière temporaire ou permanente, y compris par l’établissement officiel ou officieux de zones dites tampons, ainsi que la démolition généralisée et systématique des infrastructures civiles ».

Pour qu’une résolution soit adoptée par le Conseil de sécurité des Nations unies, elle doit recueillir neuf votes favorables et aucun veto de la part des membres permanents, qui sont les États-Unis, la France, la Grande-Bretagne, la Russie et la Chine.

Traduit de l’anglais (original) par Imène Guiza.

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