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Israël accusé de génocide à la CIJ : la couverture médiatique de Middle East Eye présentée comme preuve

L’équipe de juristes sud-africains utilise les vidéos et articles de MEE comme preuve de l’« intention génocidaire » d’Israël à l’encontre des Palestiniens de Gaza
Le juriste sud-africain Tembeka Ngcukaitobi a cité les vidéos de MEE lors de sa présentation à la Cour internationale de justice jeudi (UNTV)
Par MEE

Des vidéos et des articles provenant de la couverture médiatique de la guerre à Gaza par Middle East Eye ont été présentés comme preuves à la Cour internationale de justice (CIJ) dans le cadre de la plainte de l’Afrique du Sud accusant Israël de génocide.

Jeudi, l’équipe juridique de l’Afrique du Sud a présenté, lors de la première journée d’audience à la Cour internationale de justice à La Haye, une vidéo publiée le mois dernier sur les réseaux sociaux par MEE, montrant des soldats israéliens chantant et scandant des slogans en faveur de l’occupation et de la destruction de la bande de Gaza.

Les vidéos ont été présentées par Tembeka Ngcukaitobi, juriste sud-africain, comme preuve de ce qu’il a qualifié d’« intention génocidaire » d’Israël à l’égard de la population palestinienne de Gaza.

Une des vidéos montre des soldats israéliens qui, le 7 décembre 2023, dansent et chantent dans une base militaire israélienne et promettent d’« effacer la semence d’Amalek », tout en affirmant qu’il n’y a pas de « civils non impliqués » à Gaza.

Le chant semble faire référence à l’ancienne nation d’Amalek, que Dieu, selon la Bible, a ordonné aux Israélites de détruire. Ngcukaitobi a cité les commentaires antérieurs du Premier ministre israélien Benyamin Netanyaohu dans un discours prononcé devant les soldats le 28 octobre, dans lequel il a déclaré : « Vous devez vous rappeler ce qu’Amalek vous a fait. »

Netanyahou avait réitéré ce message dans une lettre adressée aux forces armées israéliennes quelques jours plus tard, a ajouté Tembeka Ngcukaitobi. L’intention de détruire Gaza a été « nourrie aux plus hauts niveaux de l’État », a-t-il estimé.

Traduction : « Une vidéo publiée sur X, anciennement Twitter, par le journaliste israélien Yinon Magal, montre des soldats israéliens en train de chanter et scander des slogans en faveur de l’occupation de Gaza et pour ‘’effacer la semence d’Amalek’’, affirmant qu’il n’y a pas de ’’civils innocents’’ à Gaza. »

« Le 7 décembre 2023, les soldats israéliens ont prouvé qu’ils avaient compris le message du Premier ministre de se souvenir des actes d’Amalek comme d’un génocide. »

« Ils ont été filmés en train de danser et de chanter par des journalistes. Nous connaissons notre devise, il n’y a pas de personnes non impliquées, elles obéissent à un seul commandement, afin d’effacer la semence d’Amalek. L’invocation d’Amalek par le Premier ministre est utilisée par les soldats pour justifier le meurtre de civils, y compris d’enfants. »

Tembeka Ngcukaitobi a également souligné que les soldats israéliens s’étaient filmés en train de détruire des infrastructures à Gaza, et a diffusé un extrait traduit par MEE, qui montre un soldat israélien détruisant plusieurs bâtiments dans le quartier de Shuja’iyya, dans le nord de la bande de Gaza.

« Ce sont les soldats qui exécutent leur ordre », a-t-il commenté.

Traduction : « Des soldats israéliens se sont filmés en train de faire exploser plus de 50 bâtiments dans le quartier de Shuja’iyya, dans la bande de Gaza. Tandis que les cris des Palestiniens se font entendre, les soldats israéliens applaudissent. »

Les audiences de jeudi ont également mentionné le reportage de la correspondante de Middle East Eye à Gaza Maha Hussaini sur les exécutions de Palestiniens par des soldats israéliens à Gaza ; un article de Rayhan Uddin sur un vétéran de l’armée israélienne âgé de 95 ans qui a appelé les soldats à « effacer » les femmes, les enfants et les familles palestiniennes ; et un article de Katherine Hearst sur un professeur d’art dramatique tué lors de frappes aériennes israéliennes ciblant un camp de réfugiés dans le centre de la bande de Gaza.

La plainte de l’Afrique du Sud auprès de la CIJ comprend également un certain nombre de références à la couverture médiatique de la guerre à Gaza par MEE, notamment un article de Nadda Osman sur l’assassinat d’une professeure de musique et un article de Nader Durgham sur la mort sous les bombes d’une lycéenne qui avait obtenu les meilleurs résultats aux examens de fin d’études secondaires de toute la Palestine l’année dernière.

L’Afrique du Sud a déposé en décembre une requête contre Israël auprès de la CIJ en affirmant que les actions d’Israël à Gaza étaient « de nature génocidaire parce qu’elles visent à provoquer la destruction d’une partie substantielle du groupe national, racial et ethnique palestinien ».

C’est la première fois qu’Israël est jugé en vertu de la convention des Nations unies sur le génocide, qui a été élaborée après la Seconde Guerre mondiale à la lumière des atrocités commises contre les juifs et d’autres minorités persécutées pendant l’Holocauste.

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Au cours de l’audience de jeudi, le professeur Max du Plessis, un autre juriste représentant l’Afrique du Sud, a déclaré qu’Israël avait soumis le peuple palestinien à une violation oppressive et prolongée de ses droits à l’autodétermination pendant plus d’un demi-siècle.

Max Du Plessis a fait valoir que, sur la base des documents présentés à la Cour, les actes d’Israël étaient à juste titre qualifiés de génocidaires.

« L’obligation [morale] de l’Afrique du Sud est motivée par la nécessité de protéger les Palestiniens de Gaza et leurs droits absolus à ne pas être soumis à des actes génocidaires », a-t-il affirmé.

Les affaires de génocide, qui sont connues pour être difficiles à prouver, peuvent prendre des années à être tranchées, mais l’Afrique du Sud demande à la Cour de mettre rapidement en œuvre des « mesures provisoires » et « d’ordonner à Israël de cesser de tuer les Palestiniens de Gaza et de leur causer de graves préjudices mentaux et corporels ».

Les décisions de la Cour sont généralement reconnues par les États membres, mais la CIJ dispose de peu de moyens pour les faire respecter. Toute issue à cette affaire sera donc vraisemblablement symbolique.

En 2004, la Cour international de justice a émis un avis non contraignant selon lequel la construction par Israël de son mur de séparation en béton en Cisjordanie occupée était illégale et que celui-ci devait être démantelé. Plus de vingt ans plus tard, les murs et les clôtures sont toujours debout.

Traduit de l’anglais (original) par Imène Guiza.

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