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Israël a attaqué des humanitaires dont il connaissait la géolocalisation, selon Human Rights Watch

Dans un nouveau rapport, l’ONG a recensé huit frappes israéliennes contre des organisations humanitaires qui avaient fourni leurs coordonnées à l’avance à l’armée
Des hommes marchent à travers les décombres de bâtiments détruits avec des colis d’aide humanitaire récupérés après leur largage aérien dans le nord de la bande de Gaza, le 23 avril 2024 (AFP)
Par MEE

Les forces israéliennes ont mené au moins huit attaques contre des convois et des locaux humanitaires à Gaza depuis octobre, alors que les organisations humanitaires avaient fourni à l’avance leurs coordonnées aux autorités israéliennes, selon un nouveau rapport de Human Rights Watch.

L’ONG a indiqué mardi que ces huit attaques israéliennes avaient tué au moins quinze personnes, dont deux enfants, et en avaient blessé au moins seize autres.

Il s’agissait notamment d’attaques contre World Central Kitchen, Médecins sans frontières (MSF), l’agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA), Medical Aid for Palestinians (MAP), l’International Rescue Committee et l’American Near East Refugee Aid Organisation.

Concernant la frappe aérienne israélienne contre le MAP et l’International Rescue Committee le 18 janvier, les enquêteurs de l’ONU qui se sont rendus sur place ont conclu qu’elle avait probablement été menée avec des munitions fabriquées aux États-Unis et dont les pièces étaient fournies par le Royaume-Uni. La frappe a blessé trois personnes.

Le 1er avril, une attaque israélienne contre le convoi de World Central Kitchen a tué six travailleurs humanitaires étrangers et leur chauffeur palestinien, une frappe qu’Israël a qualifiée d’« erreur » et pour laquelle il s’est excusé.

Comme pour les huit attaques documentées par Human Rights Watch, World Central Kitchen avait fourni à l’avance aux autorités israéliennes les coordonnées GPS de son personnel, mais le convoi a quand même été attaquée.

« Le meurtre par Israël de sept travailleurs humanitaires de World Central Kitchen était choquant et n’aurait jamais dû se produire en vertu du droit international », a déclaré Belkis Wille de Human Rights Watch. « Les alliés d’Israël doivent reconnaître que ces attaques qui ont tué des travailleurs humanitaires se produisent encore et encore, et doivent cesser. »

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Ce lundi, un membre du service de sécurité de l’ONU (UNDSS), de nationalité indienne, a été tué par des tirs, dont l’origine n’a pas été précisée, contre son véhicule dans le sud de Gaza. Il s’agit du premier décès d’un employé international de l’ONU dans le territoire palestinien depuis le début de la guerre le 7 octobre.

L’ONU a démenti mardi les allégations de l’armée israélienne selon lesquelles cette dernière n’avait « pas été informée de l’itinéraire du véhicule » qui selon elle se trouvait dans une « zone de combat en cours ».

À Genève, un porte-parole des Nations unies, Rolando Gomez, a affirmé que « l’ONU informe les autorités israéliennes du mouvement de tous [ses] convois », comme « c’est le cas sur tous les théâtres d’opération ».

« C’était le cas [lundi] matin, nous les avons donc tenus informés. Il s’agissait d’un véhicule de l’ONU clairement identifié », a-t-il indiqué lors d’un point de presse régulier.

« On ne peut pas compter sur la déconfliction »

Selon l’ONU, 254 de ses travailleurs humanitaires ont été tués depuis le début de la guerre à Gaza le 7 octobre. Au moins 169 installations de l’UNRWA ont été touchées par l’armée israélienne lors de 368 incidents distincts.

Des employés de onze organisations et agences humanitaires ont déclaré à Human Rights Watch que les attaques israéliennes les avaient contraints à suspendre leurs activités, à réduire leur personnel ou à restreindre leur travail d’une autre manière.

« Je ne peux pas prendre le risque d’envoyer davantage de personnel à Gaza parce que je ne peux pas compter sur la déconfliction pour assurer leur sécurité », a déclaré un cadre supérieur d’une organisation attaquée par les forces israéliennes.

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Le droit international interdit les attaques aveugles ciblant des biens civils, comme les convois humanitaires, qui peuvent causer des dommages aux civils d’une manière disproportionnée par rapport à tout avantage militaire.

Dans l’affaire du génocide contre Israël, la Cour internationale de justice a rendu en janvier un arrêt provisoire ordonnant au pays d’autoriser l’entrée de l’aide humanitaire d’urgence à Gaza.

Mais depuis cette décision, il a été constaté qu’Israël défiait l’ordre en bombardant directement les convois d’aide et en entravant les livraisons d’aide en en retardant et refusant l’entrée.

« D’un côté, Israël bloque l’accès aux provisions humanitaires vitales et, de l’autre, il attaque les convois qui livrent une partie de la petite quantité qu’il autorise à entrer », a commenté Belkis Wille. « Les forces israéliennes devraient immédiatement mettre un terme à leurs attaques contre les organisations humanitaires, et les responsables de ces crimes devraient être traduits en justice. »

Des civils israéliens ont également bloqué l’entrée de l’aide dans l’enclave, immobilisant les camions d’aide en organisant des sit-in, en déposant de grosses pierres et même en attaquant directement les véhicules.

En début de semaine, les colons israéliens ont suscité l’indignation après avoir été filmés en train d’attaquer plusieurs convois d’aide humanitaire traversant la Cisjordanie occupée vers la bande de Gaza.

Traduction : « Tous ceux [qui demandent] ‘’l’envoi de la garde nationale’’ contre les jeunes qui protestent contre le génocide sur les campus universitaires semblent étrangement silencieux quant à cette destruction de biens visant délibérément à affamer les gens. »

Des vidéos partagées en ligne lundi montraient des manifestants jetant des colis de nourriture sur la route, piétinant des cartons et déchirant des sacs de céréales, alors que la population de Gaza est confrontée à une insécurité alimentaire aiguë et à la famine.

Traduit de l’anglais (original) et actualisé.

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